Procès putsch : « Tout ce que j’ai fait est vérifiable » (L’expert Sanfo)

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Les audiences dans le cadre du procès du putsch manqué de septembre 2015 se suivent mais ne se ressemblent pas forcément. C’est Younoussa Sanfo, l’expert en investigation numérique, qui était à la barre du Tribunal militaire ce lundi 18 mars 2019. Il n’a pas travaillé sur l’authenticité des éléments d’écoutes sonores, mais plutôt sur l’extraction des messages et autres fichiers ayant des rapports avec les évènements.

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Le premier jour de déposition du geek connu internationalement contraint certains observateurs à se rappeler la célèbre théorie du philosophe allemand Hegel : la dialectique du maître et de l’esclave. Dans le cadre de la lutte contre le grand banditisme, l’ingénieur informaticien a eu en effet à former en investigation numérique des personnes aujourd’hui alpaguées et assises dans le box des accusés.

Ces personnes formées hier ont-elles voulu effacer toutes traces de preuves les incriminant au point de confondre Younoussa Sanfo dans cette affaire de putsch ? Une évidence, selon l’homme tech puisque, dit-il, il y avait des « initiés » qui ont tenté « d’écraser » certains messages croyant qu’ils seraient irrécupérables pour toujours.

Avant de commencer sa déposition, celui qui a produit le rapport d’expertise de 512 pages a juré de dire toute la vérité concernant son travail. « Dans plusieurs des cas, il a fallu contourner le système pour pouvoir récupérer les données. Ça a été un exercice très compliqué », confie-t-il. Plus de 70 appareils ont été passés au peigne fin.

Le Parquet a voulu savoir si M. Sanfo avait des antécédents avec certains des accusés. « Je n’ai pas créé ou supprimé de SMS. Je suis un expert. J’ai une déontologie et je respecte la vie privée des gens. Je n’ai d’ailleurs pas de problème avec qui que ce soit. Je fais ce travail tous les jours », répond l’informaticien émérite qui ajoute avoir travaillé avec des « systèmes homologués et légaux » pour extraire les messages.

« J’ai souffert dans ce dossier », « J’ai voulu arrêter ce travail »…

« Il est impossible de tripoter les données et avoir à la fin des résultats vérifiables. Mon rôle n’est pas de contredire ce qu’un accusé a dit à la barre pour se défendre. Mon rôle est de faire ce que le Juge m’a demandé de faire. Toutes les preuves d’intégrité existent. Tout ce que j’ai fait est vérifiable. Ce qui prouve la qualité de mon travail, c’est qu’il n’y a pas de contre-expertise », foi du génie informaticien.

Younoussa Sanfo informe également avoir fait appel « une seule fois » à un laboratoire « agréé » et un « expert reconnu auprès des Tribunaux ». Ledit laboratoire, insiste-il, est venu à Ouagadougou et le travail a été fait à Ouagadougou. Au niveau du Parquet militaire, les déclarations de l’ingénieur sont reçues comme un parangon de vertu.

Le Procureur a tenu à le féliciter pour la « qualité de son travail ». Pour mener à bien les débats de fond, une copie du rapport d’expertise est trouvée pour l’homme arrêté à la barre avec des papiers et des bidons d’eau. L’un des parquetiers, avant de passer la parole aux avocats, conclut qu’il faudrait au contraire être un génie pour pouvoir inventer les contenus de tous les téléphones examinés.

A une question de Maître Guy Hervé Kam des Parties civiles, le geek qui dit avoir procédé à ce qui est comparable à une « fouille archéologique » a laissé entendre des propos du genre « J’ai souffert dans ce dossier », « J’ai voulu arrêter ce travail »… Mais, l’homme considéré comme celui qui a pu reconstituer la « boîte noire » du putsch sera interrompu par l’auxiliaire de justice qui souhaite poursuivre avec ses questions et observations.

Un « très mauvais travail », selon Me Mamadou Sombié

« Il y avait des contenus de SMS récupérés qui disaient de supprimer et d’écraser les messages. Ce sont des termes utilisés par les initiés. J’ai donc procédé à l’assemblage des fragments que nous appelons des artéfacts dans notre jargon. Ce procédé est souvent compliqué puisqu’il arrive que les données soient difficilement réutilisables. Sinon, tout ce qui sort du téléphone a une trace chez l’opérateur de téléphonie », développe l’expert Sanfo qui a été contacté dès le 17 septembre 2015 en personne qualifiée pour ce travail.

Si le Parquet et les avocats des Parties civiles applaudissent le travail de l’investigateur numérique, les avocats de la Défense, quant à eux, jettent en pâture la reconstitution du puzzle telle que décrite par ce dernier. Pour Maître Mamadou Sombié, avocat du Lieutenant Limon K. Jacques, ce « très mauvais travail » est à prendre avec des pincettes car rien ne prouve que son client ait reçu ou envoyé les messages indiqués si son téléphone n’a pas été exploité.

Les débats du jour ont failli basculer sur la qualité de la passation du marché portant expertise des téléphones des accusés. Si pour les uns, cette passation de marché est entachée d’irrégularités, pour d’autres, il n’en est pas question. Le Président du Tribunal a tranché en laissant le libre choix à l’expert de répondre ou non à des questions relatives à ce marché. L’audition de celui qui est affectueusement appelé « Youn Sanfo » se poursuit demain 19 mars 2019 à partir de 9h.

Noufou KINDO

Burkina 24

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Noufou KINDO

@noufou_kindo s'intéresse aux questions liées au développement inclusif et durable. Il parle Population et Développement.

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