Emile LALSAGA répond au RSP : « Plus rien ne sera comme avant »
Le poète Emile Lalsaga répond au Régiment de sécurité présidentielle (RSP), mais cette fois en prose.
Nous avons lu avec beaucoup d’intérêt la déclaration, sous forme de « plaidoyer » du service de Communication du Régiment de Sécurité présidentielle (RSP). Pour une première fois, la « Grande muette » ouvre la bouche non pas pour parler mais pour se lancer dans un véritable exercice de Communication qui donne matière à réflexion. Nous avouons que ce cours d’histoire militaire nous enseigne et nous renseigne beaucoup sur ce corps d’élites accusé à tort ou à raison comme un Corps lié à un individu, surtout à « l’ancien Président, Blaise COMPAORE », pour commettre des « basses besognes ».
N’étant pas un journaliste d’investigation à la trempe de Norbert ZONGO, ni un spécialiste de la politique encore moins un fin limier des questions militaires, nous nous jetons donc sur un terrain inconnu, avec pour seule raison notre passion du débat contradictoire et constructif, gage d’une prise de conscience par tous. A la lecture de votre déclaration, nous n’avons pas pu résister à l’appel de notre plume et, nous venons donc par la présente, donner notre point de vue sur cette unité (RSP) tantôt exaltée tantôt incriminée ; si tant il est vrai que chaque citoyen est libre de donner son analyse sur les questions d’intérêt national selon les règles établies par la République.
Nous bâtirons donc notre réflexion en nous appuyant sur le fond de votre déclaration pour mener une analyse critique et porter quelques suggestions qui pourront être enrichies pour le bonheur de tous les Burkinabè. Nous proposerons donc dans les lignes qui suivent, une réaction à la hauteur de ce que nous avons compris après lecture de ladite déclaration. D’ores et déjà, nous mettons en garde les esprits mesquins prompts à insulter ou dénigrer sans pour autant rien proposer, que nous ne tenons pas les rênes de la vérité, mais nous restons plutôt mus par la recherche de la vérité, d’où notre participation au débat que le service de Communication du RSP vient de lancer.
1°) De la défense du RSP
La première impression qui se dégage après lecture de la déclaration est nettement claire : le RSP se sent accusé à tort ou à raison et se donne les moyens de se défendre. Dans cette tentative, certains apporteront de l’eau au moulin du RSP, mais il est indéniable que la majorité de la partie civile usera de contre-points dans ce que nous pouvons appeler « le procès du RSP ». L’essentiel ici n’est pas de blâmer à tout prix les deux camps, mais que chacun puisse se défendre (si défense il y a) selon les lois de la République, le droit et la justice, gages d’un véritable renouveau pour le pays des hommes intègres.
La deuxième impression est que le RSP se lance dans une « sorte d’opération de charme » sans pourtant opérer une autocritique sur ses différentes dérives mentionnées dans plusieurs rapports de crimes. En témoigne la longue liste de missions assurées avec brio avec ou sans les autres Forces de Défense et de Sécurité. Si le RSP est obligé de se défendre c’est que son « dossier n’est ni vide ni blanc » et pour notre part nous pensons que l’élégance de l’auto-défense ne doit pas être exempte d’une autocritique.
La troisième impression qui se dégage est que le RSP est très utile pour le Burkina et par conséquent, il ne doit pas être dissout.
Au regard de ces trois éléments cités plus haut il semble que la sortie du service de Communication du RSP a cloué le bec de plusieurs Burkinabè « peureux » de prendre place dans le débat militaire ou tout simplement naïfs des notions de la politique militaire. Mais une analyse très approfondie permet à plus d’un citoyen de s’armer d’arguments convaincants dans ce débat sur la « Grande muette ».
2°) ANALYSE CRITIQUE
Selon la déclaration, « le 1er Bataillon du C.N.E.C., Centre National d’Entraînement Commando de PÔ est l’ancêtre du R.S.P. Et cela date d’avant l’arrivée de Blaise Compaoré au pouvoir. En effet, lorsque les capitaines s’emparent du pouvoir après les C.S.P. 1 &2, le C.N.E.C. est la structure de Corps de Troupe qui assure la Sécurité du Président Thomas SANKARA. Avec un système rotatif de personnels qui servent à la fois dans divers détachements sur le territoire, au Centre d’Entraînement de PÔ, au Conseil de l’entente et au Palais de Koulouba. La donne ne change pas fondamentalement lorsqu’arrive le Président Compaoré au pouvoir en 1987. Seul changement, le gros du C.N.E.C., à Ouagadougou, est rebaptisé « Régiment de Sécurité Présidentielle » (Décret n° 95-482/PRES/DEF du 21 novembre 1995 portant création d’un Corps Spécial dénommé ‘’Régiment de Sécurité Présidentielle’’ au sein des Forces Armées) ».
En rebaptisant donc le gros du CNEC à Ouagadougou en RSP qui renvoie d’ailleurs par son appellation à la sécurité pure et simple du président ou du moins, révèle que la sécurité du président est au centre du régiment, on venait peut être, sans le savoir de renforcer les attributs du RSP s’il est vrai que le changement de forme peut aussi entrainer un changement de fond.
Dans une République normale et démocratique, nous pensons que la Gendarmerie et la Police se suffisent à elles seules pour assurer la sécurité du président si ce dernier est élu démocratiquement au sens premier du terme et mène une politique en faveur de son peuple.
En plus, est-ce que les autorités de l’époque, ne nourrissaient pas des ambitions inavouées en créant ce corps spécial ?
On connait tout le rôle joué et la place occupée par le RSP lors des mutineries de 2011. Aujourd’hui, personne ne doute de la puissance de frappe du RSP, car ses éléments (fantassins, commandos, parachutistes) sont mieux équipés et mieux formés.
Nous pensons même que la dénomination de ce corps pose problème aux Burkinabè, car elle semble renvoyer à la personne du président entouré par toute une armada.
Au cours de son existence et selon la déclaration, « le R.S.P. connait une évolution successive dans son organigramme et ses missions. Un second décret vient ainsi le mettre sous l’autorité du Chef d’état-major de l’Armée de Terre, l’officier qui le commande prenant rang de Commandant de Région Militaire (Décret n°2000-326/PRES/PM/DEF du 20 juillet 2000 portant rectificatif du décret N° 95-482/PRES/DEF du 21 novembre 1995). Ainsi donc, le Régiment, son Chef sont désormais sous les ordres directs de l’Armée de Terre (et non plus seulement du Chef d’Etat-major particulier comme à sa création) ».
A la lecture de ce passage, le texte est beau mais la réalité semble tout autre. Sous nos yeux et pas très loin, nous avons vu pendant l’insurrection populaire comment les officiers supérieurs du RSP ont foulé aux pieds les prérogatives du commandement militaire citées dans le décret ci-dessus mettant à rudes épreuves les officiers supérieurs de l’Armée de Terre.
Si nous tenons compte aussi de certains articles de presse, contrairement à ce que l’on pourrait croire, ceux-ci ont joué un rôle déterminant lors de l’insurrection populaire car en matière militaire quand on n’a pas assez d’hommes et une réelle puissance de frappe, on ne peut pas agir d’où cette cacophonie de trois auto-proclamations militaires (le Gal TRAORE, le Gal LOUGUE et le Lieutenant-colonel ZIDA) pour assurer la présidence du Faso au soir de l’insurrection populaire. Mais cela ne nous surprend guère car le régime déchu a travaillé à promouvoir la culture de la supériorité et de la différence au détriment des principes clés de la complémentarité et du respect mutuel tant au niveau des Forces de Défense et de Sécurité qu’au niveau des civils. Rappelons-nous ces fameuses phrases ! « Si tu fais on te fait et il n’y a rien. », « Nous sommes au pouvoir et nous allons encore réviser la Constitution pour que Blaise COMPAORE soit encore président. »
A travers ces expressions militaro-civiles, nous voyons donc une minorité qui veut museler et écraser à tout prix la majorité du peuple burkinabè d’où le désamour de ce dernier à l’égard du RSP et son combat remporté contre le régime COMPAORE les 30 et 31 octobre 2014. Pour terminer, nous pensons que si le respect des lois et de la hiérarchie étaient la chose la mieux partagée au RSP, cela nous épargnera les mouvements d’humeur cités dans votre déclaration suite à la nomination des officiers supérieurs dans certains postes de commandement militaire.
En outre, vous mentionnez que l’une des missions spécifiques du RSP est de « défendre les institutions républicaines : il reste indéniable que les risques d’instabilité liés à des changements violents de régime (coups d’états), hors le cadre normal de la Constitution, a longtemps été une source successive d’incertitudes au pays. Le Burkina a connu au bas mot une quinzaine de coups ou tentatives de coups d’états.
La stabilité sur ce plan a été, c’est indéniable, intimement liée à la qualité de la Force qui défend les institutions depuis plus de deux décennies.»
Cher RSP, vous avez analysé la question de la stabilité politique sous l’angle purement militaire pourtant le Burkina Faso depuis plus de deux décennies n’est plus sous régime militaire mais démocratique. Aux bas mots, le RSP dit à l’opinion nationale qu’elle est garante de la stabilité politique du pays et grâce à la qualité de sa Force qui défend les institutions depuis plus de deux décennies, le Burkina Faso ne connait pas de coups d’Etat.
En termes civils, nous rétorquons que le respect strict de la Constitution comportant toutes les valeurs républicaines, la manifestation véritable de la démocratie et une gouvernance politique tournée vers les aspirations réelles du peuple suffisent à garantir la stabilité politique d’un pays et de permettre une alternance sans insurrection populaire, ni effusion de sang et éviter éventuellement les coups d’Etat ou les tentatives de coups d’Etat dont vous faites cas.
En dehors du président Maurice YAMEOGO, notre pays a été dirigé par des militaires et nous comprenons donc pourquoi notre démocratie est une démocratie de façade car pris en otage par des militaires qui ont troqué le treillis contre la veste.
Si nous étions dans un véritable Etat de droit, aucun citoyen ne sera menacé, aucune institution ne se verra en danger et du coup votre force sera réorientée et plus axée sur la défense de tout le territoire et sur les menaces extérieures. Enfin, il est bon de signaler que dans un Etat de droit, les gouvernés vivent en harmonie avec les gouvernants et cela permet de minimiser et/ou d’éviter des menaces intérieures.
A la suite de ce qui a été dit, nous entrevoyons que le RSP semble se perdre dans son auto-défense oubliant de faire son véritable mea culpa.
Pour les crimes odieux et crapuleux de David OUEDRAOGO(chauffeur de François COMPAORE accusé pour vol de numéraires) et du journaliste d’investigation Norbert ZONGO (directeur de publication de l’hebdomadaire L’Indépendant), le RSP semble reculer et jette l’anathème sur « deux sous-officiers et quelques militaires du rang peu lettrés, et obéissant en cachette probablement à des ordres d’un civil, à l’insu de la hiérarchie, pour de l’argent », pourtant son nom est fortement cité dans le rapport de la Commission d’Enquête Indépendante(confère http://www.lefaso.net/spip.php?article62462 ) instituée après l’autodafé de Sapouy le 13 décembre 1998.
Le tristement célèbre Conseil de l’Entente (voici le nom d’une institution qui est en contradiction avec les faits qui se passent à l’intérieur. Quand on t’y emmène, ce n’est jamais pour trouver un terrain d’entente mais plutôt pour te liquider ou te torturer : cas de DABO Boukary, David OUEDRAOGO et Mousbila SANKARA, pour ne citer que ceux là). Si aujourd’hui le RSP semble repousser le fait que le peuple lui qualifie d’exécuteur de « basses besognes » c’est qu’il a contribué lui-même à semer la psychose au sein des populations tant il est redoutable.
Si aujourd’hui, « plus rien ne sera comme avant », hier seulement c’était la loi de « si tu fais on te fait et il n’y a rien. » Il a fallu les grandes manifestations du peuple liées à l’assassinat de Norbert ZONGO pour que le RSP baisse la pression. Dans ce cas donc le RSP ne peut se prévaloir comme régulateur de la stabilité du pays, mais plutôt de trouble-fête quand on sait que plusieurs éléments en son sein ont été incriminés dans plusieurs rapports portant sur des tortures et des crimes les plus ignobles.
Plus près de nous, pendant l’insurrection populaire, des manifestants sont tombés sous les balles assassines de ce même régiment cité dans le rapport d’Amnesty International sur l’insurrection populaire (confère http://www.lefaso.net/spip.php?article62788). Qui a ordonné de tirer ? Qui a tiré ? Pourquoi ils ont tiré ? Un régiment qui agit en fonction des valeurs de la République a-t-il le droit d’ouvrir le feu sur des manifestants aux mains nues ? Toutes ces questions en suspend doivent trouver des réponses adéquates.
Mais, jusque-là, le gouvernement de la Transition, à travers son ministère de la Justice n’a ouvert aucune information judiciaire sur les drames des 30 et 31 octobre 2014 et aucun élément du RSP n’est inquiété.
C’est facile de vouloir faire son mea culpa pour entamer la marche vers la réconciliation nationale mais il est indéniable qu’avant d’arriver à la réconciliation il faudra inéluctablement passer par la manifestation de la vérité et de la justice pour permettre aux familles meurtries de faire leur deuil et d’accepter le pardon par un dépassement de soi et dans l’humilité pour un meilleur vivre ensemble au pays des hommes intègres.
Par ailleurs, le RSP justifie le fait que « le mouvement d’humeur du 30 décembre semble sonner comme un élan de solidarité d’hommes et de femmes (et oui, il y a beaucoup de personnels féminins commandos), qui souhaitent être utiles en tant que structure forte, républicaine, et sans la stigmatisation de garde prétorienne au service d’un individu. » et omet de citer celui du 04 février 2015. Nous disons qu’il y a péril en la demeure si on n’y prend pas garde. C’est la première fois que nous assistons sous nos cieux à l’interruption et à l’annulation d’un conseil des ministres pour fait de revendication d’une corporation. Au nom de la rigueur et de la discipline reconnues chez les militaires, la façon dont ce mouvement d’humeur s’est faite n’a pas droit de citer . S’adresser directement et en privée à leur ministre de tutelle nous paraissait plus raisonnable. Nous savons tous que c’est suite à ces deux « dérapages » du RPS que certaines OSC et formations politiques se sont retrouvées le samedi 07 février 2015 à la Place de la Révolution et dans certaines villes pour dire NON au RSP (confère http://www.lefaso.net/spip.php?article63145).
3°) DE L’AVENIR DU RSP
En dépit de tout ce qui précède, nous ne nions pas les actions salvatrices du RSP contenues dans sa déclaration mais il ne faut pas perdre de vue qu’il a été une « machine à broyer » sous le régime de Blaise COMPAORE. Redéfinir donc son rôle et revoir la nouvelle place qu’il occupera désormais au sein des forces armées nationales nous paraissent capital. A ce sujet, nous proposons :
*Reformer l’Armée burkinabè avec en ligne de mire la dissolution du RSP pour créer une armée plus homogène et éviter les méfiances, les défiances et les disparités en son sein.
*Redéployer les éléments du RSP dissout dans les missions régaliennes de la défense du territoire au détriment de la garde présidentielle.
*Ne plus confier la garde présidentielle à une unité du même genre que le RSP mais plutôt tenir compte de la recommandation 2_2_8 du rapport du Collège des Sages qui demande « d’organiser la protection républicaine du chef de l’Etat par la Gendarmerie et la Police ».
*Former politiquement les éléments de l’Armée burkinabè car, comme affirmait Thomas SANKARA, « un militaire sans formation politique est un criminel en puissance ».
*Avoir une Armée républicaine désintéressée du pouvoir politique.
Au terme de notre analyse, il ressort que la question du RSP est complexe. Le régime déchu a travaillé à asseoir son pouvoir sur ce corps d’élites qui défiait tout le monde. Cependant, le nouveau vent qui souffle sur le Burkina Faso depuis l’avènement de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 ne permet plus l’existence de cette unité comme au temps de Blaise COMPAORE.
S’il est vrai que « le RSP sera donc ce que les politiques voudront qu’il soit, en toute lucidité, en toute sérénité » ; s’il est vrai que les politiques sont les défenseurs de la Démocratie, du Droit, de la Justice et de la République ; dissoudre le RSP, redéfinir ses éléments et ses missions n’entraveront pas la bonne marche de notre pays dans le renouveau démocratique. Alors chers politiques, à vos marques !
Ouagadougou, le 12 février 2015
Emile LALSAGA
Professeur certifié de Français
Poète de l’Amour et de la Douleur
Citoyen engagé
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le mensonge cour 100 ans et en 2 jours de course la verit? le rattrape mais je pense que tout va changer pour de bon militaires et civils vont tous contribu?s a la bonne marche de notre chers patrie
Emile merci pour ta r?ponse a ce bla, bla du RSP : disons un chat un chat, et ne tournons pas autour du pot : Ta proposition pour l?avenir du RSP tient la route, et le souhait du peuple depuis ce 30 et 31 Octobre 2014. Reformer toute l?arm?e, dissoudre le RSP, sanctionner ses anciens responsables qui sont tremp?s dans les crimes odieux et qui accusent leurs camarades sans grades. Reclasser les jeunes du RSP dont je ne doute pas de leur valeur et leur franchise pour une arm?e neutre et r?publicaine. L?actuel RSP nous pompe, il est temps que ceux qui sont allergiques a l?alternance politique et ?conomique du nouveau Burkina rejoignent Blais Compaor? a YAMOUSSOUKRO comme celui qui l?a accompagn? pendant sa fuite jusqu?au MAROC. Que le pr?sident Kafando prenne ses responsabilit?s et dissoudre ce r?giment de dynamite pour la transition par les jeunes.