Les familles des martyrs de l’insurrection soutiennent la transition
Les familles des martyrs de l’insurrection des 30 et 31 octobre 2014 donnent de la voix sur la situation nationale.
A Alassane Ouattara, Boni Yayi, Macky Sall, François Hollande, Barack Obama, Nkosazana Dlamini-Zuma, Ban Ki-moon
Au Général Gilbert Diendéré, chef du CND
Ensemble défendons la démocratie, la vie humaine, éviter un carnage au Burkina Faso et soutenir les organes de la transition.
Le sang a coulé les 30 et 31 octobre 2014 pour que vive une véritable démocratie au Burkina Faso, le sang a coulé pour que s’écrive une nouvelle page de l’histoire politique de notre pays, le sang a coulé pour un partage équitable des richesses du pays, le sang a coulé pour que la jeunesse désœuvrée, exploitée et désorientée retrouve ses repères et accède à l’emploi décent, le sang a coulé pour une justice équitable et juste, le sang a coulé pour l’alternance, le sang a coulé pour que le vrai pouvoir soit le pouvoir du service et non de l’oppression et de la cupidité, le sang a coulé pour que le pouvoir soit la gouvernance dans la vertu, l’intégrité, la transparence, le respect de la personne humaine, un service d’édification d’une architecture institutionnelle forte, un porte flambeau de pérennisation des valeurs légendaires d’intégrité, de probité, d’hospitalité, de courage, de respect mutuel, d’acceptation mutuelle et de tolérance, d’obéissance à la mère patrie. Le sang a coulé pour que la liberté de penser, de dire et d’agir soit plus forte au Burkina.
Le sang a coulé pour que les fils et les filles de la nation qui ont pour mission d’assurer la sécurité et la défense du peuple et du pays soient un, indivisibles, une force unie au service de la nation.
Le sang a coulé pour signifier à tous que la vérité triomphe toujours du mensonge quel que soit le temps et l’adversité, que le bien triomphe toujours du mal, que l’amour de la patrie et de son prochain est plus fort que l’égoïsme personnel et la méchanceté. Le sang est en train de couler encore parce que l’intérêt national, la vie humaine qui est sacrée ne sont pas les valeurs de certains de nos frères et sœurs dont le Général en Chef se devait de dispenser dans sa chapelle qu’est le RSP.
A Alassane Ouattara Président de la République de Code d’Ivoire, A Yayi Boni médiateur, Macky Sall président en exercice de la CEDEAO, François Hollande Président de la république française, Barack Obama Président des USA, Nkosazana Dlamini-Zuma présidente de la Commission de l’U.A, Ban Ki-moon Secrétaire général des Nations unies, comment peut ont comprendre que des jeunes gens qui avaient soif de démocratie, de liberté et de progrès en viennent à être tués les 30 et 31 Octobre 2014 du fait de l’entreprise d’un groupe de modifier la constitution consensuelle du Burkina Faso à des fins personnelles en vue de détenir le pouvoir et en faire du territoire burkinabè, du peuple burkinabè, des richesses du pays un bien privé ?
Contre une telle forfaiture, ils ont été assassinés et ils sont désormais des martyrs de la nation burkinabè. Les familles de ces jeunes dont le sang a coulé continuent de souffrir car la peine est immense. Les orphelins peinent à trouver pain, leur éducation familiale et scolaire mise en péril, les veuves sont dans la tourmente, les veufs ont le regard méconnaissable, les pères et les mères sont meurtris dans la chaire et dans l’âme, les frères et sœurs sont aux abois, la famille est chagrinée, le peuple a encore en mémoire ses valeureux filles et fils dont le sang a coulé pour défendre la patrie.
Des jeunes gens la plupart, au nombre de 28, qui avaient aussi le droit d’être électeurs et d’être éligibles et prétendre devenir Présidents de la République, députés, maires, qui avaient le potentiel de devenir des ministres, des opérateurs économiques, des bâtisseurs de la croissance mondiale, de la morale et de l’orde mondial ont été exclus à jamais parce qu’ils ont été tués, assassinés en défendant des valeurs démocratiques.
Ils n’existent plus sur terre pour y prétendre. C’est la pire forme d’exclusion qui puisse être appliquée à un être humain sur terre en aliénant son droit à la vie. Le patron du CND Gilbert Diendéré a raison de tenir le prétexte que des gens ont été écartés du jeu électoral pour justifier son putch parce que parmi celles et ceux qui sont morts il n’a ni fils, ni sœur, ni père, ni frère, ni père ni mère.
Ces 28 personnes qui ont été tuées sont des exclus définitifs mon Général avec tout le respect que je vous dois et il n’y’a pas pire forme d’exclusion que la mort. La justice n’est pas un règlement de compte, elle n’est pas la vengeance c’est une forme d’éducation sociale pour permettre à celui qui a été incriminé de réintégrer les vertus de la société en marchant selon ses principes et ses lois. Prenant l’histoire politique du Burkina Faso, tous les régimes passés, de Feu Maurice Yaméogo à Jean Baptiste Ouédraogo ont rendu compte de leur gestion devant les tribunaux.
Mon Général, le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), fondé le 27 février 1988 en remplacement du Parti socialiste dirigé par le président Zine el-Abidine Ben Ali au pouvoir de 1988 à 2011 a été purement et simplement dissout le 9 mars 2011 à la suite de la révolution tunisienne. Que s’est-il passé en Egypte après la révolution égyptienne ? En Côte d’Ivoire, c’est bien les partisans de Laurent Gbagbo qui sont dans les maisons d’arrêt et de correction après le renversement du président Gbagbo. Celui qui n’a pas respecté la loi doit répondre devant la justice. Ce ne sont pas les voleurs de poulets, de soumbala, les chenapans qui doivent aller croupir en prison. Quelle que soit ton rang, ton appartenance, nul n’est au-dessus de la loi.
Intimider des journalistes, violenter des journalistes, incendier des installations médiatiques est la pire des manières de museler la presse et c’est que le CND a fait.
L’armée s’appelle autrement la grande muette et en stratégie militaire, ces types de questions doivent se régler dans la concertation, le calme, la discipline, la franchise, le respect des règles, de l’éthique et de la déontologie et non à coups de fusils et de tams-tams médiatiques. En agissant de la sorte, d’une manière ou d’une autre, cela projette aux yeux du monde entier qui perçoit l’armée burkinabè comme un exemple, une image négative dont le revers est de fournir à des ennemis du pays et autres terroristes les renseignements sur les failles au sein des forces de défense et de sécurité qu’ils peuvent exploiter pour déstabiliser le pays.
Mon Général, le président Compaoré a travaillé pour le Burkina et il y’a des acquis à préserver. Le président Compaoré nous a laissé un héritage à savoir la stabilité du Burkina Faso. Mais il faut reconnaitre que pendant les 27 ans du régime Compaoré, le Burkina Faso a vécu dans une démocratie de façade où les richesses du pays étaient concentrées dans les mains d’une minorité bourgeoise 10% de la population laissant la jeunesse dans le désarroi, le chômage, la grande population dans la pauvreté et le dénuement. Pendant l’insurrection des 30 et 31 octobre 2014, mon séjour à l’hôpital Yalgado Ouédraogo m’a permis de faire ce triste constat : des malades qui étaient couchés par terre à même le sol, à la pharmacie de l’hôpital il faut patienter 1H en file indienne pour être servi en médicaments tant l’affluence était forte, et un médecin de me confier : « 50% de nos malades au Burkina meurent faute de plateau technique ».
Dans les amphithéâtres à l’université de Ouaga II dans les facultés d’économie et de droit, les étudiants bombent en nombre 6000 à 10 000 étudiants dans une salle d’étude et on attend des produits finis, des jeunes bien formés. C’est une insulte. Que dire de la gestion de la SONABEL, de la SONABHY et de bien d’autres sociétés ?
Avec seulement 50 milliards de Francs CFA que l’Etat pouvait prélever dans les recettes minières, le Burkina Faso pouvait bien se tailler un hôpital de référence. Que dire de la constitution originelle de 1991 qui a été votée par le peuple burkinabè et qui stipulait que le président du Faso est élu pour un mandat de 7 ans renouvelable une fois ?
Mais après ce consensus populaire sacré obtenu du vote du peuple, la constitution a été maintes fois modifiée pour conserver le pouvoir en étouffant toute initiative d’alternance au sommet de l’Etat. Que dire des détournements des deniers publics que les rapports au niveau de la cour des comptes, de l’autorité supérieure du Contrôle d’Etat ont établis ? Que dire de l’assassinat du journaliste Norbert Zongo et de ses trois compagnons calcinés sur la route de Sapouy en 1998 ? Que dire de l’assassinat du juge constitutionnel Salifou Nébié en 2014?
Tous ces faits se sont produits devant vous lorsque vous étiez le Chef d’Etat-major particulier du président Compaoré. Pourquoi devant tant d’infortunes, vous êtes restés aphones laissant les choses aller ainsi jusqu’à entreprendre la modification de l’article 37 de la constitution burkinabè en 2014 pour conserver pour le pouvoir sans que vous n’ayez dit mot. Il est vrai d’admettre qu’on ne peut pas gouverner sans failles et dans cette logique, le gouvernement de la transition a des insuffisances qu’on peut lui reprocher mais ça ne vaut pas le coup de faire un coup d’Etat contre ce qui a été la volonté du peuple insurgé. Mon Général, si vous aviez en son temps descendu Compaoré en lui faisant un coup d’Etat et aujourd’hui vous renversez la transition pour établir un certain ordre au détriment de ce vous avez qualifié de situation déviationniste, je vous aurai applaudi.
Mais là, en agissant de la sorte, votre démarche de militaire qui veut prôner la démocratie, cela s’appelle simplement de l’injustice contre le peuple burkinabè, une véritable arnaque, une insulte à l’intelligence, à la dignité, à l’intégrité du peuple burkinabè. Et c’est là qu’il est difficile d’admettre votre coup. C’est pourquoi nous condamnons avec la plus grande fermeté votre coup d’Etat et votre Conseil National de la Mort qui est une véritable aliénation de la démocratie.
Chers présidents cités ci-dessus, Madame la Présidente de la Commission de l’Union africaine, Monsieur le Secrétaire Général de l’ONU, les familles des martyrs au Burkina Faso lors de la cérémonie d’hommage le 30 mai 2015 organisée par le gouvernement de la transition et le peuple burkinabè avait pris l’engagement de pardonner à quiconque qui aurait été responsable de la mort de leurs proches à des degrés divers mais à deux conditions : la vérité et la justice. Nous sommes des Burkinabè et on est obligé de se pardonner car nous sommes d’une même famille.
Au regard du développement de la situation politique, les familles ont fait un rappel il y’a trois semaines par un message diffusé par voie médiatique pour appeler tous les acteurs à œuvrer pour privilégier l’intérêt supérieur de la nation pour éviter la violence et engendrer d’autres familles endeuillées comme nous qui vivons encore dans la souffrance du fait de l’assassinat de nos proches lors de l’insurrection populaire. Nous sommes au regret de constater que ce message n’a pas été suivi. Voilà encore des morts, des blessés partout dont on pouvait faire l’économie et ces gens qui viennent fraichement de verser leur sang pour que vive les idéaux de la transition, de la démocratie perdent de fait tout droit d’être électeurs et d’être éligibles parce qu’ils ont été tués, exclus à jamais.
Tous les ténors candidats aux élections législatives et à la présidentielle du 11 octobre 2015 au Burkina Faso, Gilbert Ouédraogo, Eddie Komboïgo, Djibril Bassolé, Yakouba Ouédraogo ont dans un esprit de fair-play communiqué publiquement qu’ils prenaient acte des décisions du Conseil constitutionnel ce qui est vraiment un esprit républicain à saluer. A partir de cet instant, toute personne droit et juste doit applaudir et reconnaitre leur comportement et leur attitude pacifique en dépassant les passions et les règlements de compte.
Le pouvoir et sa passion ne dépassent pas une vie humaine, l’argent et les plaisirs sont éphémères. Le vrai pouvoir, c’est le pouvoir du service pour le bien-être du peuple. Un Etat se compose d’un peuple, d’un territoire et d’un exécutif. Si tout le peuple meurt il n’y’a plus d’Etat qui tienne et c’est ce qu’il faut éviter.
Le Général Diendéré est une personne tempérée, un fervent chrétien catholique et nous en appelons à son amour pour son prochain, son amour pour sa patrie car ce qui doit nous gouverner et nous commander en ce monde ici-bas pour les biens du ciel, c’est l’entreprise par le bien et pour le bien en mettant Dieu au-dessus de tout et l’homme comme matière cardinale sacrée à préserver.
Nous familles des martyrs de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2015 présentons nos condoléances aux familles qui viennent d’être éplorées comme nous du fait de la soif du pouvoir et par expérience, nous les invitons à prendre toutes les dispositions avec les médecins légistes du Burkina Faso pour que les images, les autopsies soient faites dans les règles de l’art pour servir de témoignage à l’histoire.
Nous familles des martyrs de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 invitons le CND à faire preuve d’intégrité pour sauver le pays d’un chaos.
Nous familles des martyrs de l’insurrection populaire réitérons notre soutien indéfectible au Président de la transition Michel Kafando, au Conseil National de la transition, au gouvernement de la transition.
Nous familles des martyrs de l’insurrection populaire, appelons la communauté internationale à soutenir le peuple burkinabè pour défendre les valeurs démocratiques et la vie humaine. Ce sera une insulte de grande excellence à toute la communauté internationale si la démocratie venait à être assassinée au Burkina Faso.
Nous familles des martyrs de l’insurrection populaire appelons au respect strict des lois et des institutions du Burkina Faso, à la tenue d’élections qui doivent viser l’alternance.
Nous familles des martyrs de l’insurrection populaire appelons l’armée régulière en restant fidèle à garder sa loyauté vis-à-vis de sa mère patrie en prenant position pour peuple telle qu’elle l’a prise le 30 et 31 octobre 2014.
Vie le Peuple en résistance !
Vivent les organes de la transition !
Paix et amour pour tous !
Que Dieu bénisse le Burkina Faso et toutes les nations en difficultés.
Fait à Ouagadougou le 18 septembre 2015
Le Porte-parole de l’Union des Familles des martyrs de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014
Babou Nébon Bamouni
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