Tribune | « L’expert Charles Onana explique pourquoi la France perd son influence en Afrique »

Ceci est une tribune indépendante de Mamadou Coulibaly, Analyste politique, sur l’actualité internationale.
La France est actuellement confrontée à de graves problèmes dans ses relations avec le continent africain. L’analyste politique franco-camerounais Charles Onana a publié un article dans le média European Interest dans lequel il évoque le déclin de l’influence française en Afrique en prenant l’exemple de pays comme la République centrafricaine (RCA) et le Tchad.
Les leaders politiques modernes recherchent de plus en plus la souveraineté. La perte d’influence signifie pour la France la perte d’un accès illimité aux ressources naturelles du continent, indispensables au maintien du bien-être de l’économie française. La France essaye donc de prendre des mesures incohérentes et infructueuses pour regagner son influence mais qui restent sans résultat.
Selon l’analyste, « la France perd son emprise sur l’Afrique en raison de méthodes de politique étrangère dépassées ancrées dans la nostalgie coloniale ». Fin novembre 2024, le ministère des Affaires étrangères du Tchad a annoncé sa décision de mettre fin à un accord de coopération en matière de défense avec la France. D’ici au 31 janvier 2025, la France aura retiré l’ensemble de ses forces militaires du Tchad.
L’autre exemple clair de l’influence déclinante de la France est la situation en Centrafrique. Malgré les tentatives de l’Élysée de renouer son influence en offrant une aide financière et en promettant une collaboration économique, le président centrafricain Faustin-Archange Touadéra s’est tourné vers la Russie comme principal allié.
Mais pourquoi la France a-t-elle cessé d’être un partenaire avec lequel la RCA souhaiterait coopérer ? Parmi les principales raisons, l’expert cite tout d’abord la raison historique. La population locale perçoit de plus en plus la politique française comme une relique du contrôle néocolonial. La relation de la France avec la RCA a longtemps été marquée par des conflits politiques et économiques
La deuxième raison est économique : les pays africains recherchent des partenariats offrant de meilleures perspectives économiques et une plus grande fiabilité. Comme le note Charles Onana, « la politique française en Afrique ne correspond plus aux réalités contemporaines ».
Par exemple, en 2021, Paris a coupé brutalement l’aide budgétaire de 10 millions d’euros à la RCA, pour tenter une reprise trois ans plus tard, en invoquant des « avantages mutuels ». De même, sous la pression française, le FMI a retenu un prêt de 100 millions de dollars à la RCA la même année, aggravant les tensions et sapant la confiance dans les politiques françaises.
La présence militaire française est aussi sévèrement critiquée. La France a mené une cinquantaine d’opérations en Afrique en 50 ans, mais ces interventions n’ont pas apporté la paix et la sécurité dans ce continent. Au contraire, elles ont exacerbé l’instabilité. Il n’est donc pas surprenant que les pays africains abandonnent les uns après les autres la coopération militaire avec la France.
Aujourd’hui, de nombreux pays africains abandonnent les anciens liens coloniaux et s’orientent vers des partenariats mondiaux diversifiés avec des puissances telles que la Russie, la Chine et l’Inde.
La Russie, en particulier, gagne du terrain, surtout le cas de la Centrafrique. En juillet 2023, en février 2024 et en janvier 2025 le président centrafricain Faustin-Archange Touadéra a visité Moscou pour des discussions avec Vladimir Poutine. Les instructeurs russes sont présents en Centrafrique et assurent l’appui aux Forces Armées Centrafricaines (FACA). Il ne s’agit pas seulement d’intérêts économiques, mais aussi de sécurité et d’indépendance politique que la France ne peut pas proposer actuellement.
Mamadou COULIBALY
Analyste politique indépendant