Longue lettre au Fondateur de Jeune Afrique : Le président ADO au cœur de tes échanges actuels avec Siradou Diallo !

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Ceci est une tribune en hommage au défunt Béchir Ben Yahmed, fondateur du journal Jeune Afrique.

Cher confrère franco-tunisien, Béchir Ben Yahmed, tu t’en es ainsi allé sans avoir crié gare. A 93 ans, le capitaine du bateau battant pavillon JeuneAfrique dont tu es le fondateur, a décidé de hisser les voiles vers la bordée de la dernière escale. Nous laissant ainsi orphelin de toi.

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Pour te rendre hommage, que de souvenirs qui trottent dans mon esprit même si nous n’avons jamais eu l’occasion de nous rencontrer. Sais-tu que tu as contribué à renforcer mon goût pour la lecture en général et à polir ma passion d’écrire, notamment dans les journaux ?

Déjà, à l’âge de 16 ans, à Abidjan, je lisais ton journal panafricain avec tes articles. Grand lecteur devant l’Eternel de ton journal, mon grand frère ne manquait jamais l’occasion de l’acheter dans les super marchés abidjanais et c’est là, qu’a débuté mon « aventure » avec ton hebdomadaire que je prenais au salon du frère. Demeuré constant, même quand je suis arrivé à l’université de Ouagadougou, j’ai continué à lire régulièrement ton célèbre journal international en l’achetant grâce à ma bourse d’étudiant. C’était un privilège à l’époque !

Aujourd’hui, avec ton décès, j’ose espérer que la jeunesse saura tirer des leçons de ton parcours chevaleresque pour relever les défis de son époque. Je l’invite d’ailleurs à aller à l’information au cas où elle ignorerait ledit parcours. En quittant le poste de ministre et le président tunisien Bourguiba pour te consacrer au journalisme dans les années 61, tu montres ainsi à la jeunesse africaine qu’il n’y a pas que la politique qui relève du domaine de l’action et qu’on peut être un homme d’action autrement. Et aussi qu’il faut embrasser son métier par amour, par passion. Laquelle passion a été le ferment de la réussite de ton entreprise. Mais pour réussir, tu as dû connaître des vertes et des pas mûres. En effet, à partir de 1990, avec la dévaluation du franc CFA, tu as failli fermer ton entreprise : ton journal perdait 1,5 million de francs français par mois ; tu n’arrivais plus à payer ton loyer et les salaires ; ton personnel de 130 agents a été ramené à 30 agents ; tu as dû hypothéquer ta maison ; ta femme Danielle s’arrachait les cheveux. Gloire à Dieu, pour te soutenir, certains de tes employés ont renoncé à une partie de leur salaire et des amis t’ont apporté leur appui en ne percevant aucun dividende de leurs parts à JeuneAfrique. Sais-tu chère mort, que je connais tout cela sur toi ? C’est la preuve que je ne te quittais pas d’une semelle, nonobstant les milliers de kilomètres qui nous séparaient de Ouaga à Paris. Ces faits historiques que je viens de rappeler, témoignent à souhait ta capacité de résilience hors pair qui t’a permis de redonner le souffle au journal pour rester en vie et je prie le Bon Dieu pour que tu serves de repère à la jeunesse. Puisse ta résilience faire tache d’huile auprès des jeunes entrepreneurs face aux difficultés qu’ils rencontreront !

Cascade d’interdictions du journal

Une autre tempête à laquelle ton journal a survécu, c’est la cascade des interdictions. Et là encore, il t’a fallu plus que de la résilience pour rester debout. En Guinée, le président Sékou Touré interdit ton journal de 1963 jusqu’à sa mort en 1983. Ce, après t’avoir engueulé dans sa chambre d’hôtel à Addis Abeba en marge de la réunion constitutive de l’OUA. Au Maroc, le roi interdira aussi le journal à partir de 1972 et ce, pour plus de 3 ans. De 1976 à 1992, soit 16 ans durant, ton journal sera interdit aussi en Algérie où 30 000 exemplaires étaient vendus chaque semaine. Puis, ce fut au tour de la Tunisie (sous l’ère de ton ex-ami Bourguiba) et de la Côte d’Ivoire dans les années 80, d’interdire ton journal dans ces pays. Et c’est ainsi qu’apparaît l’actuel président ivoirien, Alassane Dramane Ouattara (ADO), en défenseur de la liberté de presse, pour te sortir du ruisseau. Je suis sûr que depuis ta tombe, tu te rappelles de cet épisode et remercies toujours le président ADO pour t’avoir enlevé une grosse épine des pieds: c’est bien lui ADO qui a convaincu le président Houphouët Boigny de tes bonnes intentions pour qu’il lève l’interdiction du journal sur les bords de la Lagune Ebrié. Tu as bien reconnu de ton vivant que cette interdiction pesait beaucoup sur le journal car Abidjan constituait à lui seul un grand marché pour ton organe. Aujourd’hui que tu as rejoint dans l’outre-tombe le journaliste guinéen Siradou Diallo avec qui tu avais rencontré ADO à l’époque à Paris, j’imagine que cette anecdote alimentera vos échanges quotidiens dans l’au-delà. Je suis certain que le président ADO s’est souvenu de cet épisode à l’annonce de ton décès. En somme, ces différentes interdictions montrent bien que ton journal dérangeait souvent certains régimes dont tu étais devenu le poil à gratter. C’est certainement cet agacement qui a amené l’ex-président congolais Mobutu à répondre à un journaliste que « JeuneAfrique n’est pas la Bible » pour contrer l’aura de ton journal.

Maintenant que dois-je dire à l’heure où tu t’en vas après nous avoir abreuvés de ta belle plume et fait découvrir de merveilleux talents incontestés en matière de plume : Elimane Fall, les défunts Siradou Diallo et Senen Andriamirado (l’ami de Sankara), l’atypique François Soudan, Marwane Ben Yahmed, Fawzia Zouari, etc. ? Sinon que merci, car chaque jour qui passe, les écrits de tous ces talents cités demeurent près de notre oreiller. A toi qui enseignais à la jeunesse que « pour réussir le travail du journal, il faut travailler douze voire quinze heures durant par jour et ne rien faire d’autre », je t’informe que tu as vécu utile avec une relève quasi assurée avec Marwane et François Soudan dont les fantastiques plumes montrent qu’ils ont été à bonne école à tes côtés. Sois assuré d’une chose : ce sont eux l’ambroisie grecque qui procurera ton immortalité. Repose en paix cher doyen de la presse dont on attend impatiemment la publication des mémoires promise par le journal JeuneAfrique !

Cbs L’iconoclaste

L’écrivain chroniqueur

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