Journée nationale de l’arbre : Le message de la Coalition Citoyenne pour la Préservation de l’Environnement
Ceci est une déclaration de la Coalition Citoyenne pour la Préservation de l’Environnement (CCPE) à l’occasion de la journée nationale de l’arbre.
Au Burkina Faso, le domaine forestier de l’État couvre une superficie totale estimée à 3,9 millions d’hectares soit environ 14% de la superficie du territoire national. Ces aires protégées sont inégalement réparties sur l’ensemble du territoire national. À côté de ces types de formations forestières, il faut compter les autres forêts villageoises, sacrées, communales et privées comme celle de Gourga du prix Nobel alternatif Yacouba Savadogo.
Cependant, depuis quelques temps, la situation des forêts du pays est inquiétante (dégradation accélérée, convoitise, occupation illégale, etc.) et nécessite une veille citoyenne accrue pour préserver cet héritage.
Dans les lignes qui suivent, la CCPE prend l’opinion nationale et internationale à témoin sur deux sujets majeurs d’importance capitale et pour lesquelles elle reste engagée. Il s’agit du sort de la forêt classée de Kua et de l’alerte sur la forêt de prix Nobel alternatif 2018 Yacouba Savadogo qui est menacée et appelle de la part des autorités une réaction diligente et définitive.
Du sort de la forêt classée de Kua : la clarification de la position du Gouvernement attendue
Depuis avril 2019, par la volonté des autorités burkinabè de construire sur une partie (16 ha) de la forêt classée de Kua l’hôpital de référence promis aux habitants de Bobo, une nouvelle forme de pression doit désormais être prise en compte dans la situation des forêts classées du pays. Il s’agit du « déclassement de tout ou partie d’une forêt pour cause d’utilité publique ». Par la force des débats et le durcissement des positions entre pro et anti déclassement, le sujet de la forêt classée de Kua fait couler, depuis plus d’une année, beaucoup d’encre et de salive au Burkina Faso et au-delà de nos frontières.
Du 2 au 9 Mars 2020, s’est tenue la session du Comité National d’Aménagement des Forêts (CNAF) afin d’examiner les différents documents techniques en lien avec la Forêt Classée de Kua, de donner un avis technique sur lesdits documents et sur le déclassement d’une portion de la forêt classée. Les trente (30) membres dudit comité sont constitués de différents acteurs de l’administration publique, de la société civile et des populations riveraines, et ont été nommés conformément à l’arrêté interministériel n° 2019 -576 MEEVCC/MATDC/MINEFID/MSECU du 13 décembre 2019 portant création, attribution, composition, organisation et fonctionnement du CNAF.
A cette session la position commune de la société civile burkinabè engagée dans le domaine de l’environnement a été défendue par le Mouvement Écologique du Burkina (M.Ec.B) et le SPONG.
A la fin des travaux, les membres du CNAF ont unanimement soutenu la pertinence du projet de construction d’un Centre Hospitalier Universitaire dans la ville de Bobo Dioulasso. Aussi l’importance de la gestion durable de la forêt classée de Kua a-t-elle été reconnue par tous les membres. A l’issue des débats de cette première session, un avis majoritairement défavorable a été donné par les techniciens pour le déclassement d’une portion de la forêt classée de Kua.
Si l’on s’en tient à ces conclusions, la forêt classée de Kua devrait être épargnée et c’est le souhait des Burkinabè soucieux de la préservation, du peu de couvert végétal que nous avons encore et la pérennisation des ressources en eau de la ville de Bobo Dioulasso. Cependant, cet avis reste consultatif. C’est dire donc que la balle est dans le camp de l’autorité qui devra prendre une décision allant dans le même sens ou à l’encontre de cet avis majoritaire.
Les conclusions du CNAF viennent confirmer la position de la CCPE qui n’a cessé d’interpeller le gouvernement sur non seulement les risques liés à l’implantation de l’hôpital dans la forêt mais aussi sur les violations qu’il commettrait vis-à-vis des textes régissant nos forêts mais également des engagements et conventions signées et ratifiées par le Burkina Faso. Il serait donc complètement inadéquat de détruire une partie de la forêt pour construire cet hôpital dont la réalisation ne manque pas d’espace plus approprié pour être construit.
La CCPE interpelle le gouvernement sur la nécessité de rendre publique ses conclusions à l’opinion publique et définitivement d’aller dans le sens des anti déclassement pour préserver la forêt de Kua et préserver la ville de Bobo Dioulasso et la région des Hauts Bassins de toutes les conséquences négatives liées à l’option de détruire une partie de la forêt.
Du sort de la forêt du prix Nobel Yacouba SAVADOGO
Depuis un certain temps, le sommeil du vieux Yacouba SAVADOGO n’est pas du tout repos. Et pour cause, la mythique forêt qui l’a révélé aux yeux du monde est fortement menacée par des personnes prétendant être attributaires de parcelles couvrant une grande partie de sa forêt. Depuis lors, le vieux SAVADOGO profite de toutes les tribunes pour lancer son cri de détresse.
Connu comme « L’homme qui arrête le désert », il est une fierté pour le Burkina Faso tant au niveau national qu’international. Auréolé par la distinction de Prix Nobel Alternatif (Right Livelihood Award) 2018, il a été élevé au grade d’officier de l’Ordre national par le Président du Faso à l’occasion de la commémoration du 11 décembre 2018.
Yacouba SAVADOGO est l’icône de tout un peuple, le modèle de tout un continent, l’exemple de toute une génération et un trésor vivant de toute une planète en matière de lutte contre la désertification. Grâce à la belle et vaste forêt privée qu’il a mis 40 années précieuses de sa vie à construire de ses mains, il a permis que les projecteurs soient mis sur le Burkina Faso devant la scène internationale et qu’il soit perçu comme un modèle de pays sahélien engagé résolument dans la lutte contre la désertification. Mais chose curieuse, cette forêt qui a valu un prix Nobel à un Burkinabè pour la première fois dans l’histoire, cette forêt dont on parle tant depuis des années, n’est pas encore sécurisée. Elle est progressivement en train d’être dévastée et rien ne semble être fait jusque-là pour garantir et assurer sa pérennité.
Aujourd’hui, Yacouba ne sait plus à quel saint se vouer. Son incessant cri de détresse ne tombe que dans des sourdes oreilles. Impuissant, il assiste avec consternation au ravage progressif de sa forêt, de notre forêt. En effet, avec l’urbanisation rapide de la ville de Ouahigouya, la célèbre forêt de Gourga a vite été rejointe par les constructions des habitations spontanées communément appelées « non lotis ». En 2013, avec les derniers lotissements, une grande partie de la forêt a été attribuée en lotissement. Chaque jour que Dieu fait, nous dit Yacouba, les attributaires de ces parcelles viennent faire des marquages dans la forêt. Pire, certains ont même déjà construit dans la forêt, ravageant un grand nombre d’arbres. Récemment, à en croire le Prix Nobel Alternatif 2018, plus d’une soixantaine de grands arbres de sa forêt ont été abattus par lesdits attributaires.
Yacouba lance un cri de cœur aux plus hautes autorités afin que ces dernières volent à son secours pour sauver et surtout sécuriser sa forêt. Son grand rêve après tant d’années d’efforts et de sacrifices à construire tout seul une forêt de plus de 27 ha, c’est que celle-ci soit préservée. Mieux, il nourrit le vœu cher de mettre les espèces de cette forêt au service de la population. En effet, Yacouba est connu pour être un grand phytothérapeute. Il dit être déjà avancé dans la réalisation d’un projet de construction d’un grand centre de médecine traditionnelle par les plantes. C’est un projet qui lui tient à cœur car il nous confie qu’il a encore tant de choses à offrir à l’humanité avant de partir.
Nos autorités en charge de l’environnement sont interpellées. La forêt du vieux SAVADOGO est un trésor pour l’environnement, une école des savoir-faire endogènes. Au départ, il a fait face à une terre aride, dure et infertile qu’il a travaillée à rendre fertile. Par la technique du Zaï et de la RNA, il a fait pousser des milliers d’arbres sur cette terre.
Voir voler en éclat tous ces investissements, voir partir en fumée tout ce patrimoine environnemental mondial serait de l’irresponsabilité devant l’histoire, pour un pays sahélien comme le nôtre, qui ferait alors seulement mine de se battre auprès des autres États du monde pour stopper la désertification et inverser les tendances des conséquences du changement climatique. Il nous faut être logique dans notre engagement. Au-delà de la prise des coordonnées de la forêt récemment effectuée, au-delà même de l’idée de mobiliser des financements pour sa clôture, il faut un acte administratif de sécurisation foncière pour lever toute équivoque sur les risques de survie de ce joyau.
Le Président du Faso est interpellé, en dernier ressort, lui qui le 03 décembre 2018 recevait le Prix Nobel Alternatif pour lui traduire toute la fierté de la Nation. On se rappelle encore comme si c’était hier, le Président qui le félicitait en ces termes : “Savadogo Yacouba montre aux yeux du monde et aux yeux des Burkinabè, que la lutte contre la désertification n’est pas un vain mot” et d’ajouter que “ce prix est un honneur pour le Burkina Faso“.
Alors, vivement que les mesures idoines et les plus pressantes possibles soient prises pour préserver et sécuriser cette forêt afin de rendre à notre tour le monde entier fier du Pays des Hommes Intègres dans son engagement à préserver les maigres forêts qui lui restent.
A l’heure où le Burkina Faso s’apprête à célébrer la deuxième journée de l’arbre autour du thème ARBRE, SANTE ET RESILIENCE CLIMATIQUE au slogan avec pour recommandation « Il faut planter un arbre au profit d’un autre âge », il serait incohérent pour les décideurs de détruire ou laisser détruire des efforts déjà consentis pour édifier des forêts. Quel plus bel hommage pouvons-nous rendre et quel héritage gigantesque pouvons-nous laisser dans le domaine environnement qui sera autre que la préservation des forêts existantes doublé de la construction d’autres pour les générations à venir ?
C’est pour préserver donc cet héritage de foret, que nous appelons de tout vœu que la forêt de Kua et du vieux Savadogo soit épargnée une bonne fois pour toute que cette décision soit connue de l’opinion.
Tout en positionnant dans son rôle de veille, le CCPE exige par la même occasion, toute la transparence dans la gestion environnement et réitère qu’un pays sahélien comme le nôtre a plus à perdre s’il perd une partie de son couvert végétal ou permet une destruction de celle pendant que des solutions alternatives se présentent.
La CCPE exige du gouvernement une position claire et officielle sur le fait que la forêt de KUA n’est plus l’objet de destruction pour un éventuel hôpital
Invite le gouvernement à prendre toutes les dispositions pour sauver la forêt de Kua et celle du Vieux à Gourga qui n’a besoin que de clôture et d’interdiction de construction des habitats dans les aires que constituent le travail de plus de 40 ans reconnus par le monde entier.
La CCPE sait compter sur l’adhésion de l’opinion à ces combats pour préserver et défendre l’environnement. Par la même occasion, invite les défenseurs de l’environnement à rester en veille et mobilisée pour les actions à venir dans l’objectif toujours de PRESERVER NOTRE ENVIRONNEMENT, NOTRE BIEN COMMUN
Vive les forêts du Burkina Faso !
Vive l’environnement !
Vive la CCPE !
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