[Tribune] – Introspection de Me Arnaud Ouédraogo pour « un autre Burkina Faso »

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Dans le présent article, l’avocat Maître Arnaud OUEDRAOGO propose de surmonter les épreuves du moment pour bâtir ensemble les fondations d’une nouvelle espérance. 

UN AUTRE BURKINA FASO EST POSSIBLE

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Ce sont les grandes épreuves qui font les grandes nations comme les temps difficiles révèlent les grands hommes. Les difficultés ne sont rien tant que nous savons les tourner à notre avantage en saisissant l’occasion d’en sortir plus forts.

  1. Notre intégrité sera notre cri de ralliement

Face à la menace, chaque peuple doit découvrir son cri de ralliement. Certains peuples ont trouvé ce dénominateur commun dans une religion ou une ethnie. Nous avons eu le génie de transcender la religion et l’ethnie pour trouver notre force motrice collective dans une valeur sanctifiée : l’intégrité.

Celui qui nous a baptisés du glorieux nom de « Patrie des Hommes Intègres » nous a légué un précieux héritage. Nous échappons ainsi au piège de la religion et de l’ethnie qui enserre plusieurs peuples en Afrique. Les jeunes gens qui se battent contre le terrorisme ne défendent pas seulement une intégrité territoriale ; ils défendent aussi un patrimoine immatériel : notre intégrité identitaire.

  1. Découvrir la portée stratégique de l’intégrité

L’intégrité est notre matière première stratégique. Il reste à lui conférer une dimension opératoire par sa transcription dans la gouvernance, le droit, la culture et l’économie, afin qu’elle ne soit pas un vœu pieux.

Dans ces temps graves pour le devenir de la nation, la première application de l’intégrité consistera à mener de front la lutte contre le terrorisme avec la lutte contre la corruption. La question de la corruption se pose en des termes de survie collective puisque la corruption s’attaque à notre identité commune revendiquée.

Comme le terrorisme, la corruption engendre un Etat parallèle : règles parallèles, justice parallèle, territoire parallèle, citoyens parallèles, gouvernement parallèle, armée parallèle, économie parallèle. Comme le terrorisme, la corruption déshumanise : le terrorisme tue l’homme, la corruption tue l’humain. 

Que le Burkina Faso figure sur une liste de pays parrainant le blanchiment de capitaux est contre-nature. Un Burkina Faso des affaires prospère dans le terrorisme et une économie de guerre s’incruste durablement. Cela va de l’opacité des dépenses militaires aux rackets sur les routes et aux frontières, tout cela paradoxalement au nom de la lutte contre le terrorisme.

Nous ne mesurons pas encore l’extraordinaire opportunité de la transcription de l’intégrité dans l’économie ni l’opportunité d’une économie de l’intégrité autocentrée sur la qualité des Hommes. Cette économie de la ressource humaine permet de surmonter la rigueur des conditions physiques et de sortir de l’enclavement.

C’est le secret de la « Richesse des nations ». Même le colon a pressenti avant l’heure la voie de ce grand destin. On connait l’exclamation du Général De Gaulle à son arrivée en Haute-Volta : « Ouagadougou, Terre des Hommes ! » – toute une prophétie.

  1. Face au terrorisme, une perspective globale  

Le seul honneur que nous font les terroristes, c’est de nous obliger à redoubler d’intelligence et de discernement. Les terroristes ne sont pas bêtes et sont loin d’être « fous ». Leur mode opératoire au Sahel démontre qu’ils évoluent dans une sphère rationnelle cohérente. Remonter la pente de cette cynique rationalité permet de reconstituer la matrice d’une réponse stratégique globale.

Le terrorisme nous introduit dans un univers de complexité. Réduit à sa plus simple expression, le terrorisme est assis sur le triptyque : « Armement – Financement – Idéologie ». Mais ce « Triangle des Bermudes » recèle un nœud d’interactions : guerre de religions larvée – circulation incontrôlée des personnes – circulation incontrôlée des armes – frontières poreuses – filière de recrutement – faible contrôle des systèmes de communication – conquête territoriale – alliance stratégique entre groupes – adossement à d’autres formes de criminalité – corruption – blanchiment de capitaux – drogue – orpaillage – désagrégation des familles – destruction du système scolaire – destruction des structures économiques – pillage de récolte et de cheptel – exode de populations – destruction des institutions sociales – déculturation – faiblesse de la coopération régionale – hypocrisie de la vie internationale – sous-traitance locale – ingénierie de la terreur au sommet de la pyramide.

  1. Face au terrorisme, mobiliser aussi les armes de la culture

Toute guerre se gagne ou se perd sur le terrain de la culture. Les terroristes sont les premiers à investir le terrain de la culture, quitte à y pénétrer par effraction. Ils développent l’ingénierie de la terreur comme un haut-lieu de déconstruction de la culture.

C’est sur les ailes de l’idéologie, donc de la culture, qu’ils portent leurs armes puis opèrent la sous-traitance locale de la guerre. Ils ruinent les légitimités politiques, économiques et sociales, détruisent les vecteurs de sens (écoles, monuments historiques et spiritualité endogène) pour mieux demeurer maîtres de la raison d’agir. C’est Bernanos qui disait : « Qui dispose de sa mort tient tous les enjeux ». L’Afrique voit ainsi se dérouler sur son sol une guerre de religions larvée, entre Christianisme et Islam, qui ne lui laisse pas l’occasion de sublimer sa propre spiritualité en tant que moteur de son inventivité.

En donnant du sens à l’action, la culture rend la guerre intelligente et préserve de la tentation de riposter par les mêmes armes de la terreur. La culture se dresse comme un rideau de fer contre la barbarie. C’est ce supplément d’âme auquel la culture oblige qui rend aussi la guerre plus difficile pour les nations civilisées.

La culture permet de retrouver le sens de l’altérité et du rapport à l’autre. En disqualifiant la perspective manichéenne d’un « axe du mal », la culture sort le terrorisme de la fatalité et replace l’homme au pied de l’humanité. Elle ouvre le champ à la réconciliation des antagonismes politiques.

  1. Restaurer les digues de la confiance 

Il faut un exhaussement de la politique par la réhabilitation de la parole publique devenue une « langue morte ». Certes, la globalisation délocalise les causalités et fait ressentir d’ici le contrecoup d’une action menée à mille lieux : guerre en Libye et en Irak, conflit israélo-palestinien, guerre en Afghanistan et en Syrie ont ouvert les vannes pour la circulation massive des armes au Sahel.

Mais il ne faut pas que l’hypocrisie internationale (celle qui vend des armes contre des pétrodollars à des Etats dont le lien avec le terrorisme est trouble) vienne rencontrer une hypocrisie locale. Il faut restaurer les digues qui maintiennent la confiance, le droit, les institutions, le bien commun et la redevabilité, car ce sont elles qui rendent possible la collectivité humaine organisée.

Il faut changer le rapport au pouvoir marqué par une trop grande verticalité face à une société qui aspire à l’idéal démocratique. Seule la confiance retrouvée scellera l’union sacrée, percera le mur du désespoir et portera la plus haute espérance pour le Burkina Faso que nous aimons.

Rien n’est perdu. Tout est encore possible.

Maître Arnaud OUEDRAOGO

Avocat


N.B : Le titre est de la Rédaction

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