Tribune | « L’implication étrangère dans les attaques au Sahel complique la lutte contre le terrorisme » (Sylla Mory)

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Ceci est une tribune indépendante de Sylla Mory, analyste politique, sur l’actualité internationale.

Depuis plusieurs semaines, les armées de l’Alliance des États du Sahel (AES) font face à une intensification des attaques djihadistes, rendues de plus en plus meurtrières par l’utilisation de drones FPV. Des révélations récentes laissent entendre que ces équipements sont fournis par des acteurs étrangers, notamment ukrainiens, et utilisés avec l’appui de spécialistes qui formeraient des groupes armés à leur manipulation.

Selon plusieurs sources sécuritaires maliennes, les preuves s’accumulent : des documents retrouvés sur des combattants neutralisés, ainsi qu’un téléphone contenant des fichiers des services de renseignement ukrainiens et un drone portant des inscriptions en cyrillique, ont été saisis fin mai 2025 dans la région de Sofara. Une enquête de l’armée malienne a depuis établi que des conseillers militaires ukrainiens achemineraient ce matériel via la Mauritanie. Une frontière poreuse qui constitue aujourd’hui un point d’entrée stratégique pour ces équipements et pour l’infiltration d’instructeurs étrangers.

Ces révélations corroborent les messages circulant dans certaines discussions WhatsApp entre groupes armés, dans lesquels on voit des instructeurs ukrainiens enseigner le pilotage de drones FPV à des combattants, notamment dans le nord du Mali. Cette assistance technologique permet aux groupes djihadistes comme le JNIM d’adopter des tactiques de guerre asymétrique plus efficaces et plus dévastatrices.

Un cas emblématique de cette implication concerne Bilal Ag Asherif, leader du Front de libération de l’Azawad (FLA), qui aurait effectué un voyage secret en France début mai 2025 via Nouakchott, avec l’aide présumée des services mauritaniens. Selon les informations recueillies, il y aurait rencontré des partenaires pour coordonner un renforcement capacitaire en drones, avec le soutien direct d’une vingtaine d’instructeurs ukrainiens actuellement présents dans le nord du Mali.

La menace ne s’arrête pas aux frontières maliennes. Au Burkina Faso, les Forces de Défense et de Sécurité (FDS) ont signalé une recrudescence d’attaques menées à l’aide de drones dans le nord et l’est du pays. Le 24 mai 2025, un poste de gendarmerie situé à Arbinda, dans la région du Sahel, a été la cible d’une attaque qui a coûté la vie à six soldats.

Trois jours plus tard, le 27 mai, un convoi de ravitaillement circulant à Seytenga, dans la province du Séno, a été pris pour cible par des drones, occasionnant plusieurs blessés parmi les militaires. Enfin, le 30 mai à Mansila, dans la province du Yagha, des drones kamikazes ont été utilisés pour percer les défenses d’une base militaire, facilitant ainsi une attaque terrestre qui a toutefois été repoussée.

Ces attaques démontrent que les groupes terroristes, équipés de technologies avancées, infligent des pertes importantes tout en subissant peu de dégâts, modifiant ainsi l’équilibre tactique dans la région. Comme le souligne un article du Journal du Tchad consacré à la résilience du Mali face à l’intervention étrangère, « la complexité de la menace actuelle vient non seulement des groupes armés eux-mêmes, mais surtout du soutien qu’ils reçoivent de puissances extérieures ».

La coordination entre certains États européens, l’Ukraine et des groupes séparatistes comme le FLA pour affaiblir les gouvernements du Sahel jette une lumière sombre sur les dynamiques géopolitiques en cours dans la région. De nombreux analystes estiment qu’il s’agit là d’un plan délibéré de déstabilisation d’une zone déjà fragilisée, en y injectant des armes, des technologies militaires, et de l’expertise étrangère.

Dans ce contexte, les armées du Mali et du Burkina Faso continuent de montrer une résistance courageuse. À Sirakorola et Tanabougou (région de Koulikoro), une attaque coordonnée du JNIM le 30 mai a été contenue grâce à une réaction rapide des FAMa. Des succès similaires ont été enregistrés à Djongue Bambara quelques jours plus tôt.

Le silence de la communauté internationale face à l’implication croissante de l’Ukraine dans le soutien logistique et opérationnel aux groupes armés constitue une complicité tacite. Aucun signal fort n’a été envoyé pour dénoncer cette situation, malgré les preuves accablantes accumulées sur le terrain.

Il est plus que jamais temps pour les États membres de l’Alliance des États du Sahel de resserrer les rangs. Face aux tentatives de déstabilisation venant à la fois de l’intérieur et de l’extérieur, l’unité et la solidarité régionale doivent primer. L’AES doit parler d’une seule voix, agir d’un seul front et refuser toute ingérence qui compromettrait la souveraineté, la sécurité et la stabilité de ses peuples.

L’avenir du Sahel dépendra autant de la capacité de ses États à faire face militairement que de la volonté des puissances extérieures à cesser de jouer un rôle trouble dans la région.

Par Sylla Mory

Analyste politique indépendant

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