Damana Pickass :Le nouveau parti de Gbagbo « va renforcer les liens » entre Ivoiriens et Burkinabè

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Damana Adia Pickass. Ce nom semble méconnu par plusieurs Burkinabè. Mais le visage, sûrement pas, tant il a été au centre d’une scène jugée surréaliste lors de la proclamation des résultats du second tour de la présidentielle ivoirienne et dont la vidéo à fait le tour du continent en 2010. Sur la vidéo, il avait tenté d’empêcher un des représentants de l’opposition d’alors à la Commission électorale de proclamer des résultats « non-consolidés », disait-il, par la Commission électorale. À la chute de son leader, l’ex-Président Laurent Gbagbo, il s’est retrouvé, comme plusieurs milliers d’Ivoiriens en exil au Ghana. De retour dans son pays, dix ans après, il reste fidèle à sa lutte politique et se confie à Burkina24.

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Burkina24 (B24): Bonjour Monsieur Damana Pickass, Comment allez-vous après dix années d’exil au Ghana ?

Damana Adia Pickass (D.A.P.): Permettez que de prime abord, je me réjouisse de cette interview tout en saluant les lecteurs de Burkina24.

Pour répondre à votre question, après 10 années d’exil, on ne peut que se sentir comme quelqu’un qui a passé dix années en exil (Rires), c’est-à-dire qu’on est heureux de retrouver notre pays qui nous a vraiment manqué. Nous sommes heureux de retrouver nos parents, nos proches et nos amis qui nous ont manqués parce que ce n’est jamais facile l’exil.

Se lever un matin, contre toute attente et sans aucune préparation et fuir son pays pour se retrouver dans une situation que l’on n’aurait jamais imaginé, dans un pays dans lequel nous ne comprenions même pas la langue encore moins les mœurs des habitants… je vous assure que c’est quelque chose à ne pas souhaiter à son pire ennemi. Ce n’est jamais facile l’exil, nous y avons passé dix (10) années. Par la grâce de Dieu nous avons survécu. Malheureusement ce ne fût pas le cas pour nombreux d’entre nous qui n’ont pu survivre.

Leur souvenir reste vivace dans nos esprits et c’est pour nous l’occasion de leur rendre hommage car ils sont comparables à des soldats qui sont tombés sur le champ d’honneur. Bref nous sommes là et cela fait désormais partie de notre patrimoine, de notre histoire. Par ailleurs, malgré la dureté de cette épreuve, nous ne nourrissions aucune rancœur encore moins un quelconque esprit de vengeance.

Bien au contraire, nous sommes venus dans notre pays pour reprendre notre place au sein de nos familles biologiques, au sein de nos régions, notre parti politique et à grande échelle de la Nation ivoirienne pour qu’ensemble nous puissions contribuer à sa bonne marche pour le bonheur de tous nos concitoyens sans exclusive.

B24 : Vous avez dit que l’exil « c’est quelque chose à ne pas souhaiter à son pire ennemi » comme pour dire combien cette expérience a été douloureuse. Alors dites-nous, un exilé dans votre cas, vit de quoi pendant ces dix (10) années ? Sachant que 10 ans ce n’est pas 10 jours encore mois 10 semaines ou 10 mois.

D.A.P. : Vous faîtes bien de le demander car c’est en cela que la dimension spirituelle intervient dans l’exil. Votre question est pertinente en ce sens qu’en tant qu’exilé vous arrivez dans un pays qui a ses lois et ses restrictions qui ne sont pas toujours faciles pour les étrangers qui bien que bénéficiant du statut d’exilé sont confrontés à la réalité du terrain.

En clair, je rends gloire à Dieu parce que c’est lui qui a pris soin de nous. Pendant 10 ans nous n’avons pas travaillé, mais durant toute cette période, il ne s’est écoulé un jour sans que nous et nos familles ne puissions avoir un morceau de pain sous la dent et un verre d’eau à boire.

Je n’ai, par ailleurs, pas souvenance qu’au cours de cette période un ivoirien en exil soit mort de faim. Ceci est à la Gloire de Dieu. En outre, je tenais à ajouter que l’exil est divin car à travers Son Fils notre Seigneur Jésus-Christ, Dieu a fait l’exil comme pour dire que l’exil a forcément une dimension spirituelle et Dieu ne laisse jamais tomber les exilés.

B24 : Vous n’étiez pas seul en exil. En plus de l’ex-Président Laurent Gbagbo, le plus illustre d’entre vous et votre chef de file (comme il s’est lui-même décrit récemment), il y a de nombreux réfugiés qui vivent encore dans des camps au Ghana, d’où vous venez, et au Togo. Quelles sont les démarches que vous entreprenez pour leur retour au bercail surtout que c’est pour vous qu’ils sont retrouvés dans cette situation ? 

À ce sujet, comme vous le savez, nous sommes sortis du pays et nous nous sommes retrouvés en exil avec plusieurs dizaines de milliers de nos compatriotes. Pas parce que nous avions les moyens, car je le précise, nous étions tous dans une situation difficile et délétère, mais en tant que leaders et responsables, nous n’avons jamais tourné le dos à nos compatriotes. Autant que faire se peut et dans la mesure de nos moyens, nous avons toujours apporté assistance à ceux qui était dans des situations de détresse.

B24 : Il se rapporte que les pontes de l’ex-régime roulaient carrosse à Accra alors que les réfugiés broyaient du noir dans des camps situés dans des banlieues.

D.A.P. : Les gens racontent des choses mais ils ne savent pas toujours la réalité. D’ailleurs, nous ne sommes pas à un niveau où nous allons étaler sur la place publique les actions d’assistance que nous apportons à nos compatriotes. Les exilés dans des camps peuvent eux-mêmes le témoigner. Nous avons été présents dans des cas de maladies. Mais puisque les gens parlent beaucoup, nous allons quand même lever un coin de voile sur ce qui s’est passé en exil.

Lorsqu’il y avait des décès, nous avons su exprimer notre solidarité. Pendant les fêtes de fin d’année, nous avions organisé régulièrement des repas et des arbres de Noël pour les tout-petits, question de leur donner un peu de joie et de gaieté. À notre actif, il faut reconnaître de nombreuses actions posées. Bien évidemment, nous ne pouvions pas supporter tout seul sur nos épaules les besoins et les charges de tous nos concitoyens exilés tant ils sont nombreux et nos moyens pas toujours suffisants pour faire face à tous les défis des uns et des autres.

On ne peut pas aider tout le monde de la même manière et au même moment. Notre appui peut donc paraître dérisoire par rapport à la masse mais il ne faut pas oublier que nous sommes également dans la détresse. Mais à la différence avec les autres, nous ne pouvions pas nous appesantir sur notre cas particulier. Nous ne pouvions pas pleurnicher partout.

Notre souffrance était interne car il n’y avait personne pour nous secourir. Il fallait parfois nous priver de beaucoup de choses pour apporter assistance à nos frères et sœurs. Les exilés les plus honnêtes le reconnaîtront.

À propos du retour des exilés, le seul obstacle est la politique d’incitation à leur retour, et cette politique est loin d’être attrayante. À part ce fait, il faut reconnaître que les conditions empiriques sont réunies. Le Président Laurent Gbagbo que nous attendions tous est rentré. Il a été reçu en audience par le Président Alassane Ouattara. Ils ont discuté fraternellement.

Depuis 2018, il y a un processus de retour des exilés qui est engagé. Ce processus devrait gagner en intensité avec le retour de Laurent Gbagbo et sa rencontre avec Alassane Ouattara mais les conditions du retour n’incitent pas au retour.

Après 10 ans passés en exil, vous revenez dans votre pays et comme politique de soutien, politique de réinsertion l’on vous tend une enveloppe de 500 Dollars soit au plus 300.000 Francs Cfa sachant que tout est à refaire, c’est-à-dire, reprendre une maison et assumer les charges immédiates touchant à la scolarisation des enfants et autres dans un premier temps. Tout le problème réside là. Voici des gens à qui l’on a tout pris, tout pillé.

Il s’agit pour eux de reconstruire leurs vies, de la restaurer et de la rebâtir. Ils ne peuvent pas subitement se lever après 10 ans, revenir dans leur pays et l’on leur tend une enveloppe puis leur demander de se débrouiller alors que là-bas ils sont dans des camps dans lequel ils bénéficient d’un logement gratuit, de l’eau courante et d’électricité… C’est donc face aux incertitudes de la réinsertion que ces Ivoiriens ne peuvent pas venir.

Nous avions posé ce problème avant notre retour au Ghana Refugee Board et au Haut-Commissariat des Refugiés, HCR, qui sont en charge des questions liées à l’encadrement des réfugiés. À ces organisations, nous avons expliqué que la question des réfugiés risque de faire perdurer la crise ivoirienne car tant qu’il y a encore des réfugiés cela suppose que la crise ivoirienne n’est pas encore résolue. Ces camps de réfugiés sont donc des symboles de la persistance de la crise ivoirienne.

Aujourd’hui, avec la dynamique de paix et de réconciliation qui plane sur la Côte d’Ivoire, il est important que nos institutions accompagnent ce processus en proposant aux exilés une politique attrayante et incitative au retour en leur donnant des moyens conséquents pour pouvoir se réinsérer dans le tissu économique et social de leur pays.

La question de la réinsertion des exilés et des déplacés est une phase extrêmement importante dans la résolution de la crise ivoirienne. Elle constitue la dernière étape de la résolution et de la normalisation de toute crise. C’est un indice très important. Nous avons alors plaidé auprès du HCR afin de porter cette enveloppe à deux (2) millions de Francs Cfa au minimum. Jusque-là nous sommes dans l’expectative. Si cette enveloppe est revue à la hausse, vous verrez que les camps de réfugiés vont se vider.

B24 : Au cours de vos dernières tournées de mobilisations dans le cadre des préparatifs du retour du président Laurent Gbagbo, vous avez tenu des propos qui ont fâché le régime en place. Cela vous a valu une convocation par le Directeur Général de la police nationale et il a fallu de peu pour que l’on vous mette à la disposition de la justice. Est-ce à dire que vous n’avez pas tiré les leçons de ce qui vous a conduit en exil des années plus tôt ?

D.A.P. : Vous savez, l’on ne revient pas de l’exil vierge. Et qu’est-ce qui vous dit que je n’ai pas tiré les enseignements de ce qui nous a poussés en exil ? Bien au contraire, j’en ai tiré beaucoup. Mais vous savez, un homme, il a des convictions, il a des principes et une ligne de conduite à laquelle il doit rester fidèle dans le temps sans géométrie variable en fonction du temps ou des circonstances. À propos de la crise ivoirienne, il y a des réalités et nous restons loyaux à notre vision.

Je le dis, nous ne sommes pas là pour faire plaisir au pouvoir encore moins leur dire ce qu’ils veulent entendre. Je ne suis pas là comme un perroquet répéter ce qu’ils veulent qu’on leur dise. Non. Un opposant a son discours qui colle à son appréciation de la réalité du terrain.

Je pense que je demeure dans cette posture d’opposant libre dans sa tête mais qui ne dit, toutefois, pas n’importe quoi à savoir attiser les tensions. Il y  a tout de même un minimum dont nous devons nous prévaloir en tant qu’opposant parce que le discours de l’opposant n’est pas le discours du parti au pouvoir.

B24 : Le président du FPI « légal », Pascal Affi NGuessan a dit avoir manifesté le besoin de rencontrer son mentor, son chef Laurent Gbagbo depuis son retour pour lui remettre la direction du parti. À la surprise générale, ce dernier a indiqué lui  laisser « l’enveloppe » du FPI et annoncé la création d’un nouveau parti pour porter son combat. Que reprochez-vous au fait à Pascal Affi NGuessan ? 

D.A.P.: Nous n’allons pas nous éterniser sur cette crise. En réalité, le président Affi a eu toutes les occasions pour apporter une solution à la crise. Le président Laurent Gbagbo lui a été disponible et a toujours été disposé à le recevoir pour trouver une solution définitive à cette crise.

À Bruxelles notamment où Affi Nguessan s’y est rendu plus d’une fois. Je vous prends au mot, le président Affi NGuessan l’a dit face à la presse nationale et internationale que si Laurent Gbagbo son chef, son mentor revenait, il lui remettrait le parti car selon lui c’est parce qu’il n’était pas là que ses adversaires se sont servis de lui pour le combattre. Quand bien même cela n’est pas tout à fait exact, nous le lui concédons.

Maintenant que le président Laurent Gbagbo est rentré et conformément à la parole donnée publiquement, il devrait alors lui donner le parti. C’est aussi simple que ça !

B24 : C’est justement le sens des démarches dont il a dit s’être prévalu pour rencontrer l’ex-chef de l’Etat…

D.A.P.: Vous savez, nous connaissons les manœuvres politiciennes. S’il voulait véritablement donner le parti à Laurent Gbagbo, il allait le lui donner. C’est tellement simple ! Même s’il n’arrive pas à le rencontrer comme il le dit, il pouvait faire une conférence de presse pour annoncer publiquement et de façon fidèle à ses propos, qu’il donne le parti à Laurent Gbagbo et en attendant qu’il le reçoive pour étudier les modalités de cette restitution du parti.

Au-delà de ça, le président Laurent Gbagbo est rentré au pays le 17 Juin dernier, mais les attaques des partisans d’Affi NGuessan ont commencé dès cette même date. Lorsqu’il partait à Daoukro, il a été vilipendé. Si tant est vrai que vous voulez lui donner le parti, pourquoi alors vous l’insultez, vous l’injuriez ?

Quand un monsieur comme Laurent Gbagbo a subi ce qu’il a subi comme humiliation et peine, la priorité ce n’est pas la politique politicienne. En tant qu’Africain, nous devons lui apporter notre compassion, notre solidarité pour la mort de ses proches et la mort à laquelle il vient d’échapper.

En vérité, beaucoup de nos compatriotes dont Pascal Affi NGuessan ne misaient pas sur le retour de Laurent Gbagbo. Donc il prenait des engagements dont il ne pouvait tenir à savoir restituer le parti à Laurent Gbagbo.

B24 : Le retour de Laurent Gbagbo avait porté l’espoir de la réconciliation au FPI. Ce qui n’est pas le cas. En outre, il est en instance de divorce d’avec l’ex-première dame Simone Gbagbo. Estimez-vous que Laurent Gbagbo soit l’homme de la situation pour réconcilier les Ivoiriens entre eux comme l’estiment ses partisans? 

D.A.P.: C’est en cela que les gens font beaucoup de confusion. La réconciliation au niveau d’un parti politique n’a rien à avoir avec la réconciliation au plan national. Ce sont deux choses différentes. Un parti politique est réconcilié autour d’un projet de société, d’une vision, d’un idéal sociétal. C’est donc un groupe privé qui se crée autour d’un idéal et d’une idéologie très claire.

Dès lors que vous ne partagez plus ces éléments nous ne pouvons plus demeurer au nom d’une réconciliation quelconque dans ce même parti. (…) D’ailleurs, Affi NGuessan l’a dit publiquement, depuis 2010 il ne partage plus la vision du président Laurent Gbagbo. Dès cet instant, nous comprenons toute la suite des évènements  à savoir son refus de lui donner le parti et qu’en réalité, il n’a jamais voulu le faire. C’était donc de la manipulation.

Le président Laurent Gbagbo en lui laissant le FPI, il fait plaisir à Affi NGuessan et lui permet de réaliser ses vœux. Il met ainsi fin à cette guéguerre puérile à n’en point finir. En définitive, la réconciliation au plan national n’a rien à voir avec la réconciliation dans un parti politique.

Dans un parti politique, ce sont les oiseaux de même plumage qui volent ensemble et le plumage est la vision et l’idéologie. La réconciliation nationale se fait avec des oiseaux de plumages différents qui sont obligés de voler ensemble.

Les plumages sont les idéologies diverses de chacun des partis politiques que compose notre Côte d’Ivoire et nous sommes obligés de voler ensemble pour consolider la Paix et la réconciliation. Dans le cas d’espèce, puisque nous sommes maintenant partis du FPI, Affi NGuessan réjouit tranquillement ses camarades de la même idéologie avec qui nous allons faire la réconciliation désormais au plan national. Il ne faut donc pas faire la confusion à ce niveau.

B24 : Le président du FPI légal, Pascal Affi NGuessan se réjouit des ralliements des bases du parti sur l’ensemble du territoire national. Cela ne vous inquiète-t-il pas au camp des « Gbagbo ou Rien », GOR ? Qu’est-ce que vous en dites ?

D.A.P.: (Rire) Arrêtons la comédie. Je peux le dire, il n’y a pas de défection du tout dans le FPI-GOR. Et cela je peux vous le garantir. D’ailleurs, ce n’est pas maintenant qu’il pourrait avoir des défections en faveur d’Affi Nguessan.

Regardez les dernières élections législatives, C’est un indicateur clair pour tout observateur objectif et sérieux de la scène politique. Après dix (10) ans d’absence de toute élection, nous revenons et nous avons 18 députés et nous aurions pu en avoir plus, n’eurent été certaines erreurs techniques que nous avons commises.

Ce score est intervenu alors que le président Gbagbo était encore absent du pays et dans un contexte dans lequel nos cadres ont été asphyxiés financièrement pendant dix (10) ans les contraignant à laisser l’échiquier politique aux adversaires pendant dix ans. Ils reviennent et nous avons obtenu 18 députés à la première tentative. Maintenant que le président Laurent Gbagbo est rentré, auréolé de sa victoire à l’international et cela n’est pas sans répercussion et impact sur le peuple de Côte d’Ivoire.

Ce chiffre modeste s’explique aussi par le fait que le peuple n’avait pas foi au processus électoral et également par son découragement d’attendre le retour de Laurent Gbagbo et très peu y croyait encore. Maintenant que Laurent Gbagbo est arrivé, pensez-vous que c’est le moment pour eux d’aller à l’aventure ? Ah non !

La base du Front Populaire Ivoirien, je vous le dis est restée constante. Bien au contraire, ce sont les adhésions qui se multiplient. Chaque jour, ce sont les propositions de dénomination, les propositions de logo…  l’engouement est réel dans notre camp. Et comme tout a été mis à plat dans le cadre du nouveau parti, tout le monde veut être un acteur de ce moment historique de la Côte d’Ivoire. Je vous demande de la patience, lors de notre prochain congrès constitutif, vous verrez.

B24 : Le prochain parti que s’apprête à créer l’ex-président Laurent Gbagbo se fera avec ou pas l’ex-première dame Simone Gbagbo ?

D.A.P.: Mais vous cherchez des problèmes partout. Est-ce que la camarade et deuxième vice-président à une fois exprimé une quelconque opposition contre ce parti en constitution ?

La deuxième vice-présidente est partie intégrante de la création de ce nouveau parti. C’est une figure de proue du Front Populaire Ivoirien et elle a encore sa place au niveau de ce nouveau parti et nous souhaitons qu’il en soit ainsi.

B24 : Ce nouveau parti vise-t-il à positionner le président Laurent Gbagbo à la présidentielle de 2025 ?  

D.A.P.: Cela c’est notre affaire. 2025, c’est encore loin. Le congrès avisera.

B24 : Le président Laurent Gbagbo a 76 ans, en 2025 il en aura 80 ans. Les présidents Alassane Ouattara et Henri Konan Bédié auront respectivement en 2025, 84  et  91 ans. Certains observateurs et certains acteurs politiques dont Affi Nguessan et Jean-Louis Billon appellent au départ à la retraite de ces 3 personnalités parce que pour le dernier cité à partir 75 ans l’on n’est plus bon pour le service.   Quel est votre regard sur cette question ?

D.A.P.: Ce n’est pas à Jean-Louis Billon ou à Affi NGuessan de décider qui doit aller à la retraite sur le plan politique. Ils sont des citoyens comme tout le monde parce qu’au moment où ils pensent cela d’autres estiment que ces trois leaders peuvent encore servir la Côte d’Ivoire.

B24 : Objectivement Monsieur le Vice-président, pensez-vous qu’à plus de 75 ans l’on peut encore briguer un mandat de Président de la République ?

D.A.P.: Que dites-vous alors du Président américain, Joe Biden ? Il a 80 ans. Ne dirige-t-il pas la plus grande démocratie et la plus grande puissance du monde ? Quel est le problème ? Je veux comprendre. Voilà Lula Da Silva au Brésil qui revient. Il a pratiquement le même âge que Laurent Gbagbo. Qu’en est-t-l des Présidents ghanéen et nigérian ?

Ils sont tous de la même génération que Laurent Gbagbo mais ils dirigent correctement leurs pays respectifs. Ce que je veux dire est que ceux qui pensent qu’ils ont les aptitudes pour présider aux destinées de ce pays, personne ne leur fait ombrage encore moins un obstacle à briguer le suffrage des Ivoiriens. Par contre, il faut qu’ils laissent la latitude à ceux qui estiment être toujours aptes de briguer ce même suffrage. C’est le peuple qui apprécie. C’est au peuple de mettre des acteurs politiques à la retraite en désavouant leurs projets (…) et c’est cela la démocratie.

Même une éventuelle limitation d’âge pourrait entrainer d’autres problèmes car la loi dans sa conception doit être générale et impersonnelle. Ce sont-là des germes de conflit et de déstabilisation (…).

Laissons tout le monde aller solliciter le suffrage du peuple et il décidera. C’est le peuple qui est souverain.

B24 : Parlant de réconciliation, quelle est selon vous la solution miracle pour y arriver en Côte d’Ivoire ?

D.A.P.: D’abord, il ne faut pas politiser la réconciliation, c’est-à-dire ne pas l’instrumentaliser à des fins politiciennes. La réconciliation est au-delà de la politique politicienne parce qu’il s’agit de ramener la fraternité et la concorde entre les populations malgré leurs divergences politique, religieuse et idéologique.

Nous avons vécu dans ce pays en très bonne intelligence avec toutes les communautés  au point où elles s’embrassent les unes les autres. Il y a des mariages mixtes, le jeu des alliances interethniques qui a été complètement déstabilisé et détruit par la crise que nous avons connue.

Au nom de cette alliance, par exemple, un Sénoufo ne peut pas verser le sang d’un Wê ou d’un Yacouba et elle nous préservait de certaines dérives. En cela, je suis favorable pour une justice transitionnelle faite d’un melting pot entre ce qui s’est passé en Afrique du Sud et au Rwanda et ne pas forcément aller à la sanction puisque nous voulons aller à la réconciliation.

Il faut également dédommager les victimes ou leurs ayants-droits. Cela requière beaucoup de courage et un engagement sincère de tous les acteurs politiques mais en premier lieu le gouvernement, l’Etat et le parti au pouvoir qui doivent donner l’impulsion car s’il y a des moyens à débloquer, c’est l’Etat qui devrait le faire.

B24 : Votre dernier…

D.A.P.: Je me réjouis du passage de cette rédaction du Burkina Faso chez moi. Ce pays ami et frère. C’est l’occasion pour moi de m’insurger contre cette fausseté et cette manipulation tendant à faire croire qu’au cours de la gouvernance de Laurent Gbagbo au plus fort de la crise ivoirienne les Burkinabè étaient des cibles en Côte d’Ivoire.

Faire croire à un peuple qu’il a été stigmatisé. Pendant la gouvernance du Président Laurent Gbagbo, certains chefs d’Etat sont allés jusqu’à dire qu’en Côte d’Ivoire, les Burkinabè sont traités pire que pendant l’ère de la colonisation française. C’est de la désinformation et c’est dangereux.

Ils ont fait des montages vidéos et audios pour intoxiquer ce peuple frère du Burkina Faso pour lui faire croire l’invraisemblable. Mais les Burkinabè ont été et sont toujours chez eux en Côte d’Ivoire ici et nous les apprécions car c’est un peuple digne. Son histoire, sa tradition de lutte et sa culture font qu’en réalité, les Burkinabè ne peuvent pas rentrer en conflit avec la politique de Laurent Gbagbo qui s’est battu toute sa vie pour la dignité africaine. 

Je pense à Thomas Sankara avec qui nous avons une convergence de vue sur plusieurs questions relatives au panafricanisme et à la dignité de l’Africain.

Je m’insurge contre toute tentative visant à monter les peuples, les uns contre les autres.

Pour les peuples ivoiriens et burkinabè, il n’y a pas de destin viable dans lequel ils feront chemin séparé. Laurent Gbagbo en est tellement conscient qu’il a initié pendant sa gouvernance le Traité d’Amitié et de Coopération entre Abidjan et Ouagadougou. Voici un cas concret, malheureusement certaines personnes préfèrent inventer des confits pour en faire porter la paternité à un homme. C’est inacceptable. Et nous ne voulons plus servir de terreau de division entre ces deux peuples de la Côte d‘Ivoire et du Burkina Faso.

Nous avons de grands amis au Burkina Faso. À l’époque, lorsque nous militions à la Fédération Estudiantine et Scolaire de Côte d’Ivoire, FESCI, nous travaillions en étroite collaboration avec nos amis de l’UGEB. Il y a des liens forts entre ces deux peuples et personnes ne peut les déstabiliser d’ailleurs, le nouveau parti en création va renforcer les liens entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso. 

Nous sommes partisans de l’intégration et pour ce faire, notre projet de société s’intitule « Bâtir une Nation africaine (Socialiste, démocratique et prospère) en Côte d’Ivoire ». Cela traduit clairement que nous avons dépassé les frontières de nos micro-Etats.

Il nous faut aller vers de grands ensembles. Mais pour y arriver, il faut qu’au plan sous-régional, nous soyons parfaitement intégrés au risque de disparaître du fait de la pluralité des crises auxquelles nous ne pouvons y faire face en tant que micro-Etat. Est-ce possible d’avoir un tel projet et être xénophobe  au point de dire que le Malien, le Burkinabè, le Nigérian ne sont pas chez eux en Côte d’Ivoire ? Cela est tout à fait en contradiction avec notre idéologie.

Le président Laurent Gbagbo est quelqu’un de très cohérent et fidèle à ses principes que ce n’est pas juste de lui attribuer des faits dont il n’en est pas l’auteur. La preuve, toutes les accusations de xénophobie, tribalisme, crime contre l’humanité, … se sont effondrées à la Cour Pénale Internationale (CPI) et nous sommes persuadés que le peuple burkinabè y est très attentif.

Propos recueillis par Kouamé L.-Ph. Arnaud KOUAKOU

Correspondant de Burkina24 en Côte d’Ivoire 

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