Sommanogo Koutou : « 72 900 tonnes de viande ont été produites et contrôlées cette année »
Au Burkina Faso, l’élevage et l’agriculture emploient plus de 80% de la population active et génèrent 80% des recettes d’exportation. Ils contribuent pour 40% à la formation du PIB. L’élevage est la 3e source de recettes d’exportation après l’or et le coton et contribue pour plus de 18% à la formation du PIB. Malgré cet énorme potentiel, les performances du secteur restent encore modestes. Le ministre des ressources animales et halieutiques, Sommanogo Koutou, a accordé un entretien à Burkina24 le 18 décembre 2017 sur les obstacles qui entravent son épanouissement.
Burkina 24 (B24) : Monsieur le ministre, pouvez-vous rappeler les grands programmes de votre ministère ?
Sommanogo Koutou (SK) : Il faut dire que nous gérons un des ministères les plus importants pour notre pays puisqu’il s’agit des ressources animales et halieutiques. Un ministère qui s’occupe de tout ce qui entoure l’élevage, la pêche et l’aquaculture comme la production des poissons, crevettes, etc. C’est un ministère qui occupe plus de 86% de la population active, pour la plupart des femmes, et procure plus de 39% des revenus monétaires dans les ménages ruraux.
C’est également un ministère qui gère les activités les plus importantes puisque nous avons 18% du PIB et le 3e secteur exportateur de produit après l’or et le coton. Un département qui regorge d’activités assez structurantes, qui effectivement peuvent nous permettre de pousser le développement de notre pays.
En termes d’activités, nous avons de grands programmes que nous conduisons. Il y a un programme qui consiste à sécuriser, à gérer durablement les ressources naturelles et pastorales afin d’éviter des conflits entre producteurs et agriculteurs. Nous avons également, un autre qui vise à augmenter la production afin de la rendre compétitive sur le marché national et international. Nous œuvrons à trouver les meilleures politiques afin d’avoir des animaux performants qui puissent nous donner plus de lait et de viande.
Nous avons aussi un programme de la santé animale à travers les campagnes de vaccination, de contrôle des produits néfastes à la consommation. Enfin, nous avons un programme qui consiste à développer les ressources halieutiques comme la pêche.
B24 : L’aménagement des pistes pour bétail vise à résoudre le conflit agriculteurs-éleveurs. Est-ce que les différents acteurs respectent ces pistes ?
SK : Justement, c’est le non respect des textes qui réglementent ces zones qui fait souvent qu’il y a des problèmes entre les acteurs. Les pistes rurales comme les zones de pâture ou pastorales sont délimitées de concertation avec la population, les communes et les ministères.
Lorsque qu’une zone est dédiée pour telle activité, le ministère accompagne par sécurisation. Malheureusement, avec les textes qui entourent, il y a des moments où des pistes sont grignotées par des cultures et cela rétrécie l’espace. Les textes ne sont souvent pas respectés. C’est pour cela que nous avons une grande politique de sensibilisation des acteurs. Malheureusement, ce sont des conflits qui peuvent même conduire à la perte en vies humaines. Cette année, nous avons enregistré 33 cas sur plus d’une centaine l’année passée.
B24 : Quel a été l’impact des mouvements du SYNTSHA (volet santé animale) sur les activités du ministère ?
SK : Le SYNTSHA est une organisation assez responsable. Pour le moment, il contribue beaucoup. Nous les associons à tout ce que nous entreprenons concernant le personnel. Pour le moment, ça va. Mais je sais qu’il y a des problèmes qui demeurent mais qui ne sont pas insolubles. Nous travaillons beaucoup avec ces acteurs sociaux et tout se passe très bien pour le moment.
Puisque nous sommes dans un gouvernement, ce qui se passe dans les autres ministères nous interpelle et nous bloque souvent. Cette année, nous avons eu beaucoup de problèmes dans le lancement de nos marchés.
B24 : Dans le cadre du PNDES, il est prévu d’exporter 2000 tonnes de viandes par an. Ce chiffre est-il atteint ?
SK : Le chiffre est plus que atteint. C’est le privé qui exporte la viande. Nous n’avons pas au niveau étatique la matière pour pouvoir contrôler les sorties. Nous sommes en train de voir avec l’inter profession bétail-viande pour trouver des outils de contrôle.
Une chose est de produire la viande et une autre est qu’elle soit de qualité pour être exportée. Nous avons déjà élaboré les normes que nous avons distribuées à tous les producteurs dans le cadre du conditionnement, de la découpe, etc. C’est près de 72 900 tonnes de viande qui ont été produites et contrôlées cette année.
B24 : Des initiatives privées en pisciculture sont constatées. Comment le gouvernement les appuie-t-il ?
SK : Dans ce domaine, les acteurs sont essentiellement des privés. Nous avons comme ambition de mettre en place un fonds pour financer les activités des jeunes et des femmes. Nous interpellons les privés à s’investir dans cette activité qui est très porteuse.
Nous produisons le 1/5 de nos besoins en consommation. Plus de 80 000 tonnes de poissons sont toujours importées au Burkina Faso. Nous encourageons nos acteurs à la production et nous mettons les moyens à leur disposition à travers les formations, du matériel d’aquaculture, des équipements, etc.
Nous avons une politique de mise à disposition des alevins. Pour les deux années, nous avons mis en place 10 250 000 alevins pour les producteurs. Nous avions produit plus de 40 000 tonnes de poissons pour les deux ans.
B24 : Concernant la sédentarisation, est-ce que les producteurs adhèrent ?
SK : Les acteurs ont pris conscience que la transhumance cause beaucoup de dégâts. Nous avons beaucoup de zones pastorales au niveau du Burkina Faso. La zone pastorale est un espace que nous avons délimité de concert avec les propriétaires terriens et les communes afin de localiser les éleveurs avec toutes les infrastructures sociales économiques.
B24 : La région du Sahel est réputée zone d’élevage par excellence. Avec les attaques terroristes, quels peuvent être les impacts sur la filière ?
SK : C’est vrai qu’on n’en parle pas beaucoup quand il y a une attaque. C’est toujours les hommes. C’est normal. Mais les animaux en pâtissent beaucoup. Avec cette insécurité, le problème de production se pose. Certains animaux sont emportés lors des attaques.
Des mesures sont prises de concert avec le ministère de la sécurité pour sécuriser la zone. L’impact est direct pour nos productions au niveau du Sahel. Nous sommes tout le temps en discussion avec le ministère de la sécurité et les autorités locales pour prendre des mesures d’urgence pour sécuriser le bétail et les éleveurs.
B24 : A l’orée des fêtes de fin d’année, certains commerçants importent de la viande impropre à la consommation. Quel est le dispositif que vous allez déployer pour la sécurité des consommateurs sur la qualité de la viande ?
SK : C’est un renforcement du dispositif mis en place depuis de début de l’année au niveau de nos frontières. Nous avons 18 agents qui sont aux frontières en collaboration avec les forces de défense et de sécurité qui assurent un contrôle assez strict de ces entrées d’importation. Mais il y a ces personnes qui sont totalement prêtes, pour de l’argent, à venir nous vendre ces aliments infects qui arrivent à passer les frontières.
Au départ, c’était avec des camions. Maintenant, c’est avec des motos qu’ils circulent sur des pistes là où nous ne sommes pas. Et qui arrivent à envoyer quelques sacs dans les quartiers périphériques dans les grandes villes. Cette activité prolifère parce qu’il y a des acheteurs qui ne savent que c’est un danger pour leur santé. Ce sont des produits très dangereux. Il faut sensibiliser d’éviter ces produits qui sont souvent moins chers.
B24 : La grippe aviaire a été détectée à nos frontières. Devrions-nous avoir peur ?
SK : Le Burkina Faso a été frappé en 2015 par la grippe aviaire. Nous avons entrepris une surveillance active qui a consisté à faire des prélèvements dans toutes les régions d’animaux que nous avons contrôlés dans notre laboratoire national et dans le laboratoire de référence en Italie.
Aujourd’hui, nous avons été déclarés indemnes de la grippe aviaire. Mais malheureusement, hors de nos frontières, il y a la grippe aviaire au Ghana et en Côte d’Ivoire. Il faut que nous évitions d’envoyer cette maladie chez nous.
B24 : Votre mot pour clore l’interview ?
SK : C’est témoigner toute ma reconnaissance et saluer toute la presse du Burkina Faso. Comme nous sommes presque en fin d’année, je voudrai souhaiter de très belles fêtes de fin d’année. Une bonne année 2018. Que Dieu nous protège et nous donne beaucoup de force et de santé et nous éloigne de l’insécurité afin que nous puissions faire de l’élevage le tremplin du développement du Burkina Faso.
Propos recueillis par Ignace Ismael NABOLE et Jules César KABORE
Burkina24
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