« On ne développe pas, on se développe » (1/2)

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Quelques mois après la commémoration du 10e anniversaire de la disparition de l’illustre historien, le Professeur Joseph Ki-Zerbo, Burkina24 vous amène à la découverte sa conception du développement.  Cet  entretien réalisé en deux parties (lire la deuxième partie) vous plonge au cœur de cette pensée, cette vision panafricaine du développement portée par la fondation Joseph Ki-Zerbo qui s’est prêtée à nos questions à travers sa fille aînée, Françoise Ki-Zerbo, notaire spécialisée en Anthropologie du droit et Administratrice Générale de la Fondation Joseph Ki-Zerbo pour l’Histoire et le Développement Endogène de l’Afrique.

Burkina24 (B24) : Pouvez-vous nous présenter la fondation, ses activités et ses objectifs ?

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Françoise Ki-Zerbo (FKZ) :   La Fondation Joseph Ki-Zerbo pour l’Histoire et le Développement Endogène de l’Afrique est une association qui a été créée en 2010, à la suite du Centre d’Etudes pour le Développement Africain (CEDA) dont le Professeur Joseph Ki-Zerbo a été l’initiateur en 1980.

La Fondation Joseph Ki-Zerbo axée sur l’idée-force du développement endogène, « On ne développe pas, on se développe » du Professeur Joseph Ki-Zerbo, dans sa vision, souhaite contribuer au progrès de l’Afrique par la promotion de l’éducation, de la recherche/action, de l’intégration.

L’objectif général de la Fondation Joseph Ki-Zerbo est que l’Afrique se développe grâce à ses hommes et femmes mobilisés pour assumer leurs responsabilités.

La fondation vise comme objectif l’échange et la diffusion d’informations sur les activités de recherche, de formation et de publication réalisées à partir de l’œuvre du Professeur Joseph Ki-Zerbo et des travaux pertinents au regard des activités de la Fondation et leur diffusion par tous moyens ; l’exploitation à des fins scientifiques d’archives relatives à son objet ; la publication et la diffusion d’œuvres en études africaines et autres travaux pertinents en lien avec la vision, la pensée et  l’action du Professeur Joseph Ki-Zerbo.

B24 : Dites-nous, que doit-on comprendre par le concept de développement endogène?

FKZ : Joseph Ki-Zerbo a tenu à donner sa définition du terme « développement » lui-même importé qui signifie selon lui « bien sûr avoir, savoir, mais surtout pouvoir». Selon lui « Se développer, c’est multiplier ses possibilités de choix libérateurs.» « Se développer, c’est être, être toujours plus, se reproduire et pas seulement produire. Participer par co-responsabilité».

En pédagogue, Joseph Ki-Zerbo a pris le soin de définir avec précision, les concepts de « développement » et de « développement endogène». Le développement c’est le passage de soi à soi-même à un niveau supérieur. Le développement est la multiplication des choix quantitatifs et qualitatifs.

Françoise Ki-Zerbo – © Afrolivresque

Dans son livre « A quand l’Afrique ? », il nous dit : « Si on se développe, c’est en tirant de soi-même les éléments de son propre développement. En réalité, tout le monde s’est développé de façon endogène. Personne ne s’est installé sur la place publique en tendant sa sébile dans la main en attendant d’être développé ».

Chez Joseph Ki-Zerbo, le concept du développement endogène ne relève pas de la théorie pure. Dans le livre intitulé « pour un développement endogène de l’Afrique. La natte des autres », Joseph Ki-Zerbo insiste sur  la nécessité de se connaître pour se développer véritablement. Selon lui, il faut  « … aller d’abord au cœur des terroirs, sur le terrain ; ne théoriser qu’à partir de l’exploration concrète, faire ce détour en nous-même, qui, bien que semé d’embûches et d’épreuves, demeure la voie royale pour déboucher honorablement à terme, dans le vaste océan du monde».

Il précise que ce mouvement vers nous-même ne doit pas être considéré comme étant nostalgique ou romantique comme une fuite en arrière, mais doit être  réaliste et déterminé, comme la quête d’un tremplin pour mieux atteindre l’avenir.

B24 : Dans le vaste champ de l’œuvre de Joseph Ki-Zerbo, quelle place occupe le concept de développement endogène ?

Le concept de développement endogène est au cœur de l’œuvre, de la réflexion et de l’action du Professeur Joseph Ki-Zerbo. Dans le message à la jeunesse africaine de Joseph Ki-Zerbo (qui s’adresse en réalité à tous les enfants du Continent) contenu dans son premier livre posthume intitulé « REPERES POUR L’AFRIQUE » composé de textes sélectionnés par lui-même.

L’Afrique a une histoire. L’Afrique, berceau de l’humanité, a enfanté l’histoire. Malgré des obstacles géants, des épreuves majeures et des erreurs tragiques, l’Afrique a illustré notre aptitude au changement et au progrès : notre historicité. Mais celle-ci doit, par la conscience historique, gouverner les trois moments du temps : le passé, le présent et la projection vers l’avenir.

L’invocation par nous du passé seul, du passé simple, ne prouve rien pour le présent et l’avenir, alors que la convocation d’un présent médiocre ou calamiteux comme témoin à charge contre nous, peut mettre en doute notre passé et mettre en cause notre avenir.

C’est pourquoi chaque Africaine, chaque Africain doit être, ici et maintenant, une valeur ajoutée. Il l’a dit et rappelé : le développement sera endogène ou ne sera pas.

Pour Joseph Ki-Zerbo, le développement n’est pas une course olympique. Il faut rejeter dès le départ cette idée fixe tellement nocive qui consiste à dire : « Il y a des pays qui sont en retard et ce retard, ils doivent le rattraper par un transfert d’un certain nombre de procédures, de procédés, de techniques qui leur permettront d’absorber ce retard ». Avec cette approche, nous sommes sûrs que tout sera perdu, non seulement la culture mais aussi le développement économique et matériel lui-même.

B24 : Les activités commémoratives du 10e anniversaire de la disparition du Professeur ce sont déroulées en décembre dernier. Quel bilan dressez-vous et quelle peut-être la portée de cette commémoration ?

FKZ : L’exposition des photos et extraits de livres organisée à l’Université Ouaga I Professeur Joseph Ki-Zerbo a permis de mieux faire connaître au public, plus particulièrement aux jeunes (étudiants et élèves) la personne et l’œuvre. Elle a été montée pour être itinérante. Elle sera donc présentée en d’autres lieux et à d’autres occasions. Le livre intitulé « Développement endogène de l’Afrique et mondialisation. Relecture de la pensée du Professeur Joseph Ki-Zerbo » a été publié en novembre 2016.  Ces Mélanges sont par définition un ouvrage collectif composé d’articles, offert en hommage au professeur Joseph Ki-Zerbo par ses collègues et disciples.

Le dialogue intergénérationnel et interdisciplinaire si cher au Professeur Joseph Ki-Zerbo a eu lieu pendant plusieurs mois de cette année 2016 bénie, à la suite de l’appel à contribution lancé au début de l’année. La mobilisation remarquable du Professeur Fernand Sanou, Conseiller Scientifique de la Fondation Joseph Ki-Zerbo et du Professeur Alain Joseph Sissao, tous deux Coordinateurs scientifiques, s’est poursuivie à l’échelle de chaque auteur, de chaque instructeur, de chaque membre du comité de lecture.

Nous leur témoignons notre gratitude parce qu’ils illustrent de manière crédible, la devise de Joseph Ki-Zerbo  « On ne développe pas, on se développe ». À travers ces mélanges les auteurs se sont invités et invitent à des rencontres interdisciplinaires autour de la pensée du Professeur Joseph Ki-Zerbo pour exécuter le  « projet global d’auto-édification » pour lequel il a réfléchi et agi.

La Fondation Joseph Ki-Zerbo a également procédé à la remise d’un fonds documentaire composé de plus de 3.000 livres et documents à l’Institut National des Sciences de la Société (INSS). Nous avons posé cet acte pour remplir notre devoir de solidarité avec la communauté scientifique de notre cher continent.  Il s’agit du concept du  « développement clés en tête » qui s’oppose « au développement clés en mains qui est un faux développement» comme le rappelle Joseph Ki-Zerbo : « On ne développe pas. On se développe ».

B24 : Quelle(s) action(s) menez-vous dans le sens du développement endogène ?

FKZ : Joseph Ki-Zerbo est un adepte du développement endogène. Il a en effet suscité une dynamique à travers le Centre d’Etudes pour le Développement Africain (CEDA) dont il a été l’initiateur en 1980, au sein duquel ont été réalisées plusieurs études et recherches opérationnelles en matière de développement endogène, par exemple en ce qui concerne l’accès au foncier, la filière karité, les accords de partenariats économiques (APE). Les informations y afférentes sont disponibles sur le site web de la Fondation Joseph Ki-Zerbo dans la rubrique « Historique »

 Le CEDA a eu pour but « d’encourager toutes actions tendant à promouvoir le développement et le progrès des sociétés africaines sur la base d’un processus endogène et autonome intégrant les aspects sociaux culturels ».

A la Fondation Joseph Ki-Zerbo, en dehors des moyens d’actions rappelés au début de cet interview, nous travaillons pour  la promotion de plateformes, fora, groupes de réflexion, séminaires, cours, débats, colloques, congrès, conférences, stages de formation, résidences d’écriture, expositions, et autres rencontres sur l’histoire, le panafricanisme et le développement endogène entres chercheur(e)s, scientifiques et acteurs du développement. (Et également) le renforcement de la capacité de recherche et de formation des chercheurs africains par le biais de subventions, de bourses, prix et récompenses.

La suite de l’interview ▶  « On ne développe pas, on se développe » (2/2)

Entretien réalisé par Davy SOMA

Pour Burkina24


Photo Une – Joseph Ki-Zerbo © Banfora.org

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