Flambée des prix des produits alimentaires : Constat à Ouagadougou !
Covid-19, terrorisme avec son corollaire de déplacés internes, commerçants véreux… A qui la faute ? Eh oui, à qui la faute ? Quand les prix des produits de première nécessité, notamment des denrées alimentaires flambent du jour au lendemain sans que l’on ne sache véritablement pourquoi. A qui la faute ? Lorsque la ménagère, qui a troqué son panier pour un sachet encore plus petit, a toujours du mal à le remplir. Autant de questions qui nous ont conduit entre autres à Rood-Wooko (grand marché de Ouagadougou), auprès de restauratrices et de consommateurs… Lisez plutôt !
Partis pour s’acheter du sandwich en ce jeudi ensoleillé du 10 mars 2022 sur l’avenue Koulouba, à Ouagadougou, nous apprenons auprès de dame Nacoulma, restauratrice sur ladite avenue, que le prix de la bouteille de moutarde a connu une augmentation.
De là, suscite l’envie de creuser plus sur cette flambée des prix des denrées alimentaires, puisque les plaintes se font grandissantes dans notre entourage.
Aminata Nacoulma, puisqu’il s’agit d’elle à l’Etat civil, est donc la première à nous renseigner. « Haaaaa, la vie là est devenue chère, trop chère même ! On ne sait pas là où on va rentrer. Avec nos enfants, tout est cher. Manger est devenu cher ; l’école aussi, ce n’est pas facile pour le moment. Riz a augmenté, il n’y a même pas quelque chose qui n’a pas augmenté », réagit-elle d’emblée à notre curiosité.
Riz, huile, mayonnaise…, tous ont connu une hausse
Restauratrice à partir de 12h, Aminata Nacoulma vend également des sandwichs le matin. De ces deux activités menées, notre ‘’cordon bleu’’, vous nous le concédez, est un témoin vivant de la réalité quotidienne de nos marchés. C’est alors ce vécu quotidien qui lui permet de nous donner les prix actualisés de certains vivres ainsi que les prix d’il y a quelques mois ou années.
« Le sac de riz de 25 Kg, avant on achetait à 9 000, 9 500, 10 000. Maintenant, c’est devenu 11 000, 12 000 F. Le gros sac (ndlr, 50 Kg) est devenu 20 000 F. Avant, on pouvait avoir ça à 17 500, 18 000, 18 500, 18 750 F », informe-t-elle en outre.
Plus loin, elle nous fait une confidence sur la qualité même du contenu des sacs dont certains, de par leur appellation et caractéristiques, sont prisés par les consommateurs. « Des fois, on change le sac. Tu vas prendre le sac de 20 000 F, arrivé à la maison, on ne peut même pas manger (ndlr, qualité inférieure à celle de notre attente). C’est pas facile ! », dit-elle tout en secouant la tête de gauche à droite.
Même son de cloche pour le bidon d’huile. « Le bidon d’huile Aya 3 L là, on payait ça à 4 000 F, mais maintenant c’est devenu 5 000 F. Moutarde là est devenue 1 500, 1750 F. Avant on pouvait gagner à 1 250 F. Mayonnaise Bama là, avant on pouvait gagner à 2 000 F., mais maintenant on gagne çà à 2 100 F », nous apprend-elle aussi.
Viande, poisson, charbon ne sont pas exempts
La viande et le poisson, censés accompagnés le riz, l’huile et la mayonnaise ne sont pas à mettre à l’écart dans cette liste de produits alimentaires qui connaissent une flambée incompréhensible.
« La viande là, on payait ça à 2 500 F (ndlr, le kilos), mais maintenant là, on paye à 3 000 F. Le poisson chinchard, c’était à 1 000 F le kilo, mais maintenant c’est devenu 1 250 F/Kg », fait de même savoir Mme Nacoulma, qui profite nous souffler que le « charbon aussi a augmenté ». Avant, avance-t-elle pour confirmer son propos, on pouvait gagner le sac là à 5 000 F, mais maintenant c’est devenu 7000 F, 7 500 F.
Zakaria Ouédraogo, chauffeur, venu se restaurer audit restaurant, entend notre discussion et s’y invite. Invite à laquelle nous ne trouvons aucun inconvénient. « Walaiiii aujourd’hui là, moi je suis venu commander un plat de riz gras au soumbala. Je suis arrivé, la dame me dit que le plat a augmenté, que le prix des condiments a augmenté.
Voilà, voilà, en nous montrant le fond de son plat, le riz même n’est pas beaucoup ; on ne peut même pas manger et puis ça va nous rassasier. Avant le plat faisait 250 Francs CFA, maintenant c’est devenu 350 F », lâche-t-il avant de souhaiter, avec un peu plus de calme, que « le ministre (ndlr, du commerce) fasse ce qu’il peut pour que les gens puissent manger et puis bien travailler ».
De là-bas, nous arpentons les rues jusqu’à Rood-Wooko, marché principal de Ouaga où nous rencontrons Ali Nana, un boucher. Après salutations, nous nous excusons du dérangement et du fait que nous ne sommes pas venus lui acheter de la viande, mais vérifier des informations en notre possession.
Ne trouvant aucun souci à cela, il commence lui-même par nous donner les raisons de cette augmentation de prix.
« A l’heure-là, la viande là est devenue trop chère. A cause de la guerre là, on ne peut plus partir en brousse pour aller chercher la viande. Avant, nous on vendait le kilo là à 2 000 F, mais maintenant c’est devenu 3 000 F. C’est pas facile pour nous. A l’heure-là, nous on ne gagne pas. Les gens qui achètent aussi, ils pleurent. C’est pas facile ! », raconte Ali Nana.
Après un premier refus…
Qui pense ou parle de viande n’exclut pas le poisson. C’est ainsi que nous songeons à approcher une poissonnerie dans le même lieu. A quelques marches de notre boucher, nous apercevons une poissonnerie, qui regroupe beaucoup de monde, certainement des revendeuses (en détail).
Suivant le même principe d’approche avec Ali le boucher, celui qui s’est présenté à nous comme le gérant principal, nous opposera un non catégorique. Notre insistance ne portera malheureusement pas fruit.
Loin de nous décourager, nous nous mettons à la recherche d’une autre poissonnerie, avec l’espoir d’avoir des informations. Ce qui finit donc par arriver, puisque Alidou Kaboré, tenancier d’une poissonnerie, à environ 1 Km de là, accepte de nous parler.
« Actuellement, le prix-là, tout a augmenté. Moi, je vends du poisson. Avant, le poisson on achetait à 18 000, 19 000 F, mais maintenant ça vient à 20 000 F. Le carton du poisson carpe fait 26 000 F. Avant, ça faisait 24 000 F. Le carton de maquereau, actuellement c’est 19 000 F. Avant, c’était 18 000 F. Le carton de chinchard, c’est 20 000 F. Avant c’était 18 000 F », nous met-il au diapason des tarifs à Rood-Wooko.
Les légumes, n’en parlons même pas !
Toujours à Rood-Wooko, nous rencontrons Adissa Sandwidi, vendeuse de légumes. Elle nous explique qu’elle achète ses légumes, oignons et tomates, par plat afin de les revendre par tas. « Avant, tomates là c’était moins cher, mais maintenant c’est devenu cher. Le plat comme çà là, on vend à 10 000 F. Avant, c’était 5 000 F. Oignon, c’est 15 000 le sac de riz », nous confie dame Sandwidi.
Salif Ouédraogo, vendeur de pommes de terre, situé à quelques pas de notre vendeuse de légumes, subira le même exercice que ses prédécesseurs. A son niveau, il fait savoir qu’en détail, le kilo fait 500 F pendant que le sac de 25 Kg fait 12 500 F et le sac de 10 Kg, 5000 F.
« C’est cher par rapport à l’année passée. L’année passée, on pouvait avoir ça à 350, 400 F. (ndlr, le kg). Le sac de 25 Kg, on pouvait avoir ça à 7 500, 8 000 F. Les pommes de terre viennent de Ouahigouya. On paye le carton (60 Kg) à 26 000, 27 000 F », commente-t-il ensuite.
Ton prix n’est pas mon prix
Tenez-vous bien, les prix diffèrent d’une alimentation à une autre ; d’un boutiquier à un autre et dans une même chaine d’alimentation. Eh oui, c’est ce que nous apprenons sur le chemin de retour du marché et même de certains proches. En effet, une consommatrice que nous abordons sur l’avenue du Dr Kwame Nkrumah, décide de nous parler tout en requérant l’anonymat.
Elle nous confie que les prix d’un même article diffèrent dans une même chaine d’alimentation. Selon elle, le lait en poudre et en sachet d’une marque très connue, qu’elle achète pour son nourrisson, coûte 2 975 F dans une alimentation située à la jonction des quartiers patte d’Oie et Ouaga 2000.
Dans la même alimentation, dit-elle aussi avec incompréhension, située cette fois non loin de l’ambassade des Etats-Unis d’Amérique, à Ouaga 2000, le même lait est vendu à 3 100 F.
En lieu et place d’une entrevue, un document PDF
Après toutes ces informations, nous tentons d’entrer en contact avec le ministère en charge du commerce. Pour cela, nous prenons attache avec le service communication dudit ministère qui nous envoie un document portant la mention « Éléments de réponses au renchérissement des prix des produits de grande consommation ». 👇🏿👇🏿👇🏿
Eléments de réponses au renchérissement des prix des produits de grande consommation (1)
Dans ledit document, qui date de février 2022, il ressort que la pandémie de Covid-19 est le premier facteur explicatif de la flambée des prix. L’autre fait marquant qu’il souligne, c’est la pénurie de matières premières liée à une explosion de la très forte demande des grands pays producteurs, ce qui a « pour conséquence les augmentations des prix fournisseurs ainsi que la longueur des délais de livraison », conclut le document.
Il est par ailleurs rappelé que le Burkina Faso importe près de 70% de sa consommation alimentaire (statistiques de la FAO). Partant de cet état de fait, l’on estime qu’« il faut donc obligatoirement importer pour combler ce déficit ». C’est ce qui explique, poursuit-on, qu’à chaque choc exogène enregistré au niveau mondial en lien avec le coût des transports ou des matières premières, le Burkina Faso subit une flambée des prix des produits alimentaires.
Des actions structurelles et des mesures conjoncturelles sont engagées. Au titre des mesures conjoncturelles, l’une des actions fortes entreprises par le gouvernement « a été d’œuvrer à assurer la disponibilité des Produits de grande consommation (PGC) et la surveillance accrue du marché », souligne-t-on.
Par exemple, « le conflit en Ukraine est également susceptible d’avoir un impact sur la flambée des prix des céréales, aggravant une situation déjà mauvaise », prévient Grégoire Brou, directeur national d’Action Contre la Faim au Burkina Faso, dans un communiqué conjoint.
Tambi Serge Pacôme ZONGO
Burkina 24
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