Commune de Boussouma : Un présumé escroc roule des autorités administratives et coutumières dans la farine
Le Président de l’Association des clubs Faso Reintaré Takujuka (ACFRT), Amadou Torodo, dénoncé par une partie de la population de Boussouma, a été appréhendé le 6 mai dernier pour fait d’escroquerie. Après avoir convaincu le préfet, il avait réussi à mobiliser des centaines de personnes à venir s’inscrire, qui pour une aide financière, qui pour des octrois de prêt ou des arts martiaux. Chaque candidat devrait verser au minimum 2 225 F CFA pour l’inscription. Mais le récépissé délivré ne semble pas crédible.
La population de Boussouma, commune rurale située à une quinzaine de kilomètres de Garango est, depuis le week-end dernier, désenchantée. En effet, le président de l’Association des clubs Faso Reintaré Takujuka, Amadou Torodo était venu s’installer dans la commune de Boussouma pour, dit-il, venir en aide aux personnes de la localité.
Le Président de la délégation spéciale, Isaac Sourgou, que nous avons rencontré était toujours sous le choc de cette roublardise. Selon lui, Amadou Torodo s’est présenté dans son bureau le 3 mai dernier avec une correspondance dont l’objet est intitulé « demande de partenariat et une autorisation d’installation dans la commune de Boussouma ». Son association, dit-il, aide les personnes vulnérables, forme ceux qui désirent se former en arts martiaux et donne des fonds comme les AGR (activités génératrices de revenue).
« Il m’a présenté son ordre de mission visé à Garango. Puis, il était en compagnie d’une dame très bien connue à Garango que je connais aussi. La dame m’a dit que le travail a été fait à Garango, c’est fini et que c’est le cap de Boussouma », s’est laissé convaincre le préfet. A la suite de ces propos, le promoteur de l’association aurait demandé à Isaac Sourgou de l’aider à trouver un local où s’installer.
A cette requête, le Président de la délégation spéciale (PDS) qui disait ne pas trouver un endroit où le loger a fini par l’héberger chez lui. Le recrutement des candidats a commencé le 5 mai.
La préfecture a servi de cadre pour faire les inscriptions. C’est dans l’enceinte de ce service que le responsable du comité villageois de développement (CVD), Gaston Gouem, de passage sur les lieux, a constaté un grand rassemblement de foule.
« C’est la secrétaire du PDS qui faisait la traduction mais comme elle n’avait pas la voix tonnante, moi j’ai pris », nous confie-t-il. Selon le CVD, Amadou Torodo a fait savoir qu’il travaille avec le Ministère des sports et des loisirs.
«… Sur les documents il est écrit Associés : Chine, Japon et Korea. Nous qui sommes dans les communes rurales est-ce que quand on voit des choses pareilles on peut prendre à la légère ? C’est pourquoi on s’est inscrit. Surtout que cela se passe au niveau de la préfecture », s’écrie Gaston Gouem.
Le chef coutumier s’est inscrit ainsi que ses femmes
A ce qu’on dit, il y avait trois guichets dont celui pour le prêt, l’aide aux personnes vulnérables et pour ceux qui veulent pratiquer les arts martiaux.
Chaque candidat individuel devrait verser la somme de 2 225 F CFA. C’est-à-dire 2 000 F CFA comme frais d’inscription, 200 F CFA pour les timbres et 25 F CFA pour la feuille de demande. Les associations ou groupements associatifs payaient 3 225 F CFA.
Autres détails est qu’il y avait de l’aide pour les chômeurs, notamment ceux qui veulent faire des formations professionnelles telle qu’en santé ou dans l’enseignement. Le plafond était limité à 20 candidats dont 10 filles et 10 garçons. A ce niveau, chaque inscrit devrait débourser 12 225 F CFA.
« Le vendredi, rappelle Gaston Gouem, j’étais à Garango. Il (Ndlr : Torodo) m’a téléphoné que de venir l’aider parce qu’il a des difficultés pour gérer les personnes vulnérables. Il dit qu’on lui avait demandé de recruter 100 personnes mais le nombre demandé est atteint et il y a encore environ 300 personnes qui veulent s’inscrire. Il me demande de venir lui porter un coup de main dans l’interprétation pour leur faire comprendre que la liste est close. Néanmoins, il a dit qu’il va appeler ses patrons pour voir s’ils vont l’autoriser à recruter au-delà du nombre qui était prévu ».
Une bonne partie de la population avait pu s’inscrire. Le Chef de Boussouma Naba Sigri, qui a eu l’information par le biais du CVD, ne s’en est pas privé.
« Moi j’étais dans le besoin vous avez vu (il indexe au côté au nord-Ouest de son palais) le poulailler. Je veux faire une grande ferme ailleurs pour les déménager là-bas. Automatiquement quand quelqu’un vient te parler de l’argent et de projet, il te convainc facilement», laisse entendre le Chef.
Dès que sa Majesté a eu l’information, il est rentré chercher les pièces à fournir à savoir l’acte de naissance ou la copie de la pièce d’identité. Les prêts vont de 250 000 à 2 000 000F CFA. « Au regard de mes besoins, j’ai opté pour le plafond.
Je lui ai d’abord donné les 2000 F CFA qu’il demande à l’inscription et ensuite j’ai cherché la monnaie pour lui compléter les 225 F CFA et il m’a dit non que de laisser lui-même, il va chercher compléter après. Après l’inscription, il m’a promis que le lendemain il allait venir le soir me rendre visite », laisse entendre le chef de Boussouma.
Un ancien pensionnaire de maison d’arrêt de Dori
En plus de lui-même, Sa Majesté dit avoir pu inscrire trois de ses femmes et un de ses petits-enfants.
Mais le hic est que le récépissé qu’il délivrait ne comportait ni signature, ni autre précision. Un détail qui a attiré l’attention de certains candidats qui, à leur tour, ont alerté le PDS.
Ce dernier a aussi signalé ce détail à la gendarmerie qui est venue mettre le grappin sur Amadou Torodo. Nous avons fait un tour à la gendarmerie de Garango, qui pour les besoins de l’enquête, n’a pas souhaité nous donner plus de détail sur cette affaire. Selon certaines sources, le responsable de Faso Reintaré serait un ancien détenu de la Maison d’arrêt de Dori, libéré en janvier dernier.
Il serait passé par Garango, où il a pu enregistrer plus de 200 personnes. C’est de là-bas qu’Angèle Bambara, bien connue du monde associatif, l’aurait accompagné à Boussouma. Nous avons contacté cette dernière au téléphone. Elle s’est rétractée, suggérant de voir le PDS de Garango qui, à son tour, dit de voir son supérieur hiérarchique.
Martin OUEDRAOGO
Correspondant de Burkina24 à Tenkodogo
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