Gestion du COVID-19 au Burkina Faso : Investir dans la planification familiale
Le 9 mars 2020, le Burkina Faso déclarait son premier cas de COVID-19. Le 11 mars 2020, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a annoncé que le COVID-19 était devenu une pandémie mondiale. Dans la gestion de cette crise sanitaire, il faudrait ouvrir le bon œil afin de ne pas créer des déséquilibres dans la prestation des soins de santé et perturber les services essentiels de routine. La poursuite des investissements dans la Planification familiale (PF) dans ce contexte est un impératif.
La réponse gouvernementale pour faire face à la pandémie a consisté à développer un plan de réponse nationale et à mettre en place un comité national multisectoriel de gestion de la pandémie. Une autre mesure forte a été la diffusion du guide d’orientation de la continuité des soins et services de santé dans le contexte de la pandémie de Covid-19. Ce plan a mobilisé des ressources auprès des partenaires techniques et financiers et du secteur privé pour son financement.
Avec des demandes accrues de ressources publiques, le gouvernement burkinabè sera confronté à un arbitrage sur les services à privilégier dans le cadre du COVID-19. Aussi, la prise en charge de la pandémie est susceptible de créer des déséquilibres dans la prestation des soins de santé et de perturber les services essentiels de routine. L’OMS recommande alors de considérer comme hautement prioritaire la poursuite de l’offre de services permettant d’éviter la mortalité maternelle et infantile pendant la crise.
Une étude de l’Institut Guttmacher estime qu’une baisse proportionnelle de 10% de l’utilisation de contraceptifs de courte et longue durée aurait pour conséquence une augmentation de 49 millions du nombre de femmes ayant un besoin non satisfait en contraception moderne dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, et provoquerait 15 millions de grossesses non désirées supplémentaires. La crise du COVID-19 risque de stopper, voire d’inverser les progrès mondiaux en faveur d’un accès universel à la santé et aux droits sexuels et reproductifs.
De ce qui précède, il ressort que la priorisation de la Planification familiale (PF) en contexte du COVID-19 et la garantie d’un financement suffisant pour les services essentiels de Planification familiale et de Santé sexuelle et reproductive (PF/SSR) pendant cette crise présente plusieurs avantages pour les pays :
- Investir dans les services de SSR/PF permet de sauver des vies, car de précédentes épidémies, comme celle de la maladie à virus Ebola en Afrique de l’Ouest en 2013-2015, ont montré que la perturbation des services de santé essentiels peut causer plus de décès. En Sierra Leone, on estime que la diminution de l’utilisation des services de santé s’est traduite par des décès maternels, néonatals et mort-nés supplémentaires entre 3 600 et 4 900, contre environ 4 000 attribués directement au virus Ebola, et qu’entre 42 et 44 % de ces décès étaient dus à la réduction des services de planification familiale.
- Investir dans les servies de SSR/PF permet de réduire la pression sur les systèmes de santé déjà surchargés, car on estime que le faible accès aux services de PF pendant l’épidémie d’Ebola a entraîné 1,2 million de grossesses non planifiées. « Timothy Roberton et al » estime comme effet indirect du COVID 19 que les décès maternels dus à une couverture réduite de 6 mois des services PF représenteraient 6,9% des décès maternels supplémentaires. La planification familiale reste donc l’une des interventions les plus efficaces pour réduire la mortalité maternelle.
- Invertir dans les services de SSR/PF permet de protéger les plus vulnérables quand il s’avère nécessaire que le COVID-19 va exacerber les inégalités existantes auxquelles sont confrontés les groupes vulnérables, notamment les personnes handicapées et les personnes souffrant de troubles mentaux. Le gouvernement doit veiller à ce que les droits de ces groupes soient protégés et ne soient pas davantage érodés par les mesures de confinement mises en place.
- La PF produit un retour sur investissement (RSI) de 30 à 50 US$ par dollar investi, selon les études du Copenhague Consensus, soit une moyenne de 40 US$, résultant d’une réduction de la mortalité maternelle, néonatale et infantile, une diminution des grossesses non désirées, des avortements non médicalisés, des mort-nés et de l’amélioration des services sanitaires de PF.
Partant de ces évidences, « Options Consultancy Services », à travers le programme WISH (Santé Sexuelle Intégrée de la Femme), a entrepris dans le contexte du Covid-19 plusieurs actions pour appuyer les efforts de la société civile dans le suivi et la mise en œuvre des engagements de l’Etat en faveur du financement public au profit de la SR/PF en lien avec les engagements du pays à FP2020, la CIPD+25 et le Partenariat de Ouagadougou.
Ces actions ont consisté à :
- Assister le mécanisme de redevabilité (Groupe Technique Santé de la Reproduction – GTSR) à intensifier des actions de plaidoyer auprès des décideurs et sur la base d’évidences pour le maintien des services de PF en contexte de COVID-19.
- Outiller le Groupe Technique SR en mettant à sa disposition des outils pour le tracking budgétaire et le suivi des engagements (Scorecard) afin d’assurer la veille sur la mise en œuvre des engagements du pays sur la SR/PF.
- Renforcer les compétences des parlementaires sur les outils de suivi et d’analyse budgétaire pour être plus performants lors des sessions d’arbitrage budgétaire afin d’interpeller l’exécutif sur les engagements financiers en faveur de la PF.
- Partager des données probantes avec les médias et contribuer au renforcement de leur engagement pour soutenir et accompagner les efforts de plaidoyer des OSC au profit du financement de la PF.
- Appuyer le Ministère de la santé pour une revue rapide des capacités des sites à répondre au COVID-19 et assurer la continuité des soins essentiels en contexte de Covid-19 et dont les résultats contribueront à renforcer les argumentaires de plaidoyer au profit de la continuité des services essentiels.
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