Agriculture au Burkina : A Falangountou, la saison «n’est pas bonne »

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 Les habitants de Falangountou (du nom de cette commune rurale que les autorités citent dans leurs discours lorsqu’elles parlent d’un village éloigné de la capitale Ouagadougou)  élèvent déjà en cette période de récoltes leurs voix pour « crier SOS ». Et pour cause, « les pluies ont coupé au moment où le mil était en épiaison » alors que « les gens ont mis de l’argent avec les labours, les charrues ».

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« N’eut été  la fraîcheur qui a pu accompagner, si son, on ne serait pas là », explique Maiga Seydou Beidari, président de Comité de gestion villageois (COGES). Il parle du peu que les femmes ont pu récolter après les caprices de dame nature.  Ibrahim Ag Alzouma, premier adjoint au maire de la commune rurale de Falagountou, observe la situation sur le terrain de passage.

La saison, affirme-t-il « n’est pas bonne » en raison des retards de pluies. Le résultat, « sur le terrain, les gens n’ont pas eu beaucoup ». 

Djingara Ibrahim a semé du sorgho comme d’habitude. Mais contrairement à « l’année passée (où) elle a eu jusqu’à 48 tas de sorgho, cette année, elle a eu 10 ». Elle pense déjà à la situation à laquelle elle fera face dès le début de l’an prochain. « Dans deux mois, d’ici janvier, ça va finir », projette-t-elle.

Djingara Ibrahim explique combien sa déception est grande à l’issue de cette saison hivernale © Burkina24/ Oui Koeta

Djingara Ibrahim n’est pas la seule à s’interroger sur ce qui adviendra dans les trois prochains mois. A peine a-t-elle fini d’évoquer sa situation, qu’une autre femme élève la voix pour partager la sienne. Elle aussi, comme d’habitude, a misé sur le sésame. Encore plus que l’an dernier. « J’ai cultivé du sésame. L’année dernière, j’ai eu 3 sacs de 100 kilogrammes. Cette année, je n’ai eu qu’un seul sac », égraine-t-elle.

A sa suite, Maiga Seydou Beidari a laissé tomber son rôle de traducteur pour évoquer son propre cas. « La saison a commencé. Nous, on a pensé qu’il y avait espoir. Il y a eu des pluies, mais ça n’a pas arrangé certains coins. L’année passée, j’ai cultivé, j’ai eu 60 bottes de mil. Cette année, j’ai eu 30 », confie-t-il. Tout comme Djingara Ibrahim, lui se projette déjà dans le futur proche. « D’ici février, c’est fini », assure-t-il. Actuellement, poursuit-il, il a « déjà anticipé en commençant à payer des sacs de mil » avant que les prix ne s’envolent.

Investissement à perte

Les populations de la commune sont certes habituées au caprice de la nature. Ce qu’ils déplorent cette fois, ce sont leurs investissement. En effet, cette autre productrice confie avoir misé « dans la charrue à 25 000 F CFA » alors qu’elle n’a « eu qu’un seul sac ».  Les femmes qui ont eu recours au service d’un détenteur de tracteur en sont à se mordre les doigts. Elles ont confié avoir misé « 25 000 F CFA dans le tracteur pour une heure » de labour.

La coordinatrice communale des femmes Maiga Bibata fait partie de celles-ci. « Nos terres sont dégradées. C’est les gens du Niger qui emmènent les machines tracteurs nous exploiter. Moi j’ai misé pour deux heures avec le tracteur, soit 50 000 F CFA. Je n’ai récolté que 40 boites de sésame. Une heure avec 25 000 F CFA. Leurs charrues à bœufs, c’est 10 000 F CFA l’heure », dit-elle.

Maiga Bibata, coordinatrice communale des femmes de Falangountou

« Le Sahel fait partie des zones où il y a l’agriculture »

En fin de semaine dernière, le président du Faso procédait à la remise de 500 tracteurs agricoles équipés, de 750 motopompes, de 100 motoculteurs au monde paysan à Bobo-Dioulasso. La remise de ce matériel de productions s’inscrit selon le chef du département agriculture dans l’axe 3 du Plan national de développement économique et social  (PNDES) qui est la dynamisation des secteurs porteurs.

Dans le cadre de programmes similaires de par le passé, les hommes ont bénéficié de charrues et « beaucoup » de femmes de charrettes, mais les agriculteurs et agricultrices de Falangountou ne voient toujours pas l’autre bout du tunnel. Le champ étant situé à environ 8 ou 10 kilomètres, « même si tu as gagné une charrue, si tu n’as pas de charrette, tu ne peux pas aller au champ », relève la coordinatrice communale des femmes, Maiga Bibata.

Abdoulaye Soura est le président du comité de contrôle citoyen du Sahel. Il n’a « pas l’information détaillée » sur la remise des tracteurs par le Chef de l’Etat. Partant du postulat que « tout le monde sait au niveau du ministère que le Sahel fait partie des zones où il y a l’agriculture », il fonde l’espoir que les premiers responsables du département aient pris la demande en provenance de la région en compte. .

« Très souvent entre le discours officiel et ce que le producteur dit, il y a vraiment un écart »

Avec la famine qui se profile à l’horizon, les spéculations vont déjà bon train. En effet, la boite de lait d’un kilogramme fait 175 francs contre 75 francs auparavant. « N’eut été les Bella, nos voisins du Niger qui nous emmènent ça, sinon, on ne peut pas payer », minimise Maiga Seydou Beidari.

Ousmane Diallo est responsable de la communication à Oxfam Burkina. Avec l’accompagnement technique de l’organisation, le Secrétariat permanent des organisations non gouvernementales (SPONG) et le Centre d’information, de formation et d’études sur le budget (CIFOEB)  œuvre depuis février 2016 au « renforcement du contrôle citoyen de l’action publique au Burkina Faso pour une redistribution des richesses nationales favorables aux populations rurales vulnérables » dans trois communes dans les régions du Sahel (Dori), du Centre-est (Tenkodogo) et du Centre-nord (Kaya).

Pour lui, l’organisation d’une caravane de presse est l’une des manières les plus sûres pour toucher du doigt la réalité en allant à la rencontre des producteurs en cette période de récoltes. Et pour cause : « très souvent entre le discours officiel habillé de données et ce que le producteur lui-même dit, il y a vraiment un écart. Au mois d’août, quand tu écoutes le ministre, il te dit que la saison est bien. Mais quand tu vas vers les producteurs, ils te disent que ça ne va pas. Donc, c’est bon d’aller vers ceux qui produisent. Eux ils te disent ce qu’ils pensent. Ce n’est pas l’Etat qui a dit. C’est eux-mêmes »

Oui Koueta

Burkina24

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Oui Koueta

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