Film « Al Djanat » de Aïcha Chloé Boro : « C’est la première fois que je ramène la camera dans mon histoire personnelle »
La réalisatrice burkinabè Aïcha Chloé Boro a présenté en première mondiale, son film documentaire Al Djanat, à l’occasion de la 28e édition du Festival panafricain du cinéma de Ouagadougou (FESPACO). Le film qui dure 90 minutes relate un problème autour du conflit foncier dans la famille Coulibaly à Bobo-Dioulasso. Lauréate en 2019, Aïcha Chloé Boro vise un deuxième sacre au plus grand festival de cinéma africain.
Après avoir projeté ce film très intime qui est une première mondiale, quel est votre ressentiment ?
C’est très dur. Je n’avais pas dormi de la nuit parce que c’est un film familial. C’est intimiste. J’avais très peur de la réaction de la famille quand elle allait découvrir le film aujourd’hui. Ils savaient qu’ils étaient filmés.
Mais ils ne savaient pas la finalité. Après 12 ans de documentaire, c’est la première fois que je ramenais la camera dans mon histoire personnelle, intime et l’histoire de ma famille, dans la cour de ma famille. C’était très dur. C’est toujours très dur. Il y a l’émotion. J’essaie de ne pas pleurer. Mais c’est compliqué.
Est-ce que dès le départ, vous saviez qu’au cours de ce film, vous serez confrontée à cette histoire de foncier ?
Je savais que je filmais l’histoire du conflit familier autour de la terre de nos ancêtres. Mais, je crois que c’est beaucoup plus profond que ça. Le monde est changeant aujourd’hui. Vous qui m’interviewez, c’est vrai, vous avez porté de la cotonnade mais vous avez des chaussures qui ne viennent pas de chez vous.
Le monde est changeant. Quand ce monde aura changé, quand son fonctionnement aura changé qu’est ce qui va nous rester comme trace de notre histoire, de notre culture pour nos enfants. Quand le monde aura complètement changé, quand toutes ces traditions qui font ce que nous sommes auront disparu, il faut qu’il y ait des traces. Ce film sera là pour plusieurs générations, ce film restera pour cela.
Au-delà, de la question foncière, on se rend compte qu’il y a beaucoup d’autres thèmes qui reviennent…
Effectivement, il y a aussi comment la justice traite cela. Nous avions un rapport à la terre et la terre était traitée selon nos croyances, selon la justice que mes tantes appellent la justice du Blanc qui a un autre regard plus pragmatique, plus monétaire.
Quand ton cordon est enterré quelque part, est-ce quand on t’a élevé tous les jours en te rappelant que tu es lié à cette terre, est-ce qu’un regard purement monétaire suffit à trancher ? Je sais qu’il y a beaucoup de familles qui sont prises dans ce tiraillement de foncier. J’espère que ça va permettre aux gens de réfléchir sur le sujet aussi. Je n’ai pas la solution.
Alors, vous visez le doublé ?
J’aimerais beaucoup. C’est ma prière. (Éclat de rire).
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