Reboucher les nids-de-poule à Ouaga : Le combat de Kamanga Mathias Zida

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De gardien d’imprimerie, il devient imprimeur puis propriétaire d’une imprimerie complète. En plus d’être résilient, puisque défiguré à cause d’un nid-de-poule, il est altruiste ; au point de vouloir s’endetter pour permettre une certaine praticabilité notamment de la voie située sur l’Avenue Ouezzin Coulibaly, entre le terrain du Mogho Naaba et les feux tricolores du quartier Saint-Léon à Ouagadougou. C’est lui qui est à l’origine de la pancarte appelant au secours EBOMAF dans ce quartier. Pour l’heure, avec la vente de quelques biens à lui, il réussit à faire démarrer les travaux de réhabilitation. Kamanga Mathias Zida, puisque c’est de lui qu’il s’agit, nous parle de son initiative et des projets qui lui tiennent à cœur… 

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S’il vous plait, qui est le responsable ici ? « Vous voyez le monsieur en train de parler aux jeunes là-bas, c’est lui », nous rétorque un commerçant dont la boutique est située sur l’Avenue Ouezzin Coulibaly, entre le terrain du Mogho Naaba et les feux tricolores du quartier Saint-Léon, à Ouagadougou.

Accès à l’Avenue en venant du quartier Saint Léon vers le feu du Mogho Naaba.

Un, deux, trois, puis plusieurs pas sur environ 500 mètres, nous y sommes. Nous avons en face un jeune homme, la trentaine bien sonnée, vêtu d’une paire de baskets, d’une culotte, d’un t-shirt auquel est associé un gilet jaune.

La tête recouverte par une casquette noire, pour se protéger d’un soleil ardent et des gants noirs, afin de manier à souhait et sans trop de risque le ciment et autres matériaux, il est en compagnie de jeunes à qui il donne des instructions lorsque nous l’approchons pour en savoir davantage sur l’initiative de boucher les nids-de-poule sur l’avenue.

Il, c’est Kamanga Mathias Zida, responsable de l’initiative « en attendant que… », qui nous emmène à l’ombre du soleil, devant une boutique, à quelques pas de là où nous le retrouvons.

« Vers 1h du matin, une femme enceinte, à moto, est tombée dans l’un des nids-de-poule et elle tenait une ordonnance. Étant juste derrière elle, j’ai accouru pour lui porter assistance. Elle était beaucoup blessée. Son ordonnance était irrécupérable, parce que mouillée par l’eau stagnée. Ça m’a tellement marqué que j’abandonnai mon projet d’acheter du pain sur Koulouba (ndlr, un autre quartier de Ouagadougou)

Je fis donc demi-tour au service et une fois au bureau, je me suis demandé qui peut nous aider pour cette voie. Automatiquement le nom qui m’est venu en tête, c’est celui du PDG du groupe EBOMAF. 

J’ai donc, la même nuit, confectionné la pancarte qu’on a fixée le lendemain », relate Mathias Zida, assis à même la terrasse de la boutique, mains jointes, remuant la tête comme pour faire disparaitre instantanément le souvenir de sa tête, et pour expliquer l’affichage de la pancarte appelant au secours le Président directeur général (PDG du groupe EBOMAF)

« C’est la rentrée des classes »

Kamanga Mathias Zida
Kamanga Mathias Zida

Si l’appel à l’aide au PDG du groupe EBOMAF n’a pas eu un écho favorable jusque-là, pour Mathias, c’est la rentrée des classes, et il faut agir vite. « C’est la rentrée, les élèves empruntent beaucoup cette voie », dit-il avec une certaine urgence. Ainsi, poursuit-il toujours dans sa même position assise, « on a décidé de mettre du béton avec ce qu’on a pour éviter qu’un élève ne tombe dans un des trous », indique-t-il.

Pour cela, des appareils vieillissants, notamment un véhicule sont mis aux enchères afin de collecter des fonds pour démarrer les travaux de réhabilitation de l’avenue. « Quand on a commencé hier (ndlr, samedi 8 octobre 2022), ce n’était pas facile. Il y a un trou qui a pris plus d’une tonne et demi de ciment.

Des jeunes s’attelant à boucher des nids-de-poule sur l’avenue.

Si un trou n’a rien pris, c’est quatre sacs de ciment. Donc, avant qu’on arrive au milieu de l’avenue, nous n’avions plus rien. Pourtant, on doit profiter de ce long weekend pour que le béton soit sec avant le mardi (ndlr, reprise des cours et du travail). J’ai dû vendre mon non-loti à 700 000 F CFA. On vient même de me transférer l’argent comme ça. 

On a utilisé cet argent pour acheter du ciment pour continuer. On espère qu’avec ça, on pourra arriver jusqu’au feu du Mogho Naaba. Il faut qu’on termine ça, c’est un défi pour nous. J’aurais aimé faire mieux que ça ; mettre du vrai goudron », raconte le responsable de l’initiative « En attendant que… » à propos des mains et pieds faits pour disposer d’argent.

  Engagé, déterminé, résilient et altruiste

Vaille que vaille, il faut boucher les trous de cette voie. Eh oui ! Déterminé, Mathias l’est, jusqu’à s’endetter. « Si quelqu’un dans le BTP a les moyens de nous faire cette voie à crédit sur une période déterminée, je suis disposé. Mon entreprise (ndlr, Concept Vision Print) est disposée à faire quelque chose pour mon quartier », se veut-il rassurant vis-à-vis des potentiels créanciers.

Un tel altruisme de sa part tient de la gratitude. « Kamsonghin m’a tout donné. J’y suis arrivé en tant que gardien d’imprimerie en attendant d’avoir un concours, une autre porte de sortie. Pendant plus de 7 ans, j’assurais le gardiennage la nuit et j’apprenais le métier d’imprimeur la journée.

J’ai finalement démissionné du gardiennage pour m’installer à mon propre compte en tant qu’imprimeur dans le salon de mon père à Nagrin (ndlr, un autre quartier de la ville de Ouagadougou). Aujourd’hui, j’ai une imprimerie complète. Ça marche bien, mes clients sont satisfaits. Je pense que mon entreprise peut financer cette voie », explique Mathias.

Il s’explique aussi par le fait que Mathias, en plus d’être un témoin oculaire d’un accident dû aux nids-de-poule, en est un rescapé. « Le drame que j’ai vu ici (ndlr, avec la dame enceinte), je ne voudrais plus que ça arrive à une autre personne. Moi-même, j’ai été victime d’un nid-de-poule vers Saponé (ndlr, à quelques kilomètres de la ville de Ouagadougou).

On revenait d’un PPS (ndlr, mariage traditionnel) et nous sommes rentrés dans un nid-de-poule. Je me suis réveillé à l’hôpital Yalgado (ndlr, Centre hospitalier universitaire Yalgado Ouédraogo ‘’CHU-YO’’) avec une tête défigurée, un nez coupé ; j’ai perdu toutes mes dents. J’ai dormi sur mon dos plus de trois à quatre mois malgré des plaies sur mon dos.

Ce qui m’est arrivé, je ne voudrais pas que ça arrive à quelqu’un d’autre, même pas à mon ennemi. Voilà pourquoi les nids-de-poule de Ouaga, ce serait mon combat tant que j’aurais la force et les moyens », confie notre bienfaiteur.

« En attendant que… » est une initiative, des dires de Mathias, qui est créée pour apporter sa contribution à l’édifice national. « Ça veut tout simplement signifier que je peux faire quoi en tant que citoyen en attendant que l’État fasse quelque chose ? », explique-t-il la dénomination de leur initiative. En attendant l’intervention de l’État, citoyens burkinabè, bonnes volontés, sont tous sollicités !

Tambi Serge Pacôme ZONGO

Burkina 24

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Serge Pacome ZONGO

Tambi Serge Pacome ZONGO, journaliste s'intéressant aux questions politiques et de développement durable.

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