Déguerpissement à Kuinima : Le domicile du chef de village saccagé par des déguerpis
Initialement prévue pour le 20 décembre 2018, l’opération de démolition des habitats et jardins illégalement érigés depuis des dizaines d’années au quartier Kuinima à Bobo-Dioulasso a eu lieu le lundi 4 février 2019 pour des raisons sécuritaires. Remontés contre le chef dudit village qu’ils accusent de n’avoir pas plaidé pour leur sort, des déguerpis s’ont sont pris au domicile de ce dernier qui vient grossir le nombre des sinistrés.
Les exploitants d’une partie du domaine du Camp militaire Ouezzin Coulibaly, situé dans l’arrondissement numéro 6 de la ville de Bobo-Dioulasso, se souviendront amèrement de cette journée du lundi 4 février 2019. Jour marquant leur déguerpissement qui de son domicile, qui de son site d’exploitation agricole.
«La situation est dramatique. On aurait dû nous prévenir dès le début. Ce n’est que des mois plus tôt qu’ils ont informé la population que le domaine appartient au camp militaire. Alors que le non loti l’est là depuis plus de 40 ans. On n’a jamais su que ça fait partie du camp militaire », affirme LS.
Tout comme lui, les malheureux du jour se seraient contentés de sites de relogement, meme situés à des dizaines de kilomètres de là. Mais en lieu et place d’une éventuelle solidarité, « nous avons été chassés comme des animaux sans que les autorités ne daignent trouver un site d’accueil pour nous. A l’allure où vont les choses, c’est Allah qui va nous venger », se plaignent-ils.
« 135 enfants dans la rue, cela peut provoquer l’irréparable »
Initialement prévue pour le 20 décembre passé, l’exécution de cette mesure, selon un communiqué signé à la date du jeudi 24 janvier 2019 par le maire de l’Arrondissement numéro 6 Hyppolite Sittlé Sanou, avait été reportée à la demande des autorités religieuses. « La décision de déguerpir tous les occupants (des habitats spontanés et jardins) illégalement installés dans le domaine du camp Ouezzin Coulibaly répond à un besoin sécuritaire », précise ledit communiqué qui demandait aux personnes concernées de quitter les lieux au plus tard le 31 janvier 2019.
Qu’à cela ne tienne, les victimes de cette mesure sécuritaire le vivent très mal. Surtout l’artiste Mathieu Ouattara et ses centaines d’ « enfants récupérés ». Ne sachant ni lire ni écrire, son rêve d’épargner la douleur de l’analphabétisme à de nombreux jeunes de la ville de Bobo-Dioulasso semble s’arrêter au moment où les Caterpillars ont commencé à démolir son établissement scolaire.
Depuis 2011, ce temple du savoir, qui offrait une deuxième chance aux jeunes démunis, a fait plus de 50 admis au Certificat d’étude primaire (CEP).
Et ce grâce au soutien d’amis français. « Ça marchait bien jusqu’à ce que tout soit démoli aujourd’hui. Maintenant, on ne sait plus où partir, nous sommes dans la rue, les enfants et moi. Que le gouvernement sache que nous sommes des Burkinabè. Si nous ne pouvons pas vivre ici, c’est où ils veulent qu’on aille vivre ? Le Gouvernement n’a qu’à faire attention car à l’allure où vont les choses, ce n’est pas bon. De telles douleurs peuvent amener les gens à commettre l’irréparable », conclut-il.
Sur les ruines de sa concession, une dame fond aussitôt en larmes à l’approche du micro : « Les mots me manquent. Ils sont d’ailleurs trop faibles pour exprimer ce que je ressens ».
Un sinistre qui finit par affecter le chef du village
Tous désemparés, des déguerpis, furieux de « l’indifférence » du chef du village, s’en sont pris à son domicile. Au moment où ces lignes sont tracées, le patriarche et sa famille ont dû quitter les lieux saccagés par les manifestants. Pire, sa famille craint pour sa sécurité.
C’est la deuxième fois que la ville de Bobo-Dioulasso fait face à une opération de démolition d’installations anarchiques en l’espace de deux mois.
Aminata SANOU
Correspondante de Burkina 24 à Bobo-Dioulasso
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