Marathon du Sahel : Ils ont des propositions de solutions aux problèmes des Sahéliens
Ils sont encore quatre sur la piste pour décrocher le titre de Champion du Sahel avec à la clé le financement de 25 000 euros qui va avec. Mais deux d’entre eux représenteront le Burkina Faso à la finale du Marathon du Sahel à Bamako au Mali en septembre.
« Le marathon du Sahel, c’est une compétition internationale d’entreprenariat impulsée par la Banque mondiale et qui est mis en place au Burkina Faso par La Fabrique. La compétition a pour but de révéler les champions du Sahel, les entrepreneurs et les start-ups qui ont une portée régionale à fort impact », explique Jana Brahmia, bras droit à La Fabrique. Son job à elle, c’est d’accompagner tous ces entrepreneurs à passer à l’échelle et à réussir à lever des fonds pour rayonner et déployer leurs activités dans la région sahélienne.
Et les champions du pays des Hommes intègres, qui ne cachent pas leurs ambitions, espèrent chacun être de cette étape pour obtenir les fonds nécessaires à la mise à échelle de leur start-up créée pour soit offrir un logement décent, récupérer les terres dégradables, protéger contre l’anophèle femelle ou pour révolutionner l’alimentation humaine.
Le logement, en troisième pôle « après la famille et la religion »
L’explication à leur choix à chacun de se lancer dans l’entreprenariat est la même. Le « besoin est vraiment là ». L’ingénieur industriel Hassan Cédric Zoungrana a créé Building Strong and Fast (BSF) après avoir minutieusement observé la place qu’occupe le logement dans la vie de ses compatriotes. « Dans la grille des importances, le logement vient en troisième position après la famille et la religion. Au Burkina Faso, être un homme, c’est lorsqu’on a construit son logement, c’est lorsqu’on est devenu propriétaire », analyse-t-il.
Le lauréat de la compétition Burkina Start-up 2018 rentré au pays il y a deux ans a en effet été témoin de la campagne de souscription lancée par le gouvernement burkinabè en 2016 et qui a connu plus de 100 000 souscriptions. Avec son bloc autobloquant (aucun besoin de joints horizontaux ou verticaux), composé à 90% de matériaux locaux faits à base de latérite stabilisée au ciment, BSF propose à sa clientèle d’économiser environ 30%.
Avec sa technique permettant de construire des « bâtiments frais », ce qui induit « une réduction de la facture d’électricité parce qu’il y a moins de consommation au niveau de la ventilation et de la climatisation », BSF (30 employés dont 10 permanents) évalue les économies de sa clientèle à 30% comparativement à un logement construit à base de brique en ciment et en sable. « Un bâtiment construit par un promoteur immobilier équivaut à environ 220 000 F CFA le mètre carré. Avec nos blocs, on peut ramener ce prix à 165 000 F CFA le mètre carré », vante M. Zoungrana.
« REVITALIZer » les déchets organiques et sauvegarder nos sols
De son côté avec REVITALIZ, Aimé Kaboré et son co-fondateur proposent un procédé autre que le compostage qui « malheureusement consomme excessivement de l’eau – pratiquement 216 litres pour une seule tonne » pour sauver nos sols et protéger nos ressources. Chaque année, évalue le jeune startupper, 150 000 hectares sont « pratiquement » perdus. « Ce qui représente un manque à gagner de près de 120 000 tonnes de céréales. Avec 120 000 tonnes, nous nourrissons selon la FAO environ 630 000 personnes », déduit-il.
En attendant l’atteinte de la promesse électorale zéro corvée d’eau par le président Roch Kaboré et pour ne pas en rajouter à la voracité en biomasse du procédé de compostage proposé par le ministère de l’agriculture, les deux entrepreneurs proposent de « transformer n’importe quel déchet organique en matière concentrée » au profit des agriculteurs.
« Nous sommes entourés dans notre vie quotidienne de déchets. Dans nos maisons, dans les entreprises. Rien que la ville de Ouaga produit pratiquement 300 000 tonnes de déchets organiques chaque année. Ça c’est ce qu’on a quantifié. Les agro-industries rejettent énormément de déchets », observe Aimé Kaboré. Il a pour référence celles installées dans la ville de Orodara « ville aux mangues » où « on a pratiquement 12 000 tonnes de mangues qui sont rejetées chaque année ».
Alors, pourquoi ne pas transformer ces déchets en matière première pour produire de l’engrais ? se sont interrogés les deux promoteurs. Ça c’était avant la mise en place de REVITALIZ qui a été « primé plusieurs fois ». La dernière fois, c’était pendant la compétition de Total start-up 2019.
« On a trouvé une solution. C’est Maïa »
Gérard Niyondiko a créé et continue d’améliorer un savon (Faso Soap) et une pommade (Maïa) tous des anti-moustiques. Il s’est basé sur ce geste quotidien des mamans africaines. Celui qui consiste à pommader leur enfant après leur avoir fait prendre leur bain. « Ces enfants peu importe la saison, ils reçoivent une douche le soir et un produit de soin. Et à 80%, c’est une pommade à base de beurre de karité. On s’est dit, il y a quelque chose à faire avec. Protéger sans changer leurs habitudes ».
Il ne perd pas de vue non plus les habitudes des populations auxquelles l’Etat distribue annuellement des moustiquaires imprégnées. « Le grand problème qu’on a avec les solutions qu’on a, dit-il, c’est que ce sont des solutions nouvelles qui ne rentrent pas dans le quotidien de la population ». Ce qu’il a pu vérifier en demandant à l’assistance « Qui dort sous moustiquaires ? ».
Résultat mitigé. Quelques personnes, loin de la moitié, lèveront leur main. « Dans la salle plus de 60% qui n’utilisent pas de moustiquaires bien que nos gouvernements mettent l’accent là-dessus. C’est mal utilisé. On a trouvé une solution. C’est Maïa. Une pommade à base de beurre de karité qui sent très bon. Mais en plus qui va permettre d’être protégé plus de 5 heures ».
Après la phase de test au laboratoire national de santé publique, Gérard Niyondiko et Franck Langevin passent à l’échelle supérieure avec Maïa. Ils sont actuellement dans le processus d’homologation par l’OMS pour que ce produit puisse être accepté comme un autre produit de lutte antivectorielle. « Cela nous permettra de toucher des ONGs, des agences onusiennes afin que ça puisse être utilisé partout », se projette l’inventeur.
Les insectes pour révolutionner notre alimentation
Kahitouo Hien transforme, lui, les insectes en sources de protéine. Déjà étudiant en biochimie, cet originaire de l’Ouest du pays qui connaissait déjà l’engouement autour des chenilles, a compris combien elles étaient riches en protéines. Il entreprendra fin 2014 d’industrialiser la filière.
FasoPro voit ainsi le jour. Incubée à partir de décembre 2014 à La Fabrique, le jeune entrepreneur diversifiera sa gamme de produits en y ajoutant les gâteaux, et la poudre à chenilles. Le biochimiste qui, jusqu’ici s’approvisionne dans la nature, pense à sécuriser sa production de chenilles.
« On ne pourra pas être viable si on se contente seulement de la collecte dans la nature surtout avec ces changements climatiques qui nous réservent souvent des surprises désagréables ». Tout comme les trois autres startuppers, lui aussi espère obtenir le financement nécessaire pour s’adonner à la « domestication » des chenilles à travers lesquelles il veut révolutionner l’alimentation dans le Sahel.
Leur but à tous: répondre aux « besoins » des Sahéliens
« C’est bien de savoir qu’il y a des jeunes qui ne se contentent plus de ce que l’Etat nous offre, de ce que le gouvernement nous a promis et qu’il n’arrive pas à faire et qu’ils développent des initiatives pour développer le Burkina et la sous-région tant dans l’agriculture, l’élevage, les BTP parce ce qu’ils sont en train en train de faire des choses formidables », apprécie Zongo Rosine.
Dipama Kévin, entrepreneur, porteur d’un projet est en incubation à La Fabrique. Après avoir observé que leur entourage ne consommait plus de bouillons, les deux amis d’enfance se sont mis en tête de proposer une solution alternative à base d’épices naturelles localement recueillies. L’offre alternative de Kader et Kévin donne MATA.
L’incubé note que la sélection, « ce sont des projets qui ont beaucoup d’avenir, qui ont des impacts sociaux très positifs » qui aideront à développer l’économie locale. Et pour cause, « cela répond à un besoin qui est vraiment là ».
Rendez-vous est pris pour septembre à Bamako pour savoir qui des quatre startuppers du Burkina Faso sera sacré Champion du Sahel à l’issue de la confrontation d’avec les participants de la Guinée, du Mali, de la Mauritanie du Niger, du Sénégal et du Tchad.
Oui Koueta
Burkina24
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