Insurrection populaire : Au politique de « canaliser l’énergie de la contestation en énergie de la construction »
Quatre ans se sont écoulés depuis ce jour fatidique de la démission du président Blaise Compaoré et son exfiltration par la France avec pour destination Abidjan en Côte d’Ivoire. Quatre ans, les velléités autour de la paternité des auteurs et acteurs de l’insurrection fait son petit bonhomme de chemin avec des commémorations en rang dispersés. Mais quatre ans après, le porte-voix du Balai Citoyen, qui a « vu des jeunes qui n’avaient pas peur quand les militaires ont commencé à tirer » en se dressant en haies devant les leaders de la manifestation, estime qu’il est à présent du devoir de l’exécutif de « canaliser l’énergie de la contestation en énergie de la construction ».
La cérémonie d’hommage a été présidée par le chef de l’Etat ce matin du 31 octobre 2018, date anniversaire de l’abandon du pouvoir par le président Blaise Compaoré. Depuis lors, des acteurs présents sur la scène publique se posent en auteurs, en acteurs ou en instigateur de l’insurrection du peuple. Ce quatrième anniversaire a été l’occasion pour le président Kaboré de trancher après le dépôt de gerbes au monument des héros nationaux. « Personne ne peut dire que l’insurrection est de son fait. C’est l’ensemble des composants de ce peuple qui se sont mises debout », a déclaré le chef de l’Etat.
Vingt et huit (28) Burkinabè sont tombés pendant les événements de fin octobre 2014 qui ont mis fin au règne de vingt-sept (27) de Blaise Compaoré et quatorze autres lors de la résistance au coup d’Etat avec pour finalité son retour aux affaires par sa garde prétorienne. En mémoire de ces martyrs qui « ne se sont pas battus pour être des ministres ni pour être des députés, des maires ni pour obtenir n’importe quel poste (…) il était tout à fait normal que nous choisissions une date pour commémorer l’ensemble de ces héros nationaux qui se sont battus pour la démocratie », a justifié le chef de l’Etat.
Le souvenir des martyrs de l’insurrection ne nous quittera pas.
Nous les portons dans nos prières et nous tenons aux côtés de leurs familles.
L’Etat respectera tous les engagements pris à l’endroit des familles et de tous les blessés d’octobre 2014.#BurkinaFaso #lwili pic.twitter.com/OrtZn4NEOv— Roch KABORE (@rochkaborepf) October 31, 2018
Pendant qu’il effectuait le dépôt d’une gerbe de fleurs en leur mémoire à l’autre bout de la ville à quelques encablures de la présidence, une autre marche-meeting était organisée au centre-ville par une dizaine d’organisations de la société civile avec au premier plan le Mouvement burkinabè des droits de l’Homme et des peuples (MBDHP). Une situation que déplore le chef de l’Etat. « Toutes les dates historiques de notre pays n’ont pas à faire l’objet de politique politicienne » a-t-il dit avant d’insister sur la nécessité de surseoir à ce type célébration en rang dispersée au nom de la cohésion en ce jour de « reconnaissance vis-à-vis de ces héros ».
« Il y a de la ressource dans ce pays pour procéder au changement »
Un avis partagé par le député du PDS-Metba et maire de la commune de Dori, Aziz Diallo. Lui aussi juge important de commémorer, de rendre hommage aux martyrs tombés pour la patrie. En cette date anniversaire, « C’est important que la patrie se halte pour leur rendre hommage » en souvenir de ces « périodes très difficiles » mais aussi de « réfléchir à la situation de notre pays, à l’état de notre nation ».
Pour Me Hervé Kam, porte-parole du Balai Citoyen, l’organisation qui a su mobiliser les jeunes pour faire échouer la tentative de modification de la Constitution de même que le putsch de septembre 2015, la commémoration sied. Et le 31 octobre est l’occasion de s’arrêter pour rendre un hommage à « ceux qui ont eu le malheur de tomber ces jours-là » et de soutenir certains blessés qui traînent toujours les stigmates de la résistance du peuple.
« Un Etat ou des hommes qui n’ont pas la mémoire n’ont aucun avenir. On ne peut pas oublier ces jours-là et cette commémoration. C’est une occasion unique dans l’année où nous devons pouvoir taire toutes nos querelles, toutes nos critiques pour nous rappeler d’où on vient et pour mieux savoir où on va », dit-il.
Entre là d’où l’on vient (vérité) et où l’on va (réconciliation), il y a la justice. Et elle n’est pas à occulter parce que son absence a, en partie, précipité les événements. En référence au Rwanda d’après génocide qui est passé par là, « il faut nécessairement que nous sachions qui a fait quoi et que la justice soit dite. Et après cela, nous parlons de réconciliation parce que le pays a besoin de tous ces fils », pose Bachir Ismael Ouédraogo, ministre de l’énergie.
Pouahoulabou PK Victor, président de l’union des parents des martyrs de l’insurrection populaire se dit « toujours choqué » quatre ans après la perte que sa famille a subi. Et la douleur est encore vive à son niveau. « C’est comme si c’est maintenant qu’ils venaient de tomber », décrit-il.
Néanmoins, apprécie-t-il, « ce qui nous a réconforté un peu, c’est le monde qui est venu accompagner ces martyrs encore une fois » avec en tête le « chef de l’Etat, lui-même qui était devant pour déposer les gerbes de fleurs ». Cela lui a apporté du baume au cœur. « On est très contents et nous espérons bien que plus rien ne va arriver encore au Burkina de cette façon ».
« Si des gens sont prêts à mourir, c’est qu’ils sont prêts à travailler »
« Témoin de cet engagement des jeunes (qui) étaient prêts à mourir pour que la lutte continue », le porte-parole du Balai Citoyen partage à présent son souhait, celui de voir « que tous les Burkinabè aujourd’hui, notamment les hommes politiques même s’ils n’ont pas été proches des événements, même ceux qui en ont été victimes, se rappellent que ce jour-là, il y a quelque chose d’extrêmement important qui s’est passé ».
Avec le recul, le doute ne traverse plus son esprit. Au vu ce « cet engagement, il y a, dit-il, de la ressource dans ce pays pour procéder au changement » car « si des gens sont prêts à mourir, argumente-il, c’est qu’ils sont prêts à travailler ». A présent, oriente-il, « il appartient au politique de canaliser cette énergie qu’on a vu du 21 octobre au 31 octobre 2014 en énergie constructrice, de changer l’énergie de la contestation en énergie de la construction ».
Oui Koueta
Burkina24
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