Chronique de Ramadan : Les mystiques et le jeûne

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Chaque jour, pendant le mois de Ramadan, l’imam Alidou Ilboudo développe un aspect important à savoir sur le jeûne musulman.


 

Le tassawuf ou soufisme est une expression vivante de la spiritualité musulmane. Les adeptes de cette voie sont connus pour leur intérêt particulier pour l’aspect intérieur des pratiques religieuses. Voilà comment ils appréhendent l’acte de jeûner.

Junayd disait : « Le jeûne est la moitié de la foi. » Le jeûne désigné dans cette parole est la faim. Elle est le moyen de s’élever spirituellement et de nourrir son âme, car plus le corps a faim et plus l’âme est nourrie : c’est une « angélisation » de l’être humain dans le sens où l’on cherche à ressembler aux anges, dans la limite des possibilités humaines.

L’homme ne peut s’élever spirituellement que s’il se détache de ce monde et de tout ce qui s’y rattache. La dimension spirituelle de l’homme, l’âme (ar-rûh) a besoin de se nourrir par l’adoration, et de s’épanouir en réduisant les effets des désirs et plaisirs charnels : c’est l’état de l’ascèse (zuhd). Pour y parvenir en empruntant le plus court chemin, le meilleur moyen est la faim du jeûne. C’est une épreuve par laquelle le Musulman montre son amour pour l’Éternel, et que rien ne peut le détourner de Lui. Allah (magnifié soit Son Nom) dit :{ Très certainement, Nous vous éprouverons par un peu de peur, de faim et de diminution de biens, de personnes et de fruits. Et fais la bonne annonce aux endurants. } [Sourate 2 – Verset 155]

Le Prophète mangeait très peu et passait, parfois, deux mois sans que le feu ne soit allumé dans sa maison.

Le jeûne implique plusieurs obligations

– Ne pas manger et s’abstenir de rapports sexuels licites durant la journée ;

– Préserver sa vue de regards pleins de désirs, et pour l’ouïe ;

– Se préserver d’écouter la mécréance (kufr) ou la médisance (ghayba) ;

– Tenir sa langue afin qu’elle ne profère pas de paroles interdites vaines ou mauvaises, et garder son corps afin qu’il ne cherche pas à assouvir ses désirs et à transgresser les ordres divins.

Celui qui se comporte de cette manière observe véritablement son jeûne, car les effets immédiats du jeûne sont contenus dans la stricte observance de toutes ces règles, sinon il n’a pas de raison d’être.

Le Messager a dit : « Plus d’un ne retire de son jeûne que la faim et la soif ».

Et dans un autre hadith :

« Celui qui ne s’abstient pas de mentir et d’agir en pur mensonge, Allah n’a que faire de son renoncement à son manger et à son boire. »

Sahl Tustarî disait : « Quand Allah a créé le monde d’ici-bas, Il a mis dans l’excès de la nourriture la désobéissance et l’ignorance ; et Il a mis dans la faim la science (‘ilm) et la sagesse (hikma). »

Abû Sulaymân Dârânî disait : « La clé d’ici-bas est l’excès dans la nourriture et la clé de l’au-delà est la faim. »

AI Hujwîrî disait : « La faim aiguise l’intelligence et améliore l’esprit et la santé. » On rapporte une parole qui dit : « Rendez vos ventres affamés et vos corps assoiffés et éprouvés pour que, peut-être, vos cœurs puissent contempler la Grandeur d’Allah en ce monde. »

L’Imam Ghazâlî nous dit : « Sache que le jeûne est de trois degrés : le jeûne du commun des musulmans, le jeûne des élus, le jeûne de l’élite des élus d’Allah. »

Le jeûne du commun des musulmans consiste à s’abstenir d’assouvir ses instincts sexuels et à s’abstenir de manger et de boire. Le jeûne des élus d’Allah Le Très-Haut consiste, en plus des abstentions précédentes, à préserver l’ouïe, la vue, la langue, les membres et tous les sens de tout ce qui est interdit. Le jeûne de l’élite des élus est le jeûne du cœur, il consiste à le préserver de toute idée basse et de tout ce qui le détourne d’Allah Le Très-Haut et de son rappel (dhikr).

En ce qui concerne le jeûne des élus, qui est celui des mystiques, il s’acquiert par six conditions :

La première est de préserver la vue de tout ce qui est interdit et de toute vision qui fait oublier Allah Le Très-Haut. Le Prophète a dit : « La vision interdite est une flèche du Diable, celui qui s’en garde par crainte d’Allah, Allah lui donne en échange une foi dont il trouve la douceur dans son cœur. »

La deuxième est de s’abstenir de parler de choses futiles, de paroles basses et ostentatoires, de la polémique (al-mira), de la médisance (al-ghayba) et du mensonge (al-kadhib) ; obliger la langue à se taire (si ce n’est pour des adorations), s’occuper du rappel et de la lecture du Coran.

Sufyân Thawrî disait : « La médisance gâche et annule le jeûne. » – Mujâhid disait : « Deux choses gâchent et annulent le jeûne : la médisance et le mensonge. »

La preuve est dans le verset qui dit :

{ [… ] Et ne médisez pas les uns des autres. L’un de vous aimerait-il manger la chair de son frère mort ? Non ! vous en aurez horreur. Et craignez Allah, car Allah est Grand Accueillant au repentir, Très Miséricordieux. } [ Sourate 49 – Verset 12 ]

La troisième est de préserver l’ouïe car Allah Le Très-Haut, parlant des hypocrites dans le Coran, dit :

{ Ils sont attentifs au mensonge et voraces de gains illicites [… ] } [ Sourate 5 – Verset 42 ]

Ceux qui profèrent des paroles illicites et ceux qui les écoutent sont sur le même pied d’égalité. Le jeûne de l’ouïe, comporte le fait de ne pas écouter la mécréance, Allah Le Très-Haut dit à ce sujet :

{ Dans le Livre (le Coran), Il vous a déjà révélé ceci : lorsque vous entendez qu’on renie les versets d’Allah et qu’on s’en raille, ne vous asseyez point avec ceux-là jusqu’à ce qu’ils entreprennent une autre conversation. Sinon, vous serez comme eux. Allah rassemblera, certes, les hypocrites et les mécréants, tous dans l’Enfer. } [ Sourate 4 – Verset 140 ]

La quatrième consiste à préserver les membres, mains et pieds, de tout péché, et à se garder de toute nourriture douteuse ou illicite. Il n’est pas pensable de s’abstenir de ce qui est licite pour jeûner et de rompre ce jeûne par ce qui est illicite.

La cinquième : au moment de la rupture du jeûne, le croyant ne doit pas manger excessivement, sinon il perd l’effet du jeûne de sa journée. Comme on l’a dit, le but du jeûne est de maîtriser ses désirs et ses instincts pour les minimiser au maximum afin de se fortifier spirituellement : { [… ] Ainsi atteindrez-vous la piété. }

Le secret du jeûne consiste à affaiblir les forces des désirs, instincts et passions qui sont les armes redoutables du Diable jusqu’à ce que l’ego (nafs) soit maîtrisé. Ceci n’est possible que si, à la rupture du jeûne, le musulman ne prend que le même repas consommé avant le jeûne, sans récupérer tous les repas de la journée.

Mâlik ibn Dînâr a dit : « Celui qui a vaincu les désirs de ce bas monde ; celui-là, Satan a peur de son ombre. »

Aussi, il est préférable qu’il ne cherche pas à éviter de ressentir la faim, pendant la journée, en dormant exagérément. Car il ne sentira son cœur pur que s’il éprouve la faim et la soif au point de faire ses prières de nuit et son zikr aisément jusqu’à ce que le Diable ne convoite plus son cœur et qu’il puisse contempler le Royaume des cieux.

Pendant le Ramadan, la nuit du destin (laylatulqadr) est, en quelque sorte, l’accomplissement de tout cela : { La nuit d’al-Qadr est meilleure que mille mois. Durant celle-ci, descendent les Anges ainsi que l’Esprit, par permission de leur Seigneur pour tout ordre. Elle est paix et salut jusqu’à l’apparition de l’aube. } [ Sourate 97 – Versets 3 à 5 ]

La sixième est que ton cœur soit suspendu entre l’espoir (rajâ’) et la crainte (khawf) ; l’espoir que ton jeûne soit accepté par Allah Le Très-Haut et d’être parmi les gens de la Proximité, et la crainte de le voir refusé et d’être parmi ceux qu’Allah Le Très-Haut a repoussés. Ce sentiment doit d’ailleurs accompagner toute adoration.

Abû Umâma a dit : « Je suis venu voir le Prophète et je Lui ai demandé : « Ô Messager d’Allah ! Ordonne-moi un acte qui me fasse entrer au Paradis. Il a dit : « Observe le jeûne, il n’a pas d’égal » Et je suis revenu lui demander une deuxième fois, Il m’a dit : « Observe le jeûne, il n’a pas d’égal »

On a dit à Ahnaf ibn Qays : « Tu es vieux et le jeûne t’affaiblit. » Il a répondu : « Je le fais pour un long voyage. Endurer l’adoration est moins dur que d’endurer le châtiment. »

Yahyâ ibn Mu’âdh disait : « La faim est une lumière, et le rassasiement est un feu, et les désirs sont les bûches qui s’enflamment et qui ne s’éteignent qu’en brûlant celui qui s’en accommode. »

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