Mariage légal au Burkina Faso : « Biens séparés » ou « biens communs » ?
Le « régime matrimonial » est constitué par un ensemble de dispositions légales ou conventionnelles qui règle les rapports patrimoniaux entre époux, selon le dictionnaire juridique. Cependant, le choix d’un régime ou d’un autre n’est toujours pas chose aisée ni pour les jeunes couples ni pour les couples plus âgés. Entre préférences, bons choix et convenances, la différence n’est pas toujours grande mais crée souvent des désagréments qui entrainent des conséquences sur la vie de couple. Afin de se pencher sur la question, nous avons tendu notre micro à des jeunes et à une psychologue et conseillère conjugale.
Anatole est un quinquagénaire qui est à son deuxième mariage. Commerçant au grand marché de Ouagadougou, il officie uniquement dans la vente des motocyclettes. Il est père de deux filles. Il nous explique pourquoi, pour une histoire de régime matrimonial, son premier mariage n’a pas marché même avec l’amour et l’envie qui y étaient. « Je me suis marié à l’âge de 35 ans avec ma copine avec qui on avait plus de 10 ans de relation. Pour le choix du régime matrimonial, j’ai pris des conseils chez des ainés qui m’avaient dit d’opter pour le régime biens communs », relate Anatole.
Après une vie de couple de 7 ans, les problèmes du « tonton » ont commencé. « J’ai eu un problème avec un associé à qui je devais beaucoup d’argent. Nous sommes allés au tribunal et j’ai perdu. Donc je devais lui rembourser une importante somme d’argent. Pourtant en ce moment, ma femme était à la tête d’une association de femmes et elle gérait les revenus de son association dans le même compte que moi », explique-t-il.
Tonton Anatole, comme certains l’ont surnommé, va plus loin en nous expliquant que la justice a fait son travail et il se trouvait que les biens de sa femme et ceux de son association ont été aussi utilisés pour rembourser les dettes du chef de famille. « Après tout le processus, je me suis retrouvé ruiné. Ma femme n’a pas supporté cette situation et pour ne pas arranger les choses, son association lui réclamait les revenus. Et c’est à partir de là que tout est parti de mal en pire », conclut-il.
Quelques mois après les évènements, le mariage d’Anatole ne tenait plus. Une situation qui les a conduits au divorce, après maintes consultations chez des conseillers matrimoniaux. L’exemple du tonton quinquagénaire interroge plus d’un jeune qui se présente à la porte du mariage. Ces jeunes qui, le plus souvent se prêtent aux conseils des proches comme l’a fait le tonton, ignorent l’importance des spécialistes du domaine, si ce n’est à l’étape du non-retour, c’est-à-dire le divorce ou la survenue des problèmes, font remarquer des spécialistes du domaine.
« Le régime matrimonial renvoie à un choix que tu fais dans le cadre du code des personnes et de la famille. C’est un choix dans lequel on distingue la valeur immatérielle de l’amour à sa valeur matérielle », explique Karidja Sinka/Dramé, psychologue et conseillère matrimoniale et conjugale. Un choix obligatoire pour tout mariage légal. Des choix qui devraient convenir aux deux futurs mariés pour une stabilité à long et court terme.
« Le régime parfait est le régime biens communs »
Disséquer les deux régimes pour les voir en détail s’impose pour mieux comprendre cette étape inéluctable dans le mariage, dit-elle. Pour le régime biens communs, la conseillère conjugale fait savoir qu’il s’agit de la fusion des biens pour en faire un usage collectif. « C’est un état d’esprit qui veut qu’on mette tout ce qu’on a ensemble et essayer de planifier le mode d’utilisation en fonction des priorités ». Un régime, qui selon la psychologue est comparable au budget d’un État d’où tous les travailleurs tirent leurs salaires.
Sollicités sur la question, des Ouagalais n’hésitent pas à se prononcer. C’est le cas de Tidiane Zongo, comptable dans une entreprise de la place. Le jeune homme de 25 ans indique que son choix est déjà porté sur le régime biens communs ; et ce, depuis longtemps. « Pour moi, le régime parfait est le régime biens communs. Plusieurs raisons justifient mon choix. Mais la principale, c’est que ça permet d’instaurer un climat de confiance au sein du couple », confie-t-il.
A l’opposé, Julie, étudiante en droit, estime que le régime biens communs « n’est que source de problèmes ». Pour elle, « les vrais » problèmes de ce régime arrivent quand une personne se retrouve dans des difficultés financières. « Le régime biens communs est, pour moi, une mauvaise affaire pour les couples surtout en ces temps d’entreprenariat. Si ton conjoint, un homme d’affaire, se retrouve avec des dettes à éponger, ton argent et tes biens vont contribuer à payer des crédits dont tu ignorais l’existence », défend-elle.
La psychologue soutient la thèse de la saisie des biens, sans pour autant mettre l’accent sur la fragilisation du mariage. Etant entendu que les conjoints se marient pour le meilleur, mais aussi pour le pire !
Le régime biens séparés, « synonyme de manque de confiance » ?
Le régime biens séparés, toujours selon la psychologue, renvoie sa justification à l’article 295 du code des personnes et de la famille. Ledit article stipule que « les deux époux ont le droit d’exercer une profession sans le consentement de l’autre », donc des revenus personnels. Mais les points de vue divergent sur cette question.
Abdoul Rasmané Kaboré, un jeune de la trentaine et nouvellement marié sous le régime biens communs, est convaincu que le mariage en régime biens séparés est « synonyme de manque de confiance ». « Si tu as confiance à ta conjointe, tu ne dois pas hésiter à signer en biens communs et vice versa. Quand les gens parlent des risques de saisies et autres, ça sera la contribution de l’autre à la résolution des problèmes », ajoute-t-il.
Le régime biens séparés prend l’avance sur le régime biens communs
Julien Congo est étudiant en master 1 en économie. Il estime que le régime biens séparés est « le meilleur » régime. « Le mariage en biens séparés offre des avantages énormes. Ça te permet de protéger ta famille des problèmes financiers et également ça permet d’instaurer un certain climat de confiance dans le foyer. Les deux époux s’entendent donc à ne pas se mêler des affaires de l’autre et l’argent est séparé de l’amour qui vous réunit », soutient-il.
Pour le régime biens séparés généralement adapté aux couples mariés sous l’option de la polygamie, Karidja Sinka/Dramé explique que c’est un régime qui, compte tenu du boom de l’entreprenariat au Burkina, est en train de prendre de l’avance sur le régime biens communs. Le régime de la communauté universelle des biens est un troisième régime qui existe mais n’est pas trop répandu du fait de sa complexité.
Le code des personnes et de la famille autorise toutefois les couples à changer de régime matrimonial au bout de deux ans de mariage en son article 316.
Basile SAMA
Burkina 24
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Voilà! Le problème posé! Depuis tout allait bien en raison du consentement et de la subordination de madame. Et monsieur abusait. Mais la roue tourne. Je crois que ce régime matrimonial et ses dispositions légales sont dans le fond en conflit avec notre mentalité de vie phallocrate et illettré. On a vu des cas de biens communs non aboutis parce que les voix de dehors jugent monsieur non-autonome; et donc commandé par sa femme dans les débats et choix. Et des interrogatoires devant les chefs de quartiers ont dépêché donc la séparation. Et tout le monde trouve que les femmes diplômées et salariées en général sont dures à gérer. Alors à chaque peuple son régime. Le mieux c’est de séparer pour garder monsieur chef et madame mère avec chance de refuge personnel ailleurs en cas de cas.