Canal de l’Université de Ouagadougou : Hôtel cinq étoiles des déchets plastiques

Des déchets plastiques stationnent en une masse magmatique dans le canal qui traverse l’Université de Ouagadougou, aux pieds du pont qui embranche l’Avenue du Capitaine Thomas Sankara à la Nationale 4, face au parc Bangr-Weogo. Ce stationnement dérange la vue, l’odorat et est une menace pour la santé des Ouagalais. Reportage.
Il est 10h, ce lundi 25 juin 2012, lorsque le pneu de notre moto freine au bord du canal de l’Université de Ouagadougou. Des oiseaux gazouillent dans le couvert d’arbres tout autour. Ils ne doivent sans doute pas sentir l’odeur qui nous fait porter notre main aux narines. On en ferait autant avec les yeux, mais vous n’auriez sans doute pas eu l’occasion de lire ce reportage. Par la place laissée par le pan du mur de l’Université arraché par le déluge du 1er septembre 2009, les yeux peuvent voir l’un des ponts qui traversent le campus. L’œil de notre appareil photo s’y intéresse.
Le « monument » de déchets plastiques
De ce pont naît une procession. Elle commence par une traînée d’eau noirâtre et verdâtre. Elle va en s’enflant de boue, de cailloux et petits sachets plastiques pour aller former un goulot d’étranglement contre les piliers du pont de l’Avenue du Capitaine Thomas Sankara. Là, un amoncellement pestilentiel de bidons plastiques, de cartons, de jacinthe d’eau, de boue et de détritus de tous genres jette des bouffées d’air malodorant à tous les usagers qui traversent le pont.

Sur la berge opposée, une femme jette dans le canal un bidon relié à une corde et le ramène avec un peu d’eau stagnante qu’elle transvase dans un arrosoir. Arrosoir qui va ensuite déverser son contenu sur de petites planches où poussent des plants d’oseille et d’autres plantes aux feuilles comestibles. Des feuilles qui se retrouveront sans doute dans quelques jours dans le plat de certains Ouagalais. Mais cette femme n’a-t-elle pas peur des maladies ? Nous n’avons pas le temps d’entendre sa réponse. Elle avait fini sa besogne et était partie le temps que nous avons pris pour faire le tour du canal.

N’empêche, des étudiants sur cette berge révisent leurs leçons. Bruno Ouangré en est un. Il est étudiant en Sciences de la vie et de la Terre (SVT) à l’Université de Ouagadougou. Mieux placé donc pour savoir que cet amoncellement et ce mélange de plastiques et d’eau nauséabonde est un nid de moustiques. Et il tire vite sa conclusion : « On ne peut pas lutter contre le paludisme tant qu’il y a des déchets de ce genre en plein milieu de la capitale ». Bruno pense que c’est une menace pour la santé de la population, un danger pour l’environnement et un empêcheur de bosser en rond pour les étudiants !
Marc Bangou, étudiant en Science économique et de gestion, lui, se préoccupe du design : « ça ne donne pas une bonne image de la ville ». Assurément, on se demande quel touriste pousserait des exclamations de joie et d’admiration devant ce « monument » planté en plein cœur de la ville.
Accusés : l’eau, les autorités, la population
Mais d’où viennent ces déchets ? A priori, on pourrait penser que ce sont les eaux qui les ont trimbalés depuis l’amont du canal et ils ont été « stockés » là par les piliers du pont. En effet, de l’autre côté de la passerelle, l’autre moitié du canal qui s’enfonce dans le parc Bangr-Weogo contient une eau, certes toujours aussi sale, mais dépourvue de tout déchet plastique, comme si elle avait été filtrée. Bruno Ouangré croit néanmoins que certains Ouagalais s’amusent à prendre ce « tamis » pour un dépotoir. « Tout de suite, j’ai vu quelqu’un venir jeter des ordures là-dedans », dit-il.
Bruno et Marc de demander aux autorités d’agir. L’étudiant en SVT se souvient que l’année dernière, au début du mois de juin, cette partie du canal avait été curée. « On est en fin juin et on se demande pourquoi ils ne sont toujours pas venus ! », s’interroge Bruno. Une question que se posent, sans doute, tous ceux qui sont passés par le pont qui marque la fin de l’Avenue qui se nomme Capitaine Thomas Sankara. Quelle coïncidence, d’ailleurs !
Tr?s bel article avec des photos ?difiantes. Chapeau et vivement que les autorit?s fassent quelque chose…
cool. Tr?s bon reportage sur un sujet aussi important