COVID-19 au Burkina Faso : Le regard du SYNTSHA

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Ceci est une déclaration du SYNTSHA sur la gestion de la pandémie de coronavirus au Burkina Faso.

La pandémie du COVID-19 qui secoue le monde entier depuis décembre 2019 est une réalité au Burkina Faso depuis le 9 mars 2020 avec un taux de létalité de 6,5% environ, assez élevé en Afrique actuellement.

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Le vendredi 20/3/2020, dernier jour de la grève de 120 h de la coalition à laquelle nous appartenons, le Bureau National, a été reçu par Madame la Ministre de la santé à sa demande, autour de l’épidémie à CORONAVIRUS. A cette occasion Madame la Ministre de la santé a sollicité l’accompagnement du SYNTSHA dans la gestion de l’épidémie. Le Bureau National, pour sa part a tenu à exprimer deux préoccupations à l’endroit du gouvernement :

  • la nécessité que des dispositions utiles soient prises pour une bonne gestion de la pandémie en particulier assurer une protection appropriée des travailleurs de la santé qui seront au cœur de la riposte ;
  • le gouvernement a été tenu informé que toute tentative de réprimer les travailleurs qui ont pris part à la grève en cours se verrait opposer une réaction de la part des travailleurs..

Depuis, le BN suit avec attention la gestion de la pandémie dans notre pays. Mais avant tout propos, il réitère ici ses condoléances aux familles et aux proches des personnes décédées de COVID-19, et souhaite un prompt rétablissement aux malades.

 Il présente ses encouragements aux agents de santé qui, au péril de leur vie, se battent pour sauver d’autres vies dans ce contexte difficile.

     La pandémie de COVID 19 a mis en exergue la faillite des systèmes de santé dans le monde capitaliste. Aux USA, en France, en Italie, en Chine, etc., les populations sont en train de payer le prix fort dans l’épidémie en cours en raison des défaillances structurelles, aggravées des hôpitaux publics. Cet échec patent des systèmes de santé découle du fait que sous le capitalisme, les secteurs sociaux (santé, éducation, etc.) sont considérés comme budgétivores et leurs coûts d’accès sont rejetés sur le dos des peuples.  Rappelons qu’en France, durant plus de six mois en 2019, plus de 200 unités d’urgence publiques étaient en grève pour exiger plus de ressources pour soigner les patients.

Le système de santé du Burkina, partie intégrante du système capitaliste présente les mêmes maux. En effet, ce système qui résulte des politiques antisociales dictées par ces grandes puissances à travers les institutions financières (Fonds Monétaire International et Banque Mondiale) dans le cadre des programmes d’ajustement structurels est dans un état de dégradation avancé. Le SYNTSHA pour sa part n’a jamais eu cesse d’interpeller le gouvernement sur sa démission à l’égard de la santé de notre peuple.

Face à la pandémie de COVID-19, le gouvernement a adopté en Conseil des Ministres un plan de riposte qu’il vient de réviser sans que les résultats de l’évaluation du 1er plan ne soient connus. En tous les cas pour l’heure, le constat amer fait par tous est que, hélas, l’épidémie persiste toujours dans notre pays.  

Et pour cause, la mise en œuvre dudit plan de riposte suscite de notre part quelques observations :

  • sur le plan politique : tout le monde s’attendait au moins à la mise à contribution des ressources (humaines, matérielles, financières, etc.) du pays pour affronter le mal. Contre toute attente, le pouvoir a opté de continuer dans sa politique de division des populations et de répression du mouvement syndical à travers des coupures et suspensions arbitraires de salaires des travailleurs, etc. Tout cela se déroule dans une atmosphère de précampagne électorale ;
  • sur le plan de la communication gouvernementale, on a assisté à des contradictions qui ont égaré plus d’un dans une cacophonie indescriptible ;
  • sur le plan sanitaire : la mise en œuvre du plan de riposte, pour des raisons que le gouvernement est seul à connaitre, a montré des insuffisantes à commencer par la surveillance des points d’entrée du pays (terrestres et aéroportuaires) ; ensuite les mesures prises pour éviter la contamination à partir du patient zéro ont été complaisantes et non techniques. Dans le même sens, l’auto-confinement est un leurre.

S’agissant de l’organisation nationale de la riposte, elle met en parallèle deux entités que sont le Comité de riposte et ses structures d’une part et d’autre part le reste du système de santé exclu de fait de l’opération. A titre illustratif, à Ouagadougou, alors qu’il n’y avait que deux cas, nous avons vu la réquisition N°2020-1116/MS/SG du 12 mars 2020 qui débauchait près de 40 agents de leurs postes au CHU yalgado, au CHU de Bogodogo, au CHU de Tengandogo et de la Direction régionale de la santé du Centre. Le seul mérite de cette décision ne pouvait être que de contribuer à désorganiser le système de santé déjà très défaillant au détriment des autres malades dont la prise en charge ne saurait s’arrêter à cause de la pandémie de COVID-19.

      Cette option du gouvernement, a entre autres pour conséquences de :

  • abandonner la majorité des agents à elle-même sans matériel de travail et donc sans protection conséquente. Ainsi, plusieurs causes de la gestion chaotique de la pandémie sont liées au fait que le Comité et ses structures ont été débordés suite à l’exclusion du système de santé classique. De plus, nous n’avons pas vu, sauf erreur de notre part, une mesure de protection spécifique des agents de la santé animale contre le CORONAVIRUS. Du reste avec les dons auxquels nous assistons au quotidien, l’on est en droit de s’interroger sur la transparence de leur gestion.

Nous sommes indignés de constater que malgré la réunion du 20/03/2020 avec Madame le Ministre, dans les formations sanitaires, les agents de santé soient pratiquement livrés au COVID-19 sans protection appropriée.  

  • accroitre les difficultés d’accès des patients aux soins. Si on n’y prend garde, cela va entrainer des retards de consultation, d’où des patients dans un état grave à l’arrivée. Elles pourraient également entrainer des sous-notifications de cas de COVID-19 car certains patients qui auraient échoué à se faire prendre en charge se verraient obligés d’aller « se débrouiller hors du système de santé » avec tous les risques (décès et propagation de la maladie).
  • justifier les inquiétudes et les questionnements sur la validité des stratégies mises en œuvre pour rompre la chaine de contamination communautaire. On note que la désinfection régulière des services d’urgence n’est pas effective.

          Au regard de ce qui précède, l’évocation du caractère inédit de l’épidémie de COVID-19 ne saurait suffire à justifier l’absence de logique dans plusieurs mesures prises par le gouvernement.  Tenez, par exemple : fermeture des marchés et yars, sans prévoir des mesures d’accompagnement appropriées ; ou encore, comment peut-on adopter un plan de riposte contre une épidémie sans prévoir ce qu’il faut faire pour préserver les agents de santé censés être en 1ère ligne de la lutte ? 

        Malheureusement, on note que le Chef de l’Etat et le gouvernement cachent mal leur hostilité et leur allergie aux critiques objectives alors que les insuffisances des mesures qu’ils prennent « seuls » sont manifestes.

 Si en théorie, à écouter le gouvernement, tout est prévu dans le plan de riposte, sur le terrain, sa mise en œuvre comme on le constate est des moins rassurantes, surtout quand le gouvernement persiste à justifier ses erreurs manifestes au lieu de les corriger. Dans ce cadre, il urge de mettre fin au « dédoublement » du système de santé et de prendre rapidement les mesures appropriées afin que chaque niveau du système puisse assumer efficacement son rôle.

Le Bureau National prend acte des félicitations adressées aux agents de santé et en sait gré à tous ceux qui ont reconnu leur dévouement à la santé de notre peuple. Le SYNTSHA n’en a jamais douté. C’est pourquoi il réaffirme une fois encore que le dévouement sans conditions de travail et de vie adéquates ne peut pas produire des résultats probants et durables.

A notre avis, la reconnaissance réelle de l’engagement des agents de santé doit se traduire par la mise en œuvre diligente des engagements pris par le gouvernement à travers les protocoles d’accord, du 13 mars 2017 avec le SYNTSHA et du 30 janvier 2018 avec tous les syndicats de la santé dans l’optique d’améliorer la qualité des soins offerts aux populations.  A cet égard, le SYNTSHA note un arrêt total, inacceptable, de la mise en œuvre desdits protocoles d’accord sous le couvert de l’épidémie de COVID-19.

Par contre les mesures répressives sont maintenues et  se poursuivent :

  • le non-remboursement des coupures abusives et illégales des salaires d’octobre et de novembre 2019 alors que le SYNTSHA a été informé depuis le 20/12/2019 que le gouvernement a reçu instruction du Chef de l’Etat de le faire ;
  • la non-adoption du projet de décret fixant modalités de gestion des logements administratifs dévolus aux communes dans le domaine de la santé en instance depuis 2019, etc.
  • le relèvement de leurs fonctions pour fait de grève d’ une vingtaine de travailleurs dans la région du Centre-Est ; des affectations arbitraires en cours au CHUR de Ouahigouya de deux agents  dont l’un, victime de tracasseries,  n’a perçu pour l’instant qu’une partie de son salaire d’avril 2020.
  • Le refus de décorer une vingtaine d’agents de santé pour faits de grève sur rapport de leur ministère de tutelle avalisé par le Chef de l’Etat, président du Conseil des Ministres alors qu’ils avaient été retenus en raison de leurs notes professionnelles (2016-2017-2018) pour être décorés à l’occasion du 11/12/2/19 et qu’ils avaient déjà payé les frais de chancellerie. Pourtant, la justesse des motifs de cette grève à laquelle ils ont participé est reconnue par tous et dans le monde entier.

C’est pourquoi, le Bureau National invite :

1°) Les populations  à renforcer d’avantage le respect des gestes barrières car la pandémie de COVID-19 est une réalité.

 2°) Le gouvernement à :

  • mettre fin à la gestion politicienne de l’épidémie de COVID-19 et adopter des stratégies claires et efficaces de rupture de la chaine de contamination communautaire ;
  • rendre disponible et accessible les dispositifs de désinfections des mains dans les lieux publics, à assurer une distribution gratuite de masques homologués aux populations ;
  • doter les agents de santé de tout le système de soin en matériel de protection adaptés :(Equipements de protection individuel , masques, visières ,blouse….)
  • acquisition de matériels médicotechniques, d’équipements et de logistique pour un meilleur dépistage et une prise en charge adéquate des patients atteints de COVID-19 ;
  • améliorer conséquemment les capacités diagnostiques et thérapeutiques des formations sanitaires sur toute l’étendue du territoire pour faire face à la COVID-19 et aux autres pathologies ;
  • instaurer un climat social apaisé au sein des travailleurs:
  • mettre un terme aux atteintes quasi permanentes des libertés démocratiques et syndicales notamment aux coupures arbitraires et abusives des salaires des travailleurs pour fait de grève et supprimer l’IUTS sur les primes et indemnités des travailleurs du public, du parapublic et du privé.
  • restituer les salaires des agents de santé injustement coupés en octobre et novembre 2019 ;
  • respecter les engagements pris dans le cadre des protocoles d’accord, du 13 mars 2017 avec le SYNTSHA et du 30 janvier 2018 avec tous les syndicats de la santé ; adoption et mise en œuvre des statuts particuliers du métier santé humaine et animale, paiement des sommes dues depuis le 1er janvier 2018 aux agents de l’AGSP dans le cadre de la FPH ; relecture immédiate de décrets d’application de la FPH dont certains contenus sont aux antipodes de ce qui a été arrêté avec les partenaires sociaux : exemple : le décret sur l’organisation du travail prévoit 40 heures hebdomadaires pour chaque agent avec 15 heures/garde non comprises (?!).

Le BN interpelle le gouvernement pour le silence observé depuis le 05 mars 2020 sur les concertations      Gouvernement-SYNTSHA autour des préoccupations des travailleurs.

Il appelle les travailleurs de la santé humaine et animale à s’armer davantage de courage dans ce contexte difficile et à rester mobilisés et déterminés pour offrir des soins de qualité aux populations, exiger la reprise des concertations sur leurs justes préoccupations et participer activement à la lutte pour la défense avec les autres travailleurs des acquis sociaux et démocratiques au côté de notre peuple.

           Mobilisés et déterminés nous vaincrons !

                                                                                                   Pour le Bureau National

                                                                                                   Pissyamba OUEDRAOGO   

                                                                                                        Secrétaire Général

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