Les médias devraient-ils montrer les photos des auteurs d’actes de terreur ?
La publication de photos des victimes ou des auteurs d’attaques terroristes par des médias ou des internautes a fait couler beaucoup d’encre et a été marquée par des vives critiques sur les réseaux sociaux. Question d’éviter des imitations et de reprises desdits actes de terreur par d’éventuels déséquilibrés et d’individus présentant des signaux d’extrême détresse psychologique, le journal « Le Monde » veut changer sa manière de couvrir les attaques terroristes en se focalisant plus sur les victimes et leurs familles qu’à leurs auteurs. Une décision que Robert Kahr, expert en communication de l’académie de la police de Münster en Allemagne juge salutaire. Il a accordé une interview (anglais) à la Deutsche Welle dont nous vous proposons ici une synthèse.
« Le terrorisme est une stratégie de communication »
L’expert en communication dénomme deux types de terrorisme. Celui motivé par des actes politiques et celui commis par des individus agissant à leur propre compte, donc pour eux-mêmes.
S’agissant de ceux qui agissent par eux-mêmes, les campagnes de Le Monde, commente l’expert, envoient le message selon lequel « si tu veux agir comme (les précédents auteurs d’attaques), tu n’auras pas droit à la célébrité et à la publicité ». Et cela juge Robert Kahr peut être d’un « aspect très constructif ».
Par contre, ceux qui sont motivés par des décisions politiques, dit-il, ne peuvent pas être dissuadés par le fait de « rapporter moins » les faits. Selon Robert Kahr, cela contribue plus à enrayer le succès de leur message.
« Le terrorisme est une stratégie de communication. Cela signifie que je fais quelque chose de vraiment mauvais pour attirer l’attention sur moi-même et ensuite envoyer un message », affirme l’expert.
A la question de savoir si la manière de rapporter les actes de terreur doit être complètement changée, l’expert est plutôt dubitatif. C’est totalement impossible dit-il. Evidemment souligne Robert Kahr, les faits doivent être rapportés pour bien de raisons.
Notamment parce qu’il y aura des gens blessés et tués et que l’appareil sécuritaire sera affecté. Pour toutes ces raisons, dit-il, « il est vraiment important d’en parler pour que les gens puissent se faire une opinion. Mais, continue-t-il, la manière dont il faut en parler, est quelque chose qui doit être travaillé intensivement et c’est ce que Le Monde a choisi de faire en retenant les photos des terroristes et leurs matériels de propagande ».
Réduire considérablement le live sur les attaques, qui contient souvent de la spéculation
Malheureusement, note l’expert, le live conduit à de fausses scènes de crimes, ce qui crée de faux auteurs et une peur publique massive. Répandre des rumeurs est hautement problématique, dit-il.
A quoi devrait ressembler la politique de communication de la police ?
« La police devrait et doit communiquer de manière proactive en temps de crise », affirme l’expert. Robert Kahr préconise qu’elle assure le calme et la fiabilité avec un œil attentif sur le flot d’informations. La police, ajoute-t-il, peut partager l’information lorsqu’elle est fiable. « Mais, précise-t-il, cela doit être fait rapidement et avec des annonces claires. Les gens désirent la transparence et la fiabilité ». C’est pourquoi, par exemple, souligne Robert Kahr, un bon nombre de départements de police ont des comptes Facebook.
Dans quelle mesure rapporter les actes de terrorisme cause plus de mal que de bien ?
L’expert pense que cela ne peut être vraiment une question dans une société libre et démocratique. De toute évidence, dit-il, cela doit être rapporté et ce quel que soit le bon ou le mauvais côté de la question.
Se focaliser plus sur les victimes
« Néanmoins, souligne Robert Kahr, il y a un tas d’approches que les medias peuvent utiliser pour reporter d’une meilleure manière et plus constructive. Dans cet ordre, la décision de Le Monde est une des plus souhaitables. Les reportages devraient être moins focalisés sur les auteurs d’attaques et plus sur les personnes qui ont souffert des attaques terroristes, qui ont perdu leurs proches ou qui ont été elles-mêmes blessées. Celles-ci, conclut l’expert, sont celles pour lesquelles, nous devons avoir plus d’attention ».
Robert Kahr est un expert en communication à l’académie de police de Münster. Il a travaillé trois ans durant avec son collègue Frank Robertz sur le livre « The Media Presentation of Chaos and Terrorism. »
Synthèse de Oui Koueta
Burkina24
Source : dw.com
Nous tenons à vous exprimer notre gratitude pour l'intérêt que vous portez à notre média. Vous pouvez désormais suivre notre chaîne WhatsApp en cliquant sur : Suivre la chaine
Restez connectés pour toutes les dernières informations !
Restez connectés pour toutes les dernières informations !