Valéry Silga du SAMAB sur l’affaire 23 kg d’or : «L’essentiel c’est que la décision a été exécutée»

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Le lundi 8 juillet 2013 s’est tenue la session ordinaire du conseil supérieur de la magistrature qui s’est penché sur le mouvement de magistrats, mais aussi sur des questions diverses d’intérêt pour le corps. Le lendemain, Burkina 24 a rencontré Valéry Silga, conseiller à la Cour d’Appel et Secrétaire exécutif adjoint du Syndicat autonome des magistrats du Burkina (SAMAB). Dans cette interview, il revient sur les différents points abordés à cette session, la relecture de certains textes fondamentaux en cours, et se prononce  au nom de son syndicat sur l’Indépendance de la justice, l’exécution des décisions de justice, ou encore la question de l’unité syndicale.  L’affaire des 23 kg d’or n’a également pas été occultée. 

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Le Secrétaire Général adjoint du SAMAB, Valéry Silga. Ph. B24
Le Secrétaire Général adjoint du SAMAB, Valéry Silga. Ph. B24

 

Burkina 24 (B24) : Vous venez de prendre part à la session ordinaire du conseil supérieur de la magistrature. Outre les questions de mouvements de magistrats dont a parlé déjà la presse, quels autres points ont été évoqués ?

Valéry Silga (VS) : Entre autre points des divers, on est revenu aussi sur la relecture de la grille indemnitaire. On entend ici et là que l’État est en train de reformer la grille indemnitaire des agents publics, et les magistrats aussi seraient concernés. Ils perdraient donc leur catégorie actuelle au profit de la catégorie A ou d’une autre catégorie à créer.

A ce niveau, nous avons manifesté notre inquiétude parce qu’il ne faut pas qu’à travers cette réforme on veuille porter atteinte à la spécificité du corps de la magistrature. Les gens croient que nous sommes des fonctionnaires ordinaires alors que non. En disant cela, ce n’est pas de l’orgueil ou du chauvinisme, mais  juste qu’il faut bien  souligner la spécificité du magistrat qui tient son pouvoir de la Constitution.

Nous sommes un pouvoir à l’image de l’exécutif, à l’image du législatif tout en servant l’État. Il ne faut donc pas que les gens veuillent nous ramener à la fonction publique ordinaire. Il faut que dans notre statut et dans les textes qui accompagnent le statut, cela soit clairement dit et qu’on ne nous confonde pas. Il y a va de l’indépendance même de la justice.

B24 : Justement à propos de la relecture de la grille indemnitaire et de votre traitement, est-ce qu’on peut dire qu’actuellement les magistrats burkinabè travaillent dans de bonnes conditions ?

VS : Il faut reconnaitre que l’État a fait des efforts pour que les magistrats travaillent dans de meilleures conditions. Mais il faut dire aussi que c’est en deçà de ce que les magistrats demandent comme minimum. Vous voyez déjà dans mon bureau, je ne dispose pas d’ordinateur, il n’y a pas de connexion internet et certaines commodités véritablement manquent.

B24 : Il est également question actuellement de la relecture de certains textes fondamentaux relatifs au corps. Dites-nous un peu quelles réformes sont en vue à travers cette relecture ?

VS : Il y a effectivement des textes fondamentaux qui sont en relecture: la loi portant statut de la magistrature et la loi portant organisation et fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature.

Il s’agit à travers cette relecture, d’affirmer véritablement l’indépendance de la Justice et surtout faire comprendre que l’indépendance n’est pas un privilège pour le magistrat, mais plutôt pour le justiciable. La justice est rendue au nom du peuple et le magistrat ne doit pas se comporter en dehors de la loi. Et la loi est là pour protéger aussi bien le justiciable, que le magistrat.

 Il y a aussi la question de la dépolitisation qui est revenue et il y a des dispositions qui ont été proposées pour mieux encadrer cet aspect. Il y a également la question du fonctionnement du conseil de discipline qui est en train d’être revue. Jusque-là, c’était le ministre de la justice qui pouvait saisir ce conseil.

Mais on est en train d’ouvrir pour permettre à tout citoyen, qui à l’occasion d’un litige le concernant, qui aurait connaissance de faits commis par le magistrat, de saisir le conseil de discipline. Ce sont là quelques innovations qui sont dans le projet de loi pour ce qui est du statut de la magistrature.

« Les magistrats n’ont comme seule source de revenus que leur salaire »

Pour ce qui est du CSM, il s’agit d’opérationnaliser le secrétariat permanent avec une personnel plus étoffé pour mieux organiser la gestion de la carrière des magistrats, organiser la concurrence au niveau des postes de nomination. Jusque-là tout ce travail est fait au niveau du ministère et il y a de nombreuses insuffisances.

Au niveau de la grille indemnitaire, les magistrats n’ont comme seule source de revenus que leur salaire. Toute autre activité nous est interdite, sauf bien-sûr les activités agricoles qui sont difficiles à mener, la production littéraire, aussi difficile à mener. Dans ce cadre et étant donné que nous vivons dans les mêmes problèmes de vie chère, on nous demande de tenir un rang de vie très élevé, que les moyens de nous permettent pas toujours de tenir.

A la faveur de la relecture, nous allons proposer un certain nombre d’indemnités et d’avantages pour les magistrats, tout en espérant que, aussi bien l’Assemblée nationale que le pouvoir exécutif, seront favorables à ces différentes propositions.

B24 : A propos du CSM, beaucoup estime que tel que conçu, il est lui-même un frein à l’indépendance de la justice. Quel est votre avis et est-ce que la réforme tient à ce souci également ?

VS : Il faut rappeler que la configuration actuelle est faite de telle sorte qu’il y a les membres de droit, les membres élus et les représentants des organisations syndicales. Les membres de droit ont plus ou moins des liens avec le pouvoir exécutif. Comme membre de droit, nous avons le Président du Faso qui est le président du Conseil, le ministre de la Justice qui est le premier vice-président et qui appartient aussi à l’exécutif.

Cela pose un problème dans une théorie de séparation des pouvoirs. Comme autres membres de droit, nous avons les premiers présidents des hautes cours, les procureurs généraux près les cours d’appel de Ouaga et de Bobo et nous avons enfin le procureur général près la cour de Cassation.

Et au nivau des membres élus, nous avons  deux (02) représentants par grade. Dans la magistrature nous avons quatre (04) grades. Ça fait huit (08) membres, auxquels s’ajoutent les représentants des trois organisations syndicales, pour faire onze (11).

Au CSM, « il est nécessaire d’augmenter le nombre de membres élus »

Au niveau des membres de droit, il y a dix (10), plus une personnalité invités par le chef de l’État, ça fait (11); et au niveau des membres élus et des organisations syndicales, ça fait onze (11). Pour des questions assez fondamentales, il se pourrait que lors des délibérations il n’y ait pas d’unanimité et qu’on passe au vote.

 La réforme tend à ce que les membres élus, qui représentent leurs pairs et ayant voix délibérative soient plus nombreux, parce qu’ils sont plus indiqués pour examiner les questions liées à leur profession. Il est vrai aussi que d’autres configurations sont possibles. Il y a des pays où les membres de l’exécutif ne sont pas dans le conseil supérieur de la magistrature.

À ce stade de l’évolution de notre système démocratique, on peut toujours admettre la présence de certains membres de l’exécutif, tel que le Chef de l’État, qui est une oreille très attentive aux préoccupations des magistrats. Mais dans le même temps, il est nécessaire d’augmenter le nombre de membres élus.

B24 : Tout récemment, on a vu les trois syndicats de la magistrature demander la démission du ministre garde des sceaux suite à une affaire dans laquelle une décision de justice souffrait pour son exécution. Est-ce que tout est rentré dans l’ordre avec le dénouement de l’affaire ou bien en voulez-vous toujours à votre ministre ?

VS : En tant que premier syndicat en Afrique francophone, le premier dans le syndicalisme judiciaire, très tôt le SAMAB a fait de l’indépendance de la magistrature son combat. Et dans ce sens, l’exécution des décisions de justice est une manifestation concrète de l’indépendance de la magistrature.

Le SAMAB n’a pas hésité à s’associer aux autres syndicats, lorsqu’il nous est revenu qu’une décision de justice peinait à trouver exécution. En la matière, il faut dire que l’exécution des décisions de justice incombe en dernier ressort à l’exécutif, à travers la puissance publique. A travers cette activité de mouvement que nous avons menée, c’était pour attirer l’attention des gens sur la nécessité de respecter les décisions de justice.

« Nous ne voulons pas entraîner l’État dans un blocage »

Parlant de la démission du ministre de la justice, nous, nous avons un sens très élevé de l’État. Nous ne voulons pas engager donc un mouvement inutile.

Le point focal pour nous était d’obtenir l’exécution de la décision de justice, et du même coup affirmer la nécessité d’observer une séparation stricte des pouvoirs, la nécessité d’accepter l’indépendance de la justice. Pour les autres points de la lettre (), ils ne ressortent plus de notre compétence et nous ne voulons pas nous immiscer dans les affaires de l’exécutif, ou entraîner l’État dans un blocage.

Ce n’est pas ça l’essentiel. L’essentiel c’est que la décision a été exécutée. Le ministre de la justice nous a reçus, nous avons échangé et nous nous sommes compris.

B24 : Est-ce que le fait que les trois syndicats se soient associés pour cette action est le signe d’une unité syndicale prochaine ?

VS : Le SAMAB, comme je le rappelais, a été le premier syndicat de magistrats en Afrique francophone et en Afrique tout simplement, pionnier dans le syndicalisme judiciaire.

Dès le premier moment, comme il n’y avait pas d’autres syndicats, il a engagé pas mal de luttes pour le corps. Malheureusement, avec l’histoire, il y a eu pas mal de dissensions mal gérées, tant et si bien qu’actuellement nous avons trois syndicats de magistrats, un pluralisme syndical qui a ses avantages mais certainement aussi ses inconvénients.

Depuis le congrès précédent, le SAMAB a inscrit l’unité syndicale comme un objectif primordial et il est toujours d’actualité. Les jours à venir, si les autres syndicats sont disposés, le SAMAB est prêt à engager des discussions pour aboutir à l’unité.

B24 : Toujours à propos de l’unité syndicale qui vous tient tant à cœur; vous avez évoqué des dissensions qui ont, par le passé, été à la base des scissions. Mais à l’heure actuelle, qu’est-ce qui continue de diviser les trois syndicats ?

VS : En réalité, il n’y a pas de divergence au niveau du but. Chaque syndicat vous dira qu’il se bat pour la défense des intérêts moraux et matériels des magistrats, pour l’indépendance de la justice. Je pense que la difficulté de réaliser l’union est plus liée à une question de personnes.

Au cours de l’histoire du syndicalisme judiciaire, il y a eu la scission qui a donné naissance au Syndicat des Magistrats Burkinabè (SMB), parce qu’à l’origine c’était le SAMAB. Quand on veut essayer de comprendre, c’est lié à la période révolutionnaire que notre pays a connue, où les CDR se sont invités à l’animation des juridictions, avec des magistrats CDR.

Il y avait donc des divergences idéologiques et cela a nui à l’unité originelle du syndicalisme judiciaire au Burkina Faso.  Il y a eu beaucoup de séquelles et certains de nos anciens, les magistrats âgés, portent toujours  ces séquelles et les rancunes qui vont avec. Cela ne favorise pas le retour à un cadre unique.

Le frein à l’unité syndicale immédiate ? « Ce sont des questions de personnes »

Après cette scission, la jeune génération avait cru ne pas devoir adhérer à l’un ou à l’autre, en attendant justement cette réunification. Mais cela tardait à venir tant et si bien que le troisième syndicat a vu le jour dans les années 2001.

Mais depuis un certain temps, on observe une certaine accalmie par rapport aux divergences idéologiques ou aux valeurs syndicales à défendre, aux méthodes de lutte, etc. C’est pour vous dire que dans le fond, il n’y a véritablement pas de problème. Maintenant, pourquoi on n’y va pas ici et maintenant, ce sont des questions de personnes.

Propos recueillis par Justin YARGA

Pour Burkina 24

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Justin Yarga

Journaliste web qui teste des outils de Webjournalisme et datajournalisme, Media strategy consultant.

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4 commentaires

  1. le ministre doit etre l,imoge pr 1 vrai democratie.se son eux qui pourisse le pays.c,es 1 voleur et il doit etre condamne avec ses complice dans le cas echeant le president doit demissione pr manq d responsabilite de gere 1 vrai democratie

  2. le ministre doit etre l,imoge pr 1 vrai democratie.se son eux qui pourisse le pays.c,es 1 voleur et il doit etre condamne avec ses complice

  3. belle intervention:qie le blaiso chasse son ministre , c est tout car les magistrats ne font pas de remaniement ministeriel

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