Faire fructifier son argent : Aziz Traoré révèle les avantages d’investir en bourse

Face à un environnement économique mondial en perpétuelle mutation, la compréhension des rouages des marchés financiers et boursiers est devenue un impératif pour les investisseurs et les acteurs économiques de la région. Burkina 24 a rencontré en mars 2025 Aziz Traoré, un expert reconnu, qui dirige le département de gestion des portefeuilles à la Société Africaine d’Ingénierie et d’Intermédiation Financière (SA2IF). S’appuyant sur sa solide expertise d’ingénieur financier, il a éclairci les fondements, les défis et les opportunités inhérentes à ces marchés.
Burkina 24 (B24) : Pourriez-vous nous donner une définition simple du marché boursier ?
Aziz Traoré (AT) : Sans trop rentrer dans des définitions très scientifiques, on va peut-être essayer de schématiser un peu les choses. A supposer qu’aujourd’hui, madame se rend au marché. Elle aura deux raisons de se rendre au marché. Soit c’est pour acheter ou vendre.
C’est la même chose avec le marché boursier. Quand on vient sur le marché boursier, c’est soit pour acheter ou vendre des produits boursiers. Sur notre marché, naturellement, on n’a que deux principaux produits qu’on peut retrouver : en l’occurrence, les actions et les obligations.
B24 : Qui peut accéder à ce marché et quelles sont les conditions d’accès ?
AT : Aujourd’hui, tel que le marché est structuré, aussi bien les personnes physiques que les personnes morales peuvent accéder à ce marché. Soit par la voie directe ou la voie indirecte.
La voie directe, c’est passer par une Société de Gestion et d’intermédiation (SGI) qui va vous créer un compte-titre. Et ce compte, justement, va vous permettre de pouvoir intervenir sur le marché boursier. Donc, acheter des actions et des obligations.
Egalement, vous aurez aussi la possibilité de passer par d’autres acteurs. Cette fois-ci, la voie indirecte. Qu’on appelle en fait des Sociétés de gestion (SGO) qui en fait, vous mettent en place ce qu’on appelle des mesures financières. Qui sont des fonds communs de placement.
Et à partir de ces fonds communs de placement, vous allez pouvoir intervenir sur le marché financier. Pas vous directement, mais quand vous déposez l’argent dans ce fonds, la société de gestion va utiliser l’argent pour intervenir sur le marché financier.
B24 : Vous avez mentionné le compte-titre. Qu’est-ce que c’est exactement ?
AT : Je prends l’exemple de la banque, puisque c’est l’exemple que très souvent les gens connaissent. Vous avez un compte bancaire, c’est comme ça qu’on appelle le compte en question. Vous allez juste mettre de l’argent dessus.
C’est la même chose avec le compte-titre. Vous allez mettre de l’argent sur le compte-titre, sauf que l’argent que vous allez déposer va servir à acheter des titres financiers. Ces titres financiers ont une valeur monétaire. La raison pour laquelle on dit que c’est un compte-titre, c’est parce que c’est un compte qui est destiné à recevoir les titres que vous allez acheter sur la base du montant que vous allez déposer sur ce compte.
B24 : Comment un particulier souhaitant investir ses économies en bourse via une SGI doit-il procéder concrètement ?
AT : Quand vous allez venir chez une SGI, parce que vous avez envie de commencer l’aventure boursière, la SGI va tenter de déterminer, en fait, quel type ou quelle offre de gestion vous souhaiteriez acquérir. Quand vous venez voir la SGI, vous voulez vous mettre en gestion sous mandat ou en gestion libre ?
La gestion libre, c’est quand le client estime qu’il s’y connaît sur le marché financier. Il a les rudiments nécessaires et le temps matériel nécessaire, donc, il va se mettre en gestion libre. La SGI va simplement créer un compte avec des accès mobiles ou internet qui vont vous permettre de pouvoir utiliser la plateforme pour investir sur le marché financier.
Maintenant, il peut y avoir des clients qui estiment ne pas avoir suffisamment de connaissances sur le marché financier ou alors qui estiment qu’ils ont les connaissances requises, mais pas le temps matériel pour pouvoir faire le suivi de leur portefeuille.
Et en l’espèce, justement, ils vont confier la gestion de leur portefeuille à la SGI, qui va donc faire les placements pour le compte du client. C’est ce que l’on appelle la gestion sous mandat. En gros, le client donne mandat à la SGI pour réaliser les opérations pour son portefeuille.
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Indépendamment du type de gestion que le client va choisir, il aura quand même la plateforme qui va lui permettre de pouvoir faire le suivi de son portefeuille. En gestion sous mandat, il peut voir quelles sont les positions sur les différents titres que la SGI prend pour son compte. Evidemment, le client peut changer de mode de gestion de son portefeuille à tout moment.
B24 : Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui découvre le marché financier et souhaite investir ?
AT : Quand on est intéressé par la chose, c’est toujours mieux de faire des recherches. Dans les recherches, on voit les structures spécialisées qui exercent dans ces domaines-là. Dans le cas de la bourse, vous allez voir qu’il y a des SGI qui peuvent, justement, vous accompagner dans ce processus-là. Et parmi les SGI, vous avez la SA2IF. Si vous prenez attache avec la structure, la SGI pourra vous donner toutes les informations nécessaires.
Il faut savoir qu’on peut commencer en bourse avec un peu rien. Chez nous, à la SA2IF avec 68 000 FCFA, vous avez la possibilité d’ouvrir un compte-titre et de pouvoir commencer vos opérations de placement. Si vous constatez que c’est un domaine qui semble être rentable, vous pouvez augmenter votre mise au fur et à mesure. Ce qui veut dire qu’avec un peu rien, on peut justement investir sur le marché financier.
B24 : Comment déterminer si un client doit investir dans des actions ou des obligations ?
AT : Si vous venez voir une SGI pour ouvrir un compte, suivant votre qualité, si vous êtes une personne physique ou une personne morale, les dispositions ne sont pas les mêmes. Pour une personne physique qui aimerai ouvrir un compte titre en gestion sous mandat, il faut un certain nombre d’informations sur le client.
De façon basique, c’est de savoir quel est le profil risque et le profil investisseur du client. C’est de savoir si le client est très prudent qu’il n’a pas envie de prendre de risque, en ce moment ce sont les obligations.
Pour un client qui aime prendre des risques, en ce moment on parle plus des actions. Ou alors, est-ce que c’est quelqu’un qui est partagé, entre prendre du risque, mais en même temps aussi sauvegarder son patrimoine. Dans ce cas, on va faire un mixage à peu près équivalent entre les actions qui sont considérées comme des titres risqués et des obligations qui sont considérées en général comme des titres quasi sans risque.
Si le client ne connaît pas son profil risque, la SGI, à la SA2IF ici, on est capable de pouvoir accompagner le client à partir d’un certain nombre de processus pour l’aider à déterminer son profil risque.
Au-delà du profil risque, il y a l’objectif de placement. C’est de demander au client pourquoi il veut donc intervenir sur le marché financier.
Est-ce que c’est dans une optique de se constituer une épargne ?
Est-ce que c’est dans une optique de financer les études des enfants ?
Ou alors, est-ce que c’est dans une optique de pouvoir acquérir un bien immobilier après ?
En fonction de ces objectifs-là, on va voir à peu près quel titre ou alors quel type de financement, d’investissement on peut réaliser pour le compte du client. Au-delà de ça, l’un des éléments aussi importants, c’est de savoir est-ce que le client a un horizon de placement défini ? Est-ce que le client est là pour trois, cinq ou dix ans ?
Pour quelqu’un qui est là que pour trois ans, on ne peut pas aller acheter des titres qui ont des maturités résiduelles de l’ordre de cinq ans. Donc, on va toujours calibrer son investissement sur la période convenue en termes d’investissement.
Et l’autre élément aussi, on va chercher à savoir les sensibilités et les critères du client. Il y a certains clients qui viennent nous voir et qui disent que je souhaite qu’on ouvre un compte. Mais je ne souhaiterais pas investir dans la banque ou alors, je ne souhaiterais pas investir dans les obligations parce qu’il y a des intérêts. Je ne souhaite pas investir dans telle ou telle société parce que c’est l’industrie soit du tabac, soit de l’alcool, soit armes, etc. Donc, chaque client peut nous donner aussi ses spécifications.
B24 : Quels sont les avantages et les risques d’investir sur le marché financier ?
AT : Le marché financier présente des avantages. On aime bien faire la comparaison avec les comptes d’épargne en banque. Si vous partez déposer votre argent seulement en épargne, vous allez voir que vous êtes rémunérés à hauteur de 3,5% sur une année.
Alors que si vous placez cet argent en obligation d’État qui est considéré justement comme des titres quasi sans risque, ça veut dire qu’il n’y a presque pas de risque dessus parce que l’on considère qu’un État ne pas fait faillite, vous allez voir que vous êtes rémunérés à hauteur de 5%, 6%, 7%.
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C’est un rendement très appréciable comparé à ce que l’épargne bancaire pourrait éventuellement vous donner. Au-delà de cela aussi, il faut dire qu’en termes d’avantage ce sont des entreprises de notre zone UEMOA qui se retrouvent sur le marché financier. Donc contribuer au marché financier en investissant dans ces entreprises-là, c’est un peu comme si vous contribuiez au développement de ces entreprises-là.
Et mieux encore, quand vous investissez par exemple dans des obligations, c’est comme si vous prêtez de l’argent aux États qui utilisent pour développer le pays à travers la construction des hôpitaux, des routes, des écoles, etc.
En termes de risque, c’est un investissement boursier, donc ce n’est pas sans risque. Et d’ordinaire, quand le client veut investir sur le marché boursier, nous on leur explique que le premier risque auquel ils peuvent être confrontés, c’est le risque de perte de capital. Aujourd’hui, vous pouvez investir sur le marché boursier, c’est connu de façon générale, vous avez la possibilité de perdre votre argent.
Pour rassurer les clients, il faut dire qu’aujourd’hui, sur le marché financier de la zone UEMOA, vous n’avez pas cette possibilité-là de perdre l’entièreté de votre argent. Parce que le régulateur, en tout cas avec la BRVM, il y a eu un balisement. Il y a eu des balises qui ont été posées qui font que la valeur d’une action ou d’une obligation ne peut baisser au-delà de 7,5% par exemple. Ça veut dire que le risque est un peu maîtrisé.
Au-delà de cela, il faut dire aussi le risque de perdre la liquidité. C’est vrai, je suis venu déposer mon argent chez vous, vous avez utilisé l’argent pour acheter des titres financiers. Est-ce que demain, si je veux récupérer cet argent-là, vous serez capables de pouvoir vendre ces titres financiers-là et me remettre l’argent ? Parce que le titre, en fait, il matérialise une valeur monétaire. Donc, si je dis que je détiens une action SONATEL, en vrai, ça veut dire que j’ai 25 000 francs quelque part, si toutefois le coût de SONATEL est à 25 000 francs.
Jules César KABORE
Burkina 24