Moussa MARA, ancien Premier ministre malien: « Cet accord constitue une très bonne base pour la paix»
Le Mali a connu au cours des premiers jours d’Août 2015, un regain de violence avec principalement la prise d’otage à l’hôtel Byblos de Sévaré, dans le centre du Mali, où des djihadistes présumés ont pris en otage un Ukrainien et des agents de la Minusma. Burkina24 a rencontré Moussa MARA, leader du parti politique « YELEMA, le changement » et ancien Premier Ministre du Président IBK. Avec lui nous abordons la question de la situation sécuritaire au Mali et l’accord de Paix d’Alger signé le 15 mai dernier à Bamako. Interview exclusive.
Burkina24 : Suite aux récentes attaques djihadistes dans le nord du Mali, votre pays, est-il juste de penser que l’accord d’Alger est en danger ?
Moussa MARA : Tout le monde n’a pas intérêt à la paix, notamment les terroristes et les trafiquants de drogue qui feront tout pour que l’accord ne puisse pas être correctement appliqué et que les Maliens ne se réconcilient pas car cela signifierait la fin de leur quiétude et de leurs activités illicites et destructrices pour notre pays et le Sahel. L’accord ne sera jamais en danger si les Maliens se donnent la main pour faire halte à ces vendeurs de morts.
Burkina24 : Pourquoi, selon vous, la mise en application des accords d’Alger traîne depuis sa signature par le gouvernement malien et les rebelles ?
Moussa MARA : Il est vrai qu’on aurait pu aller plus vite. Cependant des progrès ont été accomplis. Le comité de suivi de l’accord s’est réuni plusieurs fois et a pu adopter son règlement intérieur. Le 22 août prochain il travaillera sur le chronogramme de mise en œuvre de l’accord.
Espérons qu’à partir de là, on pourra engager des mesures urgentes sur les plans sécuritaires (cantonnement, désarmement…), humanitaires et de réconciliation (retour des réfugiés notamment) ainsi que les actions de développement. Concernant ce dernier chapitre, la mission internationale d’évaluation des besoins de développement travaille depuis deux mois et ses résultats feront l’objet d’une table ronde internationale à Paris le 22 octobre à l’effet de trouver des financements pour engager ces chantiers.
Au niveau interne, le Gouvernement a mis en place une instance de coordination et de soutien à la mise en œuvre des actions de l’accord, notamment sur les plans institutionnels et de gouvernance. Il faut également savoir que la collaboration sur le terrain sécuritaire à travers des missions de patrouilles se met en place doucement. Par conséquent, on peut mieux faire mais on n’est pas statique.
Burkina24 : Estimez-vous que cet accord de paix comporte des limites ?
Moussa MARA : Aucun accord n’est parfait mais cet accord, je l’ai dit plusieurs fois, constitue une très bonne base pour faire la paix, traiter des questions de fond qui ont entraîné des difficultés au nord de notre pays, restructurer notre appareil sécuritaire et créer ainsi les fondements d’un Etat de nouveau en mesure de faire face à ses obligations.
Si on l’applique dans la lettre mais surtout dans l’esprit, avec bonne foi, il y a de bonnes chances que le Mali retrouve de nouveau de bons espoirs vers demain.
Burkina24 : Quelles sont vos solutions concrètes pour une pacification totale du Mali ?
Moussa MARA : D’abord, une forte volonté de l’Etat d’agir dans le cadre d’une vision d’un Mali fondé sur un Etat moderne, efficace, travaillant au mieux avec toutes les composantes de la société et respectueuse de leurs diversités. Cet Etat qui se reformera de manière approfondie pour servir le citoyen et lui donner les opportunités en bien être individuel et collectif.
Cet Etat aura comme colonne vertébrale une armée et des forces de sécurité à l’image des composantes de la nation, équipée et gérées de manière appropriée. L’accord de paix est une étape de cette reconstruction qui doit se faire sous l’égide de l’Etat et avec le soutien de la communauté internationale.
Avec plusieurs années d’actions résolues dans le sens de la paix fondée sur des reformes, le redressement des forces de sécurité, un processus de dialogue et de réconciliation véritables, une justice qui mettra fin à l’impunité et surtout des initiatives de création de richesses, on pourrait obtenir cette pacification. Cela prendra du temps. Mais avec de la vision et de la résolution on pourrait y arriver. L’essentiel est encore entre les mains de l’Etat malien.
Burkina24 : En fin d’entretien, nous souhaiterons savoir si vous vous porterez candidat aux prochaines élections présidentielles dans votre pays le Mali ?
Moussa MARA : Il y a eu des élections présidentielles en 2013, à l’issue desquelles Monsieur Ibrahim Boubacar KEITA a été triomphalement élu pour un mandat de cinq ans. Il en est à deux ans. Il reste encore trois ans. Ce qui m’importe aujourd’hui est de contribuer à ce que le mandat du chef de l’Etat soit réussi.
En tant que membre de la majorité présidentielle, c’est notre objectif. Pour ma part, je vais briguer la Mairie du district de Bamako à l’occasion des prochaines élections municipales. A chaque jour suffit sa peine.
Entretien réalisé par Kouamé L.-Ph. Arnaud KOUAKOU
Burkina24
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