Effets du changement climatique au Burkina Faso : L’herbe Maralfalfa, une solution pour le secteur agrosylvopastoral
Au Burkina Faso, 80% de la population vit de l’agriculture. Entre sècheresse récurrente et précipitations imprévisibles, le changement climatique menace gravement les moyens de subsistance. Pour y faire face, les acteurs du secteur agrosylvopastoral ont trouvé, parmi les moyens de résilience disponibles, le Maralfalfa, une espèce végétale fourragère qui produit jusqu’à 500 tonnes à l’hectare et qui résiste aux sécheresses.
Aujourd’hui, les défis liés à l’agriculture sont énormes. A côté de ces difficultés auxquelles les acteurs agrosylvopastoraux essaient de trouver une solution, il y a le changement climatique qui se manifeste par l’irrégularité des pluies, la mauvaise répartition des précipitations dans le temps et dans l’espace ainsi que le réchauffement.
Toutes choses qui impactent la pratique de l’agriculture censée pourtant nourrir son homme et contribuer au développement du pays. Les années se succèdent mais ne se ressemblent pas, a dit un agriculteur rencontré dans son champ de maïs dans la périphérie de Ouagadougou. Autour de lui, l’on pouvait apercevoir les tiges de maïs qui promettent une bonne récolte.
« Nous avons eu peur, mais à un moment donné, ma peur s’est dissipée et nous espérons que les choses continuent ainsi », a-t-il déclaré en référence à l’installation tardive de la saison pluvieuse. Selon lui, l’irrégularité des pluies dans le temps et dans l’espace devient inquiétante. En effet, non seulement l’hivernage s’est installé un peu tardivement presque en fin juillet mais aussi sa répartition est disproportionnée à travers le pays. C’est pourquoi il s’interroge sur une éventuelle solution.
Le Burkina Faso a adopté son premier Plan National d’Adaptation (PNA) en septembre 2015 afin de renforcer sa résilience face au changement climatique et de promouvoir l’intégration de l’adaptation dans les efforts nationaux de développement. Après cinq ans de mise en œuvre et selon les recommandations de la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), le PNA du Burkina Faso doit être revisité en vue de consolider les acquis et d’actualiser les informations.
C’est ainsi que le PNA a été révisé et le Burkina Faso envisage d’adopter une approche régionale pour mieux prendre en compte les spécificités de chaque région du pays en matière de vulnérabilité et d’options d’adaptation aux risques climatiques.
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C’est dans cette optique qu’avec le soutien financier du Réseau Mondial de PNA et sous la coordination du Secrétariat Permanent du Conseil National pour le Développement Durable (SP/CNDD), la Région du Plateau Central a été choisie comme région pilote pour la mise en place d’un Plan Régional d’Adaptation (PRA).
L’objectif global de ce PRA est de contribuer au développement durable de la Région du Plateau Central par la réduction de la vulnérabilité au changement climatique. Ce PRA devra permettre d’améliorer la résilience des secteurs de production et des populations locales les plus vulnérables au changement climatique et d’intégrer l’adaptation au changement climatique dans les politiques et plans de développement de la Région du Plateau Central.
Mécaniser l’agriculture et disponibiliser l’eau et l’énergie
« Pour arriver à transformer notre agriculture, nous devons changer notre vision vis-à-vis de l’agriculture », a fait savoir Richard Mone, ingénieur agronome. Il est un passionné de l’agriculture et de l’élevage. Nous l’avons rencontré dans sa ferme, où il a tenu à nous recevoir malgré son état de santé.
Nous faisant faire le tour du propriétaire, il nous a montré avec fierté son cheptel très varié, car composé d’espèces diverses. Mais, ce qui va attirer notre attention c’est cette herbe très grande et touffue, qui entoure la ferme. Sans hésiter, nous cherchons à savoir si cette herbe n’est pas nocive.
Avec un sourire en coin, il va calmement nous entretenir sur les aspects positifs de cette plante. Le Maralfalfa ou l’herbe à éléphant. C’est une plante fourragère, abondamment productive, très nourricière et bien prisée par les ruminants. Elle se reproduit par bouturage, explique-t-il.
Une solution adéquate au changement climatique
« Voici une herbe qui est destinée à nourrir les animaux et sa spécificité c’est qu’elle a un rendement en fourrage, et du fourrage frais », raconte M. Moné. « Sur un hectare, l’on peut récolter jusqu’à cinq cent (500) tonnes de fourrages par récolte et dans l’année l’on peut faire 5 récoltes », a fait savoir l’agronome Moné après une demi-heure de marche à explorer la ferme.
« Elle peut permettre à un producteur de lutter contre les effets du changement climatique. C’est une plante qui est pérenne et chaque fois que vous récoltez, ça repousse et vous pouvez faire un chiffre d’affaires en vendant de l’herbe de quarante-cinq (45) millions à quatre-vingt-dix (90) millions dans l’année car vous avez la possibilité de récolter chaque deux mois », confie-t-il.
Il poursuit en disant que c’est une herbe qui est également très facile à produire, car elle demande peu d’intrants. Quand les boutures sont plantées, il faut deux mois d’entretien du sol. Étant donné qu’à ce stade la plante n’est pas encore grande, il faut entretenir et enlever les mauvaises herbes. Il faut du fumier.
Mais une fois que ça devient une touffe, vous n’avez plus besoin d’efforts. C’est le Maralfalfa même qui s’occupe des autres herbes, produit des feuilles et du fumier. Plus besoin de pesticide ou d’engrais pour le produire. Cette plante n‘est pas attaquée par les insectes, c’est pourquoi il n’y a pas un besoin d’user de pesticide.
Opportunité d’améliorer les pratiques d’élevage
Il y a des pratiques d’élevage qui ne sont pas adaptées au changement climatique du fait de la rareté des pâturages. Le Maralfalfa est une aubaine. Vu que l’alimentation constitue la charge la plus élevée en élevage, Richard Moné, soutient que si l’éleveur lui-même arrive à produire son propre aliment de bétail, cela lui permettra aussi d’éviter les conflits entre éleveurs et agriculteurs.
Cette herbe pousse sur tous les types de sol, sauf si le sol est inondé. L’agronome affirme que la seule contrainte pour que cette herbe soit suffisamment profitable, c’est le manque d’eau. Pour ce faire, il préconise l’irrigation dans les zones où il n’y a pas suffisamment d’eau. « On peut la produire pendant la saison des pluies, faucher une grande partie et faire sécher le fourrage pour nourrir ses animaux le reste du temps », conseille-t-il aux éleveurs.
A l’en croire, le Maralfalfa, en tant qu’aliment de bétail, est très riche en protéine et en oligo-élément et idéale pour la production laitière et l’embauche bovine. L’herbe peut constituer 70% de l’aliment essentiel du bétail. Une théorie confirmée par l’étude du Projet régional d’appui au pastoralisme au Sahel phase2 Burkina Faso (PRAPS 2 BURKINA FASO).
L’agronome est convaincu que la mécanisation de l’agriculture permet d’atteindre l’autosuffisance alimentaire. Mais selon lui, il va falloir résoudre deux grands défis : l’énergie et l’eau.
« Quand vous avez ces deux facteurs que vous maitrisez, vous arrivez véritablement à produire, vous pouvez faire beaucoup de choses et votre agriculture ne pourra plus être tributaire des facteurs naturels et vous allez pouvoir produire en toute saison », a-t-il avancé. Et d’arguer qu’il est illusoire de produire pendant seulement trois mois et espérer s’en sortir qu’avec cela. Il convainc qu’il est possible de produire toute l’année.
L’agriculture, un métier et une source de revenus
« Les agriculteurs doivent d’abord réfléchir sur l’objectif qu’ils s’assignent pour avoir une forte rentabilité et un bon rendement », a expliqué Ricard Moné. Selon lui, on ne choisit pas ses exploitations végétales ou animales par hasard. On le fait en fonction des critères bien définis.
« Si je veux produire du maïs et avoir une bonne rentabilité, je dois choisir des variétés qui peuvent me permettre d’atteindre mes objectifs. Aussi je dois me former pour connaître, en plus des variétés, les techniques durables ; car la terre ne ment pas. En fonction de ce que vous lui donnez, il vous rendra, avec satisfaction ou pas », a-t-il préconisé.
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Pour lui, une bonne formation en technique agricole permet d’éviter l’utilisation abusive des pesticides qui dégradent l’environnement et nuisent à la santé humaine et animale. « Il y a également l’intégration stratégique des productions qui fait faire des économies d’échelles.
L’élevage pour produire du fumier permet de fertiliser votre champ et vous n’avez plus besoin d’acheter de l’engrais ; toutes choses qui ont un impact positif sur l’écosystème et l’environnement », a recommandé l’agronome.
Wakiyatou KOBRE
Pour Burkina 24
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