Justice: accusée de sorcellerie et exclue, une femme obtient réparation.
L’exclusion et la violence envers les femmes pour sorcellerie a encore la peau dure au Burkina. Mais de plus en plus, les victimes peuvent obtenir réparation en Justice. C’est le cas de cette dame, N.D, accusée, violentée et socialement exclue pour sorcellerie, qui a obtenu gain de cause en Justice, encouragée et conseillée par la Commission épiscopale « Justice et paix ».
Les faits remontent à courant octobre 2009. Le fils de R.D meurt. Quatre femmes sont soupçonnées de sorcellerie, dont N.D, la tante de l’enfant, et d’en avoir « mangé l’âme ». On les soumet alors à un « détecteur de sorcières », Koudaogo. Ce dernier leur fera boire des potions. Trois femmes tombent, sauf N.D. On doublera sa dose de potions et lui assènera un coup de machette au pied gauche. N.D finira elle aussi par tomber. Elle est reconnue coupable de sorcellerie.
La perte de trois orteils
N’étant pas lucide, R.D la raccompagne chez elle sur une moto. Les pieds de N.D vont être brûlés par le tuyau d’échappement. R.D la met dehors. Elle trouve refuge au Centre Delwendé de Tanghin. L’infirmier tente le tout pour le tout pour sauver la jambe de N.D. Il réussira. Mais N.D perdra trois orteils.
Sur les conseils et les encouragements de la CJP, N.D pose plainte en justice pour diffamation et coups et blessures volontaires. La CJP la soutient avec un avocat, Me Batibié Benao, dépêché par le Syndicat national des avocats du Faso (SYNAF), dont il est d’ailleurs le président. Après plusieurs renvois, le Tribunal de grand instance (TGI) de Yako a fini par condamner R.D pour coups et blessures volontaires, avec trois de ses complices, et à payer des dommages et intérêts à N.D.
Civilement morte de fait
C’est ce qu’a expliqué à la presse, Gérard Zongo, le responsable du projet de lutte contre l’exclusion sociale et les violences envers les femmes accusées de sorcellerie de la CJP. Un autre dossier du même genre est actuellement pendant devant le TGI de Ouagadougou et deux autres ont vu leur dénouement.
Me Batibié Benao, appuyé par Gérard Zongo, a demandé que l’Etat s’implique un peu plus dans cette lutte car l’exclusion sociale a de graves conséquences sur ces femmes. « N.D a cinq enfants et un mari. Mais de fait, elle n’a ni enfant ni époux ; de fait, elle est civilement morte », a-t-il expliqué. « Au centre, elles sont 310 et elles n’ont que ces seuls mots à la bouche : Et nos enfants, que deviennent-ils ? » a ajouté Sœur Maria, la directrice du Centre Delwendé de Tanghin.
« La justice traditionnelle a été supprimée depuis 1960 ; il n’est plus normal qu’il y ait une justice qui marche en marge de la Justice républicaine », a terminé Me Benao.
Adopter une pensionnaire
Le Centre Délwendé organise ce samedi 25 février 2012 en sein, la 2e édition de la journée de solidarité. L’activité phare de cette journée sera la possibilité pour ceux qui le veulent d’adopter l’une des pensionnaires du centre. « Vous devenez son fils ou sa fille adoptive et elle, votre mère adoptive ; vous pourrez ensuite de temps en temps lui rendre visite », a expliqué Sœur Maria. Elle continuera : « Il y a des pensionnaires qui ont voulu se suicider, pas à cause de la nourriture, mais parce qu’elles n’ont plus de vie sociale… ». Cette journée a pour but de contribuer à réduire cette carence affective.
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