Burkina Faso : Le terrorisme lui fait quitter la route de l’école
Au Burkina Faso, depuis 2016, des milliers d’établissements scolaires ont été fermés du fait du terrorisme. Plusieurs régions du pays sont concernées et le Centre-nord n’y échappent pas. Ainsi, le Lycée départemental de Bouroum situé dans la Région du Centre-nord, province du Namentenga a refermé ses portes en mars 2019, laissant sans suivi scolaire, plus de 400 élèves. De ceux-ci, il y a Lassané Baguian. Il a dû fuir sa localité après son succès au Brevet d’étude du premier cycle (BEPC) 2018-2019, abandonnant ainsi les études pour trouver refuge à Ouagadougou. Nous l’avons rencontré le lundi 15 juin 2020.
Des élèves qui partagent le même sort que Lassané Baguian, il y en a des milliers au Burkina Faso. En décembre 2019, du fait de la crise sécuritaire, le ministère de l’éducation nationale, de l’alphabétisation et de la promotion des langues nationales a dénombré 2.087 infrastructures scolaires fermées, affectant ainsi 303.090 élèves et privant 9.264 enseignants de travail.
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Dans la Région du Centre-nord, le Lycée départemental de Bouroum a subi le même sort, mettant à la rue, plus de 400 élèves. Les plus chanceux ont rejoint des parents dans d’autres localités pour poursuivre les études. Mais d’autres ont du se réorienter et s’adapter. Lassané Baguian, 20 ans, est de ceux-ci. Après la fermeture de son établissement en 2019, sa famille a quitté Bouroum. Lui, il a été accueilli par un oncle à Ouagadougou. Mais ses études ont été jetées aux oubliettes. Lassané est passé à autre chose.
Pourtant, « j’aimais l’école », nous a-t-il fait savoir lorsque dans la matinée du lundi 15 juin 2020, nous l’avons rencontré dans un quartier de Ouagadougou. Frêle et souriant malgré sa situation peu enviable, Lassané Baguian, désormais personne déplacée interne, s’est posé sur une pierre sous un arbre dans l’enceinte du site du Salon international de l’artisanat de Ouagadougou (SIAO) pour nous narrer son vécu. Dans cet élément vidéo, suivez-le.
Vidéo – Les confessions de Lassané Baguian
Burkina 24
Les déboires pour les pensionnaires du Lycée départemental de Bouroum ont débuté en mars 2019 après une fusillade au marché de Rebtilga, à quelques encablures de Bouroum, nous relate Hermann Bama, professeur des lycées et collèges, qui officie dans la localité. « Il y a eu une fusillade au marché de Rebtilga, situé à trois Kilomètres de Bouroum (…). On a enregistré une trentaine de morts. C’est à l’issue de ça que les populations ont quitté la zone et l’école a été fermée », narre l’enseignant.
Mais bien avant ces événements tragiques, « en 2014, il y avait déjà des situations d’insécurité. Mais ce n’était pas dû au terrorisme. C’était des braquages à mains armées. C’était vraiment fréquent dans la zone », poursuit M. Bama. A l’écouter, les attaques à caractères terroristes ont débuté « lorsque les Koglweogo (groupe d’auto-défense, ndlr) ont commencé à appréhender des individus suspects dans la zone vers la fin de l’année 2018 ». Depuis, les affrontements entre terroristes et groupe d’auto-défense se sont intensifiés, ce qui a amené les habitants, « pris de panique » à « quitter au fur et à mesure la zone ».
« Personne ne souhaitait vivre cette situation »
Cette situation d’insécurité, commune à plusieurs régions du pays, a entraîné un déplacement massif des populations. A la date du 7 juin 2020, le Conseil national de secours d’urgence et de réhabilitation (CONASUR) a dénombré 921.471 personnes déplacées internes. Lassané Baguian y est-il comptabilisé ? Il n’en sait rien. Mais tout comme les autres, il est frappé par la dure réalité, celle de la reconstruction d’une vie après avoir presque tout perdu. « Ce que je peux dire, c’est demander aux Burkinabè de s’entraider. Les déplacés ne voulaient pas vivre cette situation. Personne ne souhaitait vivre cette situation », a rappelé l’ancien élève.
Lassané Baguian semble avoir perdu goût pour les études. Orienté désormais vers le commerce, il souhaite évoluer dans ce domaine. « Si je gagne quelqu’un qui va m’aider à développer mon commerce, je vais accepter (…) Si le terrorisme s’arrête aujourd’hui, on va retourner dans nos villages. Ceux qui veulent travailler dans les villes vont s’arrêter travailler et apporter de l’argent au village. On va reconstruire nos villages », a lancé le néo commerçant en guise de cri de cœur.
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