Tribune – « Transition Burkinabè: De l’insurrection au marché de hyènes »

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Dans cette tribune, Dimitri Ouattara donne sa lecture de la transition, en faisant une genèse.

Alors que nous sommes à moins de quatre (04) mois des élections qui devraient clore la période transitoire qui a suivi l’insurrection, de plus en plus d’intrigues viennent s’ajouter à l’exacerbation des problèmes sociaux et la panne de la justice sociale. En effet, si pour les nouveaux dirigeants il y a changement, le commun des Burkinabè continue d’attendre des solutions aux problèmes d’énergie, de santé, d’éducation et de justice, doublés en cette période par des intrigues de tout genre. Retour sur une transition qui n’a pas fini de surprendre comme un marché de hyènes …

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1.Petit rappel

La charte de transition a suscité beaucoup d’espoirs. Nous avions là l’occasion de repartir sur de bonnes bases: fini l’inféodation de l’administration à un parti, fini les passe-droits, … Nous avions là l’occasion de nous occuper des aspirations réelles: santé, éducation justice, partage des fruits de la croissance, … Les espoirs étaient grands mais c’était sans compter sur les intentions inavouées des uns et des autres.

Tout de suite, les aspirations des populations ont été troquées contre des jeux d’alliances. Celui-ci ici car, malgré qu’il soit de l’ancien système, il a permis d’éviter un carnage; pas celui-là là car étant de l’ancien système.

En fonction des intérêts des uns et des autres et du laxisme de la plupart, nous avons porté à la tête des instances de la transition certaines personnes peu recommandables. Cela n’est pas en soi un problème si chacun reconnaît ses lacunes et travaille à les combler. Par contre, il est impossible d’y remédier quand toute critique est vue comme une attaque contre la transition.

Les syndicalistes sont les premiers à avoir été taxés de vouloir saborder la transition par leurs revendications (grève à la BRAKINA, grève des routiers). La transition ne pouvait pas résoudre les problèmes de 27 ans en une année rétorquait on? Il fallait patienter et accompagner la transition. Les problèmes avaient beau être criards, il fallait accompagner la transition.

Pendant ce temps, la transition s’illustrait par des actions populistes comme la baisse du prix de l’essence, la réouverture et le rétropédalage sur l’affaire Thomas SANKARA, … toutes choses qui sont fondamentalement des aspirations des populations n’eût été qu’elles soient vidées de leurs sens.

Elle a cependant travaillé sérieusement sur certaines questions essentielles comme le nouveau code électoral et il est bien de soutenir la démarche de la transition. Mais, peut être à cause de l’approche des futures élections, des intrigues ont commencé à se nouer qui aujourd’hui menacent le reste de cette période transitoire.

2.Des intrigues

2.1.Des intrigues ourdies par l’ancien régime

Les dignitaires de l’ancien régime ont d’abord avancé la thèse du coup d’Etat préparé par certains de leurs anciens camarades et masqué en insurrection. Les allégations faisaient état du lien entre certains chefs militaires et des politiciens; ces derniers les auraient convaincus de destituer le président Blaise COMPAORE. Cela ne résiste pas à l’analyse non pas qu’il n’y ait pas eu de possibles tractations mais à cause de la finalité; un coup d’Etat qui chasse un dictateur et qui n’est pas revendiqué est une insurrection.

Puis la thèse des règlements de compte a été véhiculée à chaque fois qu’un dignitaire de l’ancien régime faisait l’objet d’une arrestation. Tout en déplorant les arrestations arbitraires, doit on se plaindre que des personnes citées depuis longtemps dans des affaires de crimes économiques répondent de leurs actes? Non, cela s’appelle de la justice.

Finalement, des dignitaires de l’ancien régime surfent sur la loi électorale pour parler d’exclusion et agiter le drapeau d’une crise comme en Côte d’Ivoire à l’exclusion d’Alassane OUATTARA. Cela est ubuesque tant la comparaison ne résiste pas à l’analyse; on ne nie pas l’appartenance à la nation des personnes incriminées, on dit qu’ils se sont rendus coupables de faits qui les rendent inéligibles. Et ces faits sont assez frais dans la conscience nationale.

Les dignitaires de l’ancien régime gagneraient à être discrets, le temps qu’on solde les contentieux des 27 ans de règne de Blaise Compaoré, si tant est qu’ils ont compris l’esprit de l’insurrection et fait leur mea-culpa.

2.2.Des intrigues ourdies par des partis politiques

On ne le répétera pas assez; si nous sommes empêtrés actuellement dans la transition c’est parce que les partis politiques de l’ancienne opposition ne se sont pas assumés après l’insurrection. Ayant entériné la prise de pouvoir par ZIDA, la première intrigue fût d’assimiler ceux qui sont descendus dans la rue le 02 novembre 2014 pour exiger que la transition soit gérée par des civils en personnes inféodées à l’ancien régime. Personne n’a alors bronché lorsque des élément du RSP ont fait une descente sur la RTB occasionnant mort d’homme.

Le reste des intrigues est à mettre au compte des batailles de caniveaux pour des visées électoralistes. Tel parti soupçonnant tel autre de faire des fraudes lors des inscriptions sur des listes électorales, tel autre révélant que l’arroseur est aussi arrosé … L’unité d’avant insurrection a volé en éclat et c’est ce qui est dommage et dommageable pour la suite.

2.3.Des intrigues ourdies par des OSCs

La caporalisation de certaines OSCs est à la base de la plupart de ces intrigues. On n’a toujours pas compris le “deux poids, deux mesures” qui a érigé certains dignitaires de l’ancien régime en héros et d’autres en pestiférés. Cela a donné lieu, aux premières heures de la transition, à des jeux de chaises musicales: démission de tel ministre ou de tel directeur car étant de l’ancien régime pendant qu’on adoubait d’autres dignitaires de l’ancien régime au coeur même de la transition.

Malheureusement, l’on a instauré un climat où toute critique de tels agissements équivaut à être taxé de “sabordeur” de la transition. Si ce n’est donc par sursaut et de leur propre chef, il serait difficile de ramener ces OSCs à reconsidérer leurs positions. Et en fonction des intérêts on assisterait à des prises de position les unes aussi inconséquentes que les autres.

Tout le monde se rappelle les actions des OSCs sécrétées par le CDP; gageons que les uns et les autres nous éviteraient de retomber dans les mêmes travers.

2.4.Des intrigues ourdies par les dirigeants de la transition

Du populisme, des agendas cachés? Ce sont là les raisons des intrigues ourdies par certains dirigeants de la transition. Toutes ces intrigues ont un seul but: lever l’inéligibilité de certains ou prolonger la transition (pour lever l’inéligibilité ou continuer de jouir du pouvoir).

À l’approche de la fin de la transition, de plus en plus d’intrigues sont ourdies pour la prolonger. Soit en créant un problème dont la résolution dépasserait les échéances fixées, soit en suscitant un accord des différentes parties prenant part à la transition.

Le plus récent est le conflit “RSP-ZIDA”. Arrivé à la tête de la transition grâce au RSP, ZIDA et une certaine opinion voudraient nous faire avaler qu’il soit aujourd’hui menacé par le même RSP. Pire il se trouve des OSCs pour réclamer ici et maintenant la dissolution du RSP pour cette raison (menace sur ZIDA) alors que ces mêmes OSCs ont refusé de participer aux manifestations du 02 novembre 2014.

Qu’est-ce qui a changé entre temps? Le RSP n’a certainement pas changé; il reste le corps le plus tristement célèbre de l’armée et certains de ses éléments devront rendre compte tôt ou tard de plusieurs implications dans des crimes de sang et des conflits. Peut on pour autant dire que ZIDA et les OSCs qui gravitent autour de lui n’ont pas changé? De quoi serait capable le RSP contre ZIDA?

Ce sont autant de questions dont les réponses montrent à souhait qui sème le flou dans cette histoire ou qui instrumentalise une question légitime (dissolution du RSP) pour des fins inavouées.

En tout cas, toutes ces agitations n’ont pas raison d’être. Il faut que la transition se concentre sur ses objectifs et mette de côté les intérêts égoïstes et partisans. Il faut remettre les aspirations des populations au coeur de la transition.

Pourquoi y a-t-il eu insurrection? Pour le respect de l’article 37, pour la justice et la fin de l’impunité, pour une meilleure répartition des fruits de la croissance, … Il faut donc sacraliser les clauses limitatives de mandat, travailler à asseoir une justice indépendante et efficace, travailler à solder les crimes de sang et économiques, … C’est ce qui a sous-tendu les travaux sur la charte de la transition qui a abouti à la détermination de ses commissions.

Qu’on exhorte ces commissions à faire un travail conséquent et qu’on travaille désormais sur un mémorandum qui ferait la synthèse des recommandations des commissions et engagerait le futur gouvernement.

Les partis politiques pourraient continuer l’initiative du CFOP de déterminer les grandes priorités sur les questions de développement et faire un pacte pour leur mise en oeuvre quel que soit le gagnant au soir du 11 octobre.

Il convient aussi de rappeler que si Blaise COMPAORE a été chassé du pouvoir, aucun autre potentat ne réussira à mettre sous son joug le Burkina. Quels que soient les intrigues et les moyens pour essayer un passage en force, les populations pourront rééditer le 30 octobre.

Vive le Burkina Faso

Ensemble pour un pays (réellement) des Hommes intègres

Ouattara Dimitri


NDLR : Le titre est de l’auteur

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