Mesures sécuritaires à Ouaga : Entre félicitations et incompréhensions
« C’est pour notre sécurité ». « C’est normal ». « Ce n’est pas embêtant ». « J’ai les papiers, on m’empêche de continuer ». « La moto ne peut pas partir ». « Je vais faire comment pour rentrer à la maison ? ». Dans la nuit du mercredi 7 à jeudi 8 septembre 2016, l’officier de police adjoint Mahamadi Kologo et ses hommes ont eu droit à tout : félicitations, incompréhensions et même des vociférations. Retour sur une patrouille de nuit dans la ville de Ouagadougou.
Il est 20h à Ouagadougou. Les contrôles ont débuté. Mais tous n’ont pas la même appréhension de ces mesures sécuritaires. M. Ramdé l’avoue : « je suis désolé, je suis en infraction ». Le contrôle pour lui, « c’est normal », car dit-il, « la police doit faire son travail ».
Mais ce n’est le cas pour Derra Amadou. Et il exprime clairement son mécontentement : « je ne suis pas vraiment content. Ce n’est pas à une heure tardive où il faut faire contrôle. On est à 21h. C’est la descente. Après 22h, c’est pour les noctambules ». La seule chose qu’il ne dit pas, c’est qu’il n’avait pas les documents justifiant que la moto qu’il détient l’appartient.
« Avec nos djihadistes, il faut faire ça »
Au rond-point des Nations Unies, Sassié Helene, Togolaise vivant au Mali et ses compagnons de route ont dû faire une halte inopinée. « Nous résidons à Bamako, nous sommes partis à Lomé pour les vacances, donc nous sommes en train de rentrer », explique-t-elle. Le chauffeur et les autres occupants de la voiture l’ont vidé de son contenu sous l’œil vigilant de l’assistant de police et du directeur général de la police qui passait par là.
Et « c’est une surprise » pour celle qui dit connaître le Burkina depuis « plus de 30 ans ». Que pense-t-elle alors des procédures actuelles ? « Je crois que c’est bien. Avec nos djihadistes, il faut faire ça. C’est bon. Courage », dit-elle aux agents de police qui ont passé au peigne fin la voiture.
Le contrôleur général de police Lazare Taparga était lui aussi de la partie. Il est venu pour dit-il « être témoin du travail » que font ses hommes sur le terrain. Ce travail explique le directeur général de la police consiste « à rassurer davantage la population ». Tout cela pour que « les gens comprennent que les services de sécurité veillent au grain ». Le but de la manœuvre ajoute-t-il, c’est d’essayer « de sécuriser le maximum possible ».
Après Janvier 2016 et la vague d’attaques qui a suivi au Nord, les opérations visent selon lui à « essayer de déjouer les plans de certaines personnes qui ont de mauvaises intentions, comme ceux qui voudraient aller dépouiller les honnêtes citoyens de leurs biens ou qui voudraient bien s’attaquer à nos populations à travers des attaques terroristes du genre que nous avons déjà rencontrées ».
Sans aucun document d’identité
D.B. ne possédait aucun document d’identité sur lui à l’image de bien d’autres personnes embarquées pour les vérifications d’usage. Ce « gérant» de maquis a déclaré avoir perdu sa CNIB dans la matinée. « C’est demain matin que j’attends pour aller faire déclaration de ça». La moto, qu’il roule ne l’appartient pas non plus. « C’est pour mon caissier. On travaille ensemble. On a eu la coupure. Il m’a donné d’aller chercher groupe dans l’autre côté ».
« Non. La moto ne peut pas partir ! »
Face au mécontentement de ceux qui disent ne pas comprendre pourquoi leur moto (sans immatriculation) est emportée, l’assistant de police Dandema Manegin de la Compagnie républicaine de sécurité (CRS) explique :
« Les motos qu’on a saisies sans plaque d’immatriculation, les personnes ont le droit demain matin de se présenter dans les différents commissariatz qu’on va leur indiquer pour présenter les documents qui prouvent qu’ils ont payé la moto et qu’ils n’ont pas eu la possibilité d’abord de faire la plaque d’immatriculation et on va procéder à une vérification ».
Mais « j’ai les papiers, on m’empêche de continuer », martèle cet autre jeune qui n’en revient pas de voir sa moto être emportée à bord d’une pick-up. « Je pense qu’ils doivent revoir leurs procédures. J’ai les papiers et on prend ma moto. Je veux savoir », ajoute-t-il. Trop tard. La moto est partie. Il devra se présenter au commissariat avec le bout de papier indiquant le motif de la soustraction.
Il y a ceux qui sont moins tendres en parole. Les mots, ils ne les mâchent pas. Exactement comme ce jeune homme rencontré à 1h du matin. « Non. La moto ne peut pas partir ! », s’insurge-t-il en s’agrippant à l’arrière pour empêcher la police de l’emporter. « Pourquoi ? Vous roulez avec la voiture, c’est à votre nom ? », s’est-il adressé à l’officier de police.
« Il n’y a pas de plaque d’immatriculation » sur sa X1R, reconnait-il, mais il a la carte grise. Et il poursuit : « Je vais faire comment pour rentrer à la maison ? Quand vous m’avez arrêté, est-ce que j’ai fui ? J’ai tous mes dossiers. J’ai la carte grise de la moto, les cartes d’identité. S’il vous plait, ne faites pas ça ! ».
A entendre le directeur général de la police, les opérations du genre sont parties pour durer. « Nous comptons avec cette opération rester sur le terrain de façon permanente. Nous n’entendons pas nous arrêter en si bon chemin ».
Mais avant, l’institution est appelée à s’expliquer sur les mesures adoptées et en cours d’implémentation. La grogne sociale, (notamment sur les réseaux sociaux) monte autour de la logique qui veut que toute moto dont les documents d’identification ne concordant pas avec l’identité du détenteur soit emportée pour les vérifications d’usage avant restitution.
Oui Koueta
Burkina24
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