Burkina Faso : la réconciliation, pourquoi ? et Comment ?

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Les crises socio-politiques qui ont jalonné l’histoire du Burkina Faso, ont au fil du temps, contribué à détériorer son tissu social. L’actualité politique, sociale et sécuritaire montre clairement que le Burkina Faso a mal à son vivre-ensemble. L’unité nationale et le sentiment d’appartenance au même pays, très souvent évoqués par les premiers dirigeants dans leurs discours, apparaissent plutôt comme un vœu pieux. La violence qui est devenue le mode d’expression privilégié de toutes les divergences et une forme systématique de contestation au sein de notre société est en pleine croissance.

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De fait, le vivre-ensemble est de nos jours mis en péril, dans notre pays, par des fléaux socio-politiques divers. Les Burkinabè s’entretuent de plus en plus depuis quelques années, et il est inconcevable d’envisager notre nation victorieuse et prospère sans une union des filles et fils du pays. Cette situation désastreuse et de tous les dangers nous interpelle en tant que Burkinabè et exige de nous une prise de conscience pour éviter le chaos à notre chère patrie. Il faut poser le diagnostic et préconiser un remède efficace. A notre sens, la réconciliation apparait comme étant la première étape dans notre quête de rétablissement de l’intégrité de notre territoire et du retour de la cohésion sociale. Pourquoi une réconciliation entre les Burkinabè ? Comment cette réconciliation doit-elle s’opérer si nous voulons retrouver la paix, la sécurité et la stabilité dans notre pays ?

L’histoire politique du Burkina Faso est jalonnée de remous sociaux, entrecoupés de coups d’Etat et de manifestations socio-politiques, qui ont engendré des pertes en vies humaines, des blessés et des destructions de biens. Les crimes emblématiques de sang tels que les affaires Thomas SANKARA, Boukary DABO et Norbert ZONGO, n’ont toujours pas connu de justice. En 2001, le gouvernement de Blaise COMPAORE, sur l’impulsion du Collège de sages, avait organisé une journée de pardon qui n’avait malheureusement pas été consensuelle parce que n’ayant pas tenu compte du tripe-tyque vérité-justice-réconciliation. Le pardon n’avait donc pas véritablement eu lieu.

Au regard des échecs enregistrés par cette tentative de réconciliation, il est légitime d’affirmer qu’une réconciliation nationale s’impose. Loin d’être une réconciliation de plus, cette réconciliation doit être une réconciliation sincère fondée sur la vérité et la justice. Elle aura la responsabilité de ramener l’unité nationale tout en suscitant à nouveau le sentiment d’appartenance à un même pays. Sans cette réconciliation il nous sera difficile de vaincre le terrorisme qui menace constamment la stabilité de notre pays, et de poursuivre dans la sérénité nos efforts de développement.

La construction de la réconciliation nationale doit se faire sous le tripe-tyque vérité-justice-réconciliation. Pour cela, il conviendra de rassembler toutes les forces-vives de la nation pour réfléchir sur la trajectoire à baliser pour le retour de la paix et la réconciliation. L’intérêt supérieur de la nation doit nous rassembler en dépit de nos divergences idéologiques et politiques.

La réconciliation doit surtout rétablir la vérité sans complaisance. Elle doit éviter « la vérité des vainqueurs ». Les Burkinabè doivent savoir qu’il y a des concitoyens qui ont souffert dans leur chair et dans leur esprit du fait des agissements des régimes politiques passés et actuels. Cette vérité pourra non seulement apaiser les cœurs des victimes et de leurs familles, mais fera en sorte qu’elles soient mieux disposées à accorder leur pardon aux auteurs de crimes, tout en permettant à la justice de faire efficacement son travail.

L’urgence de la question sécuritaire nous oblige à nous unir pour y faire face. Cette unité est conditionnée par une réconciliation vraie et sincère dénuée de tout calcul politique. La réconciliation ne doit pas être perçue comme un moyen de promouvoir l’impunité des auteurs de crimes, mais elle doit servir de socle à notre unité nationale. Nous devons donc transcender nos ressentiments, nos frustrations et nos haines pour nous réconcilier, non pas pour garantir notre bien-être immédiato, mais pour léguer un Burkina Faso pacifique et prospère à nos enfants.

 

Ouagadougou, le 30 septembre 2020

 

Zéphirin Diabré, Chef de file de l’Opposition politique

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