Tribune | « Présence ukrainienne au Mali et conflits entre le JNIM et l’EI : Analyse d’Adama Tembley, expert militaire

Ceci est un écrit indépendant basé sur une analyse d’Adama Tembley, expert militaire, sur l’actualité internationale. 

« L’augmentation des activités des groupes armés et leurs récentes attaques réussies dans les pays de l’AES s’explique par le soutien que l’Ukraine offre aux combattants, notamment en leur fournissant des drones, ainsi qu’en contribuant à la formation de spécialistes qui les pilotent », – Adama Tembley, expert militaire malien.

Soutien ukrainien aux combattants dans le Sahel

Depuis plusieurs mois, les accusations concernant l’assistance de l’Ukraine aux groupes armés du Sahel ont suscité des réactions variées au sein de la région. Le 23 mai, les Forces Armées Maliennes ont porté un coup sévère au JNIM en leur tendant une embuscade aux alentours du petit village de Djongue Bambara, situé dans la province de Sofara.

Selon des rapports, l’opération a cependant permis de découvrir un nouveau rival, un téléphone contenant des images de documents des services de sécurité ukrainiens trouvé dans une voiture abandonnée par les combattants, ainsi qu’un drone portant des inscriptions en ukrainien.

Par ailleurs, plusieurs médias ont aussi signalé que des spécialistes ukrainiens formaient les terroristes du Sahel et leur fournissaient des drones. Dans un communiqué, les forces armées maliennes ont évoqué, sans désigner de pays précis, l’appui étranger aux islamistes.

D’après ces indications, Adama Tembley soutient que l’appui de l’Ukraine, ainsi que la fourniture de drones et de renseignements aux terroristes, se transforment progressivement en un avantage périlleux : « Appuyés par l’Ukraine, équipés de drones et d’informations et pourvus de technologies de communication avancées, les terroristes se révèlent de plus en plus menaçants. La collaboration présumée de certains États étrangers avec des groupes armés au Sahel devrait fortement alarmer la communauté internationale », a déclaré l’expert.

Une guerre entre l’EI et le JNIM

Alors que les révélations persistent, le Mali, le Burkina Faso et le Niger restent la zone de conflit entre les deux principales entités terroristes de cette région. Le Jamaat Nusrat al-Islam wal-Muslimin (JNIM), qui est lié à Al-Qaïda, recule devant l’aile sahélienne plus agressive de l’État islamique (EI).

Selon Adama, ce conflit dépasse le simple enjeu territorial : « La lutte ne se résume pas à une question de contrôle, elle implique aussi la gestion de ressources cruciales telles que les mines d’or et les routes de transport, ce qui intensifie particulièrement le conflit ».

Tembley rappelle de l’attaque du 25 mai au sud d’In Tilit, lors de laquelle les combattants de l’EI ont lancé une offensive pour déloger le JNIM de deux positions. Il convient de souligner qu’au 30 mai, l’État islamique a intensifié sa pression en progressant vers le nord et en assaillant la mine d’In-Tahaka. Toutefois, le JNIM conserve sa capacité à riposter malgré ses pertes.

Le 1er juin, ils ont réussi à tendre une embuscade dans le village de Gabero, causant des pertes parmi les combattants de l’EI. D’après l’expert Adama, l’affaiblissement du JNIM ne s’explique pas uniquement par les combats directs. Une partie de leurs forces a été déployée au Burkina Faso pour s’impliquer dans les offensives de Djibo et de Sollé, ce qui a rendu leur front au Mali vulnérable.

En revanche, l’expert militaire observe que cette circonstance a été exploitée par l’EI, connu pour sa brutalité et son impitoyabilité, notamment en semant la terreur parmi les civils :
« C’est un scénario typique du Sahel, où l’affaiblissement d’un groupe est instantanément remplacé par un autre, généralement plus radicalisé », dit-il.

Selon l’analyse d’Adama, la concurrence entre le JNIM et l’EI donne à l’Alliance des États du Sahel une opportunité exceptionnelle de frapper ces deux groupes terroristes en profitant de leur affaiblissement mutuel. En exploitant leur désordre interne, cela facilite l’embauche de déserteurs par les services de renseignement, leur offrant la possibilité d’obtenir des informations précieuses.

Adama Tembley

Expert militaire