Tribune │ « Mieux comprendre la valeur de la DPG et du DSN à travers la redevabilité »

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Ceci est une analyse de Ousmane Djiguemdé sur la Déclaration de politique générale et le discours sur la situation de la nation que prononcera bientôt le nouveau Premier ministre Christophe Dabiré.

Dans quelques jours, le nouveau Premier Ministre donnera sa Déclaration de Politique Générale (DPG) puis après, il devra se soumettre à l’exercice d’un Discours sur la Situation de la Nation (DSN). Je me propose ici de vous donner une grille de lecture de la valeur de ces deux outils dans le processus de redevabilité.

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Pour mieux appréhender la question de la redevabilité, il est nécessaire d’établir un rapprochement de cette notion avec la gouvernance et les concepts qui lui sont associés. Ainsi donc, les concepts subsidiaires de la redevabilité, qui portent le processus de responsabilisation et celui du feed-back sur l’état de mise en œuvre de la tâche ou de la mission ayant nécessité cette responsabilisation, sont incontournables pour comprendre toute la signification et toute la portée de la redevabilité, c’est-à-dire une appréciation sémiotique complète de la notion de redevabilité.

À l’observation, il est de plus en plus récurrent que l’imputabilité et la reddition de comptes sont des concepts qui se dissimulent le plus souvent dans les trois principaux concepts supports de la gouvernance, établis sous la forme de capacités d’exercice de responsabilités, y compris celles de dire ce qu’on va faire, ce qu’on a fait et ce qu’on compte faire pour réajuster ou corriger ce qui est en train d’être fait ou ce qui a déjà été fait et dont la qualité et/ou le nombre sont approximatifs ou simplement insatisfaisants. Ces capacités gravitent toutes autour de l’individu parce que tout est rapporté à l’individu qui endosse la charge et la responsabilité. On retiendra qu’il s’agit du pouvoir de l’individu, du devoir de l’individu et du vouloir de l’individu.

Dans le cadre de la gestion publique, c’est l’usage synergique de ces trois facteurs qui fonde la plénitude de la responsabilité, que revêt le mandataire (l’agent public ou le gestionnaire public) aux yeux du mandant qui est le peuple (directement ou par l’intermédiaire d’un collège ou d’un gestionnaire public), et pour laquelle le mandataire devient redevable jusqu’à l’évaluation de sa mission ou de sa tâche.

Ainsi donc, le pouvoir s’acquiert par la volonté du mandant de se délester de quelques-unes de ses prérogatives et de certains de ses droits au profit de la collectivité, dans le cadre d’une entente initiale implicite (par tacite adhésion à un projet de société ou programme d’activités) et matérialisée de façon explicite par voie élective ou nominative et la signature mutuelle ou non d’un contrat d’objectifs. En y souscrivant ainsi, le mandant admet la forme d’Etat et/ou de son démembrement, ainsi que les méthodes de gestion des contributions citoyennes multiformes visant à produire des services publics pour lui.

Ce qui s’ajoute lorsque le facteur de la redevabilité devient un critère de gouvernance, c’est cette obligation de parvenir à la satisfaction générale, sans discriminations non consenties par les mandants, qui pèse sur les mandataires individuellement ou collectivement. En d’autres termes c’est une souscription au principe de gestion axée sur la primauté et le respect de l’intérêt général et la proscription de toute forme de rupture d’égalité qui ne proviendrait pas d’une modulation de ce principe par des voies consensuelles, voire légales ou règlementaires. Cette conviction est la sève nourricière de la confiance du citoyen en l’Etat, en son administration et en ses mécanismes de fonctionnement et de gestion de ses intérêts.

C’est donc en contrepartie de cette concession que le citoyen place au détenteur du pouvoir ce « devoir nouveau » (la redevabilité), qui lui était quasiment étranger en tant que citoyen ou individu quelconque, d’un Etat où les droits humains ne prévalaient pas toujours. Par contre, la seule chose qui est sujette à caution dans ce processus, c’est le vouloir ou volonté du mandataire.

C’est pour prévenir les défauts de lucidité et d’impartialité du mandataire et garantir la qualité de ses décisions, que cette volonté a toujours été soumise, d’une façon ou d’une autre, à un processus de régulation. Dans les sociétés traditionnelles, par exemple, les décisions du roi ou du chef étaient soumises à l’avis de sa cour. Aujourd’hui, est apparue une kyrielle d’instances, d’organes et d’autorités pour ajuster, annuler ou réguler les décisions des gens de pouvoir.

Compte tenu de ces réalités, on ne peut plus soutenir que la redevabilité, dans une société contemporaine, est l’œuvre d’un diktat commandé par une allégeance quelconque à un pouvoir hiérarchique, en toute ignorance de la construction de ces mécanismes de pouvoir et de reddition de comptes qui ont toujours fortement contribué à organiser et sauvegarder les sociétés humaines jusqu’à ce jour. De ce point de vue, il ne saurait y avoir d’appréciation objective de la redevabilité, dans l’administration publique burkinabè, sans un rapprochement de l’esprit de la redevabilité dans les organisations traditionnelles africaines, aussi lointaines que possible, avec l’esprit, la lettre et la pratique de la redevabilité dans la société moderne burkinabè.

Il s’agit là de paramètres importants pour comprendre l’attitude des acteurs politiques et administratifs burkinabè vis-à-vis de la redevabilité exigée d’eux par une population insurgée et très disposée à tout faire changer, même sous le sceau de l’anarchie.

Cependant, en dehors du vécu de ces acteurs, c’est-à-dire leur réalité sociologique et psychologique, il semble incertain de disposer d’assez d’outils pour comprendre ce qu’est devenue la redevabilité à l’intérieur du système administratif burkinabè, dont on ne sait si ce sont les mauvaises pratiques qui ont impacté sa construction, au point de lui donner une forme incomplète et indésirable ou si c’est la qualité de sa construction qui a impacté les pratiques administratives, du fait justement d’une difficile conciliation entre traditions et modernité en matière de conception de redevabilité ? Sauf à y regarder de près, on a l’impression de retrouver là le mythe insoluble de l’ancienneté de la poule et de l’œuf !

Ousmane DJIGUEMDE

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