Avant-projet de Constitution au Burkina : 10 points à savoir
Les membres de la Commission constitutionnelle ont terminé leur travail. Ils ont concocté un avant-projet de Constitution qui sera soumis aux observations des assises régionales. Le document a été déjà divulgué via les réseaux sociaux par certains membres de la Commission. En attendant la publication par voix officielle, voici, entre autres points, 10 éléments majeurs à noter dans ce premier « brouillon » dévoilé aux Burkinabè.
L’intégralité de l’avant-projet : Télécharger
1 – La constitutionnalisation des droits sociaux
C’était la bataille de nombreuses organisations de la société civile et leur doléance a été prise en compte. Certains droits sociaux, comme l’accès à l’eau potable et à l’assainissement, la santé, et le logement décent ont été constitutionnalisés. Du moins, dans l’avant-projet, à l’article 29.
2 – Plus de pleine de mort
L’article 5 alinéa 2 est formel : « Nul ne peut être condamné à la peine de mort ». Le sujet a fait débat au sein de l’opinion nationale. Les membres de la Commission ont tranché. Il reste à savoir ce qu’en penseront les assises.
3 – Pas de droit à l’insurrection
Non, le droit à l’insurrection populaire ne sera pas constitutionnalisé, si cette mouture passe au référendum. L’article 49 reconduit juste le droit à la désobéissance civile. On peut en effet lire dans le document que : « La source de toute légitimité découle de la présente constitution. Tout pouvoir qui ne tire pas sa source de cette constitution, notamment celui issu d’un changement anticonstitutionnel de gouvernement, est illégal. Dans ce cas, le droit à la désobéissance civile est reconnu à tous les citoyens ».
4 – La haute trahison, qu’est-ce que c’est ?
L’ancien Président du Faso Blaise Compaoré ne sera pas jugé par la Haute cour de justice pour haute trahison. La raison invoquée par le procureur était que le législateur n’avait pas précisé en quoi cela consistait.
L’article 50, lui, se veut plus clair : « La responsabilité personnelle du Président du Faso n’est engagée qu’en cas de haute trahison. Il y a haute trahison lorsque le Président du Faso viole gravement la Constitution, porte atteinte à la forme républicaine de l’Etat, aux institutions démocratiques et au principe de l’alternance. Elle est constatée en dernier ressort par la Cour constitutionnelle ».
5- La justice indépendante, mais le Président n’est pas loin
Les yeux étaient rivés sur le sort qui sera réservé aux acquis du monde judiciaire sous la Transition. L’avant-projet garde le président du Faso loin de la présidence du Conseil supérieur de la magistrature (CSM). L’article 147 affirme que « le pouvoir judiciaire est indépendant« .
Néanmoins, le Chef de l’Etat reste le « garant de l’indépendance de la justice » et de ce fait, préside une rencontre ordinaire au mois de novembre avec les membres du CSM et une autre extraordinaire, selon le besoin. Cette réunion a pour but de «discuter des questions en rapport avec le fonctionnement et la qualité du service public de la justice ».
6 – Le Président du Faso, le gouvernement et la justice
L’avant-projet de Constitution est formel. Le Président du Faso ne peut pas être poursuivi pendant l’exercice de son mandat. Sauf s’il est destitué par le Parlement pour haute trahison ou pour manquement grave à ses obligations de président. Le principe est donc qu’il soit poursuivi après la fin de son mandat.
De plus, la nouvelle Constitution, si elle est adoptée en l’état, mettra fin à la Haute cour de justice. Le Président du Faso et les membres du gouvernement peuvent désormais être poursuivis devant la chambre criminelle de la Cour d’appel.
Néanmoins et en attendant, les affaires déjà enclenchées devant l’actuelle Haute cour de justice seront vidées par elle (article 200).
7 – L’ancêtre de l’article 37
L’article 37 de la future ancienne Constitution, cause majeure de l’insurrection populaire d’octobre 2014, a changé de nom. Il s’appelle désormais article 59 dans l’avant-projet et contient ceci : «Le Président du Faso est élu pour un mandat de cinq ans. Il est rééligible une seule fois. En aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats de Président du Faso, ni consécutivement ni par intermittence ».
En d’autres termes, tout Burkinabè ne peut être président que pendant 10 ans, que ce soit successivement ou séparément. Le même principe prévaut pour le Président de l’Assemblée nationale.
Cerise sur le gâteau, l’article 59 ne peut plus être modifié s’il est adopté en l’état. L’article 192 alinéa 4, y veille : « Aucun projet ou proposition de révision de la Constitution n’est recevable lorsqu’il remet en cause (…) le nombre et la durée des mandats présidentiels ».
8 – L’alternance consacrée
Les commissaires ont pris le soin de tapisser l’avant-projet de loi de garde-fous pour assurer le respect du principe de l’alternance. D’abord, le Président du Faso et le Président de l’Assemblée ne peuvent exercer chacun que deux mandats consécutifs ou intermittents. Ensuite, les députés ne peuvent exercer que trois mandats consécutifs ou intermittents.
9 – Pas de « lenga » pour Roch Kaboré et Salifou Diallo
Les dispositions de la présente Constitution (si elle est adoptée en l’état) relatives au mandat du Président du Faso et du Président de l’Assemblée nationale seront d’application « immédiate ». Les dispositions transitoires sont formelles. Les articles 198 et 199 indiquent que Roch Marc Christian Kaboré et Salifou Diallo ne peuvent plus « prétendre qu’à une seule réélection ». Voilà qui écarterait le débat sur la rétroactivité ou non de la Loi fondamentale.
10 – Le Président du Faso doit être Burkinabè
Il n’est pas interdit à un Burkinabè ayant la double nationalité de se présenter à l’élection présidentielle. Mais il doit renoncer à sa nationalité étrangère dès qu’il est élu et avant son investiture. Par ailleurs, tout soupirant au fauteuil présidentiel doit être âgé entre 35 et 75 ans.
Synthèse de Abdou ZOURE
Burkina24
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