Terrorisme au Burkina : Atiana Serge Oulon lève un coin de voile
Il est certain que la soif de comprendre le terrorisme qui sévit au Burkina ces dernières années tenaille plus d’un Burkinabè. Le dernier livre « Comprendre les attaques armées au Burkina Faso, profil et itinéraires des terroristes », du journaliste d’investigation, Atiana Serge Oulon, apporte une réponse. Mis sur le marché au prix de 5000 F CFA l’unité, l’ouvrage a été dédicacé ce jeudi 27 février 2020 à Ouagadougou en présence des amis, parents et connaissances.
Comment le phénomène du terrorisme a-t-il pris racine au Burkina Faso ? Le journaliste Atiana Serge Oulon, directeur de publication du journal « L’Evènement », pointe l’incurie de la gouvernance depuis plusieurs décennies et les plaies qui s’y sont greffées, notamment la recherche du gain facile, la corruption à plusieurs niveaux de la société et la pauvreté.
Les témoignages prémonitoires
Et des alertes ont été données bien avant le déclenchement de la bourrasque. La prévisibilité du basculement du Burkina Faso dans la zone d’insécurité date de 2013. Des voix ont prévenu. C’est le cas de Me Mariko. Serge Oulon a confié qu’il lui a dit cette phrase sur le perron de Splendid Hôtel: « Après le Mali, ce sera vous, le Burkina-Faso. Préparez-vous ! ». Trois ans après, le même hôtel est frappé par la première attaque terroriste la plus sanglante de l’histoire du Burkina.
A le lire, tous les signaux étaient déjà allumés. Mais qu’a fait le pouvoir ? Son analyse est sans complaisance : « l’inaction et la légèreté ont régné ». Il estime que les mécanismes de prévention n’ont pas été activés et ce, depuis le règne de l’ancien président Blaise Compaoré.
Qui sont ces terroristes ?
On en apprend aussi, dans ce livre, sur le circuit du trafic des armes, sur les terroristes eux-mêmes avec leurs profils dressés, qui étaient-ils, comment ont-ils basculé dans la violence, les itinéraires des terroristes, les modes d’organisation des groupes armées, leurs modes opératoires.
«On est impressionné de voir la manière avec laquelle il arrive à décrire les groupes armées s’organisent sur le terrain. Les modes d’emploi des engins explosifs, là aussi, l’ouvrage nous enseigne beaucoup sur l’origine et comment ils arrivent à le faire », dira Serge Théophile Balima, dans son analyse de l’œuvre.
On y apprend tout sur Malam Dicko, Djaffar Dicko et leurs relations avec Amadou Kounfa, fondateur du Front de Libération du Macina au Mali, Oumarou Boly, alias Oumy, la terreur de Kereboulé dans commune de Djibo. Les frères sanguinaires Sawadogo dont le petit frère Abdoulaye Sawadogo, le cerveau des attaques de Ouagadougou jusqu’à sa mort était pilier du Groupe soutien à l’Islam et aux Musulmans (GSIM) de Iyad Ag Ghaly au Burkina Faso, le démissionnaire de l’armée Ali Tamboura, Mougnol Aboubacar Dick, jeune candidat à l’immigration clandestine atterri dans des réseaux de terrorisme.
Que veulent les terroristes ?
« Une constance se dégage sur la base des aveux des individus arrêtés, l’exploitation du contenu des téléphones portables retrouvés sur les combattants, du partage d’informations des services de sécurité du pays », les motivations sont d’ordre religieux. Mais la précarité est en la cause principale.
Les lectures, les études, des témoignages et voyages sur le terrain lui ont permis d’enrichir son livre.
La riposte du pouvoir
Dans les derniers chapitres du livre, l’auteur analyse la riposte du pouvoir public. S’il admet que des initiatives ont été développées, des projets d’attaques déjoués par les services de sécurité, ce ne serait pas sans payer le prix de mille sacrifices chez les Forces de défense et de sécurité et la population.
En l’absence de politique nationale de sécurité, il pense que les politiques n’ont pas encore pris la mesure de la situation. «On ne s’est pas encore réveillé », dit-il.
Le G5 sahel ! Il ne croit pas en sa viabilité et se pose des questions. Pourquoi l’Algérie a-t-elle refusé d’adhérer à cette force ? Le commerce des armes n’est-il pas une composante stratégique de la géo-composante de la sous-région ? Pourquoi les USA refusent-il de financer le G5 sahel ?
La position de la France
Que fait cette puissance qui a les moyens techniques pour avoir des renseignements sur les mouvements des groupes terroristes ? Néanmoins, dira-t-il, «le message pour moi, c’est de sortir de ces jérémiades, qu’on arrête de se plaindre des occidentaux mais de prendre notre responsabilité et de s’assumer ».
Serge Théophile Balima n’a pas tari d’éloges face à son ancien élève pour avoir fait un travail avec un sens élevé de la responsabilité, sa maturité à traiter les sources d’information.
« C’est une œuvre bien rédigée dans un style journalistique, donc bien structurée, facile à lire, beaucoup d’informations en ce sens que les témoignages sont nombreux, diversifiés et édifiants à la mesure de la soif qu’on a de comprendre les attaques armées au Burkina Faso », a-t-il apprécié.
Directeur de publication du bimensuel l’Evènement, Atiana Serge Oulon est à sa troisième œuvre. Il a publié auparavant, « Le général Gilbert Diendéré parle » et « Insurrection populaire d’octobre 2014 au Burkina Faso : Les trahisons ».
Revelyn SOME
Burkina24
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