Etude : La prédication verbale à l’accompli en koromfe de Mengao

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Ceci est une étude réalisée par GUIRE Inoussa, INSS/CNRST Ouagadougou [email protected] et DIALLO Asséta, INSS/CNRST Ouagadougou [email protected], intitulée « La prédication verbale à l’accompli en koromfe de Mengao ».

Résumé

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Cet article tient à vulgariser les travaux de description de la morphologie verbale en koromfe de Mengao par (Guiré & Diallo, 2022). Il ressort de cette analyse que la morphologie verbale varie en fonction du mode indicatif et impératif et des aspects accompli et inaccompli. On note deux formes distinctes de l’inaccompli nommées inaccompli 1 et inaccompli 2 dont l’emploi dépend du contexte et de la spécification sémantique voulue. On note également que pour chaque aspect, la morphologie verbale, notamment le prédicatif et sa modalité verbale, reste invariable quel que soit le changement du sujet en personne ou en nombre.

Des cas de prédications complexes ont aussi été observées avec des verbes sans infinitifs et dont le fonctionnement aspectuel diffère quelque peu de la prédication verbale habituelle. Cette description pourrait servir dans la mise en place d’une didactique de la grammaire sur la prédication en koromfe de Mengao. Nous nous limitons dans les colonnes qui suivent, à l’aspect accompli.

Introduction

Lorsqu’on s’intéresse à la prédication dans la langue française, on admet d’office que le verbe est un mot qui exprime une action, un état ou un devenir et présente un système complexe de formes en fonction du temps, du mode et des personnes. La prédication en koromfe de Mengao, fonctionne-t-elle de la même manière en koromfe lorsqu’on sait que c’est à travers le fonctionnement du verbe que la proposition toute entière est comprise ? On ne peut élaborer l’orthographe d’une langue et participer à faire de la langue koromfe un outil d’éducation, d’alphabétisation et de développement sans la description du système de prédication verbale et non verbale. L’étude du système verbal koromfe permet de mieux s’imprégner de la structure de l’énoncer, du processus de la prédication dans cette langue. Elle nous est d’autant plus importante que nous sommes locuteur du koromfe. L’objectif de ce travail est de décrire le système verbal du koromfe de Mengao. Ainsi, après une présentation succincte de la morphologie générale du verbe en koromfe de Mengao, sont décrits le fonctionnement sémantique de la conjugaison à partir d’un inventaire des modalités verbales, et la prédication verbale complexe selon la translation du constituant verbal dans cette langue.

Résultats

Le tableau suivant est le corpus des verbes que nous avons pu collectés dans les différents documents puis constitué à partir des entretiens avec les informateurs de la langue koromfe. Il s’agit de l’inventaire des 65 verbes collectés identifiés à partir de leur forme infinitive. Pour chaque verbe présenté par ligne, la première colonne donne la base verbale, puis suivent successivement les colonnes de l’injonctif pour le mode impératif, de l’accompli, de l’inaccompli 1, de l’inaccompli 2 pour le mode indicatif et enfin celle du sens de sa forme à l’infinitif.

Tableau 1: inventaire des verbes et flexion aspectuelle

Base, lexème Infinitif Injonctif Accompli Sens de l’infinitif
/sɩb-/ sɩbam sɩbʋ sɩbʋ mourir
/zamb-/ zambam zamba zambɛ tromper
/kɛnd-/ kɛndam kɛndɩ kɛndɩ finir
/kɔ̃nd-/ kɔ̃ndam kɔ̃ndʋ kɔ̃ndʋ trouver
/gond-/ gonndam gonndu gonndu partir, passer
/wuf-/ wufam wufu wufu emprunter, prêter
/tɛng-/ tɛŋgam tɛŋgɩ tɛŋgɩ accompagner
kɛsɛŋg-/ kɛsɛŋgam kɛsɛŋgɩ kɛsɛŋgɩ mélanger
/hɔ̃ŋg-/ hɔ̃ŋgam hɔ̃ŋgʋ hɔ̃ŋgʋ montrer
/hoig-/ hoigam hoigi hoigi coucher(un bébé)
/kek-/ kekam keki keki enlever
/birg-/ birgʌm birgi birgi noircir
/kʌus-/ kʌusʌm kʌusu kʌusu crier
/zull-/ zullʌm zullu zullu se courber, se baisser
/jɪs-/ jɪsʌm jɪsi jɪsi puiser
/jis-/ jisʌm jisi jisi suffir
/sɛ̃k-/ sɛ̃kam sɛ̃kɛ sɛ̃kɛ hacher, diviser
/kãs-/ kãsam kãsɩ kãsɩ déchirer
/dɔ̃-/ dɔ̃ɔ̃m dɔ̃ dɔ̃ rêver
/sã-/ sããm sã sã sauter
/dɛ̃n-/ dɛ̃nam dɛ̃n dɛ̃n tirer
/hɛ̃n-/ hɛ̃nam hɛ̃n (i) hɛ̃n (i) creuser
/wɛ̃n-/ wɛ̃nam wɛ̃n wɛ̃n tresser, délayer
/nɔ̃n-/ nɔ̃nam nɔ̃n nɔ̃n dépecer, dépouiller
/pɛ̃n-/ pɛ̃nam pɛ̃n pɛ̃n tresser
/wɛ̃nn-/ wɛ̃nam wɛ̃n wɛ̃n boucher (un trou)
/nɔ̃­m-/ nɔ̃­mam nɔ̃­m nɔ̃m écraser
/pɔ̃­m-/ pɔ̃­mam pɔ̃­m pɔ̃m frapper
/wɔ̃­m-/ wɔ̃­mam wɔ̃m wɔ̃m manger,macher
/dɔ̃­m-/ dɔ̃­mam dɔ̃­m dɔ̃m mordre
/dɔm-/ dɔmam dɔm dɔm toner
/hen-/ henʌm hen hen étaler
/sem-/ semʌm sem sem gémir
/gɔm-/ gɔmam gɔm gɔm chasser
/gʌr-/ gʌrʌm gʌri gʌri roter
/lar-/ laram lari Lari chercher
/for-/ forʌm for For(u) Piler (pour enlever le son)
/fɩr-/ fɩram fɩrɩ fɩrɩ avaler
/di-/ diam manger
/du-/ duʌm du du brûler
/dʋ-/ dɔɔm jeter
/li-/ leem li Li oublier
/lig-/ ligʌm ligi Ligi couvrir
/liget-/ ligetʌm ligeti Ligeti découvrir
/fig-/ figʌm figi Figi enterrer
/figet-/ figetʌm figeti Figeti enterrer
/kerg-/ kergʌm kergi Kergi disparaître
/keret-/ keretʌm kereti Kereti apparaître
/sumb-/ sumbʌm sumbu Sumbu fermer
/sumbot-/ sumbotʌm sumbotu Sumbotu ouvrir, descéler
/tom-/ tomʌm tom Tom nouer un pagne
/tombot-/ tombotʌm tombotu Tombotu détacher
/tuk-/ tukʌm tuko Tukol s’asseoir
/tukl-/ tukolʌm tukol Tukol Faire asseoir
/sɩr-/ sɩram sɩrɩ sɩrɩ sortir
/sɩrs-/ sɩrsam sɩrsɩ sɩrsɩ faire sortir
/gãŋ-/ gãŋam gãŋ Gãŋ refuser
/gãŋgl-/ gãŋgalam gãŋgal Gãŋgal empêcher
/zak-/ zakam zakɩ zakɩ flatter, amuser consoler
/zakm-/ zakamam zakam Zakam flatter, amuser de façon répétée
/laŋs-/ laŋsam laŋsɩ laŋsɩ verser
/laŋsm-/ laŋsəmam laŋsəm laŋsəm verser
/hãŋs-/ hãŋsam hãŋsɩ hãŋsɩ arranger, aider
/hãŋsm-/ hãŋsəmam hãŋsəm Hãŋsam arranger aider dans différentes actions, bricoler

Nous constatons que lorsque la base est une syllabe fermée par une consonne nasale bilabiale [n] ou alvéolaire [n] ou encore une latérale [l], la base léxématique correspond à la forme de l’accompli. Par contre, si la syllabe est fermée par une vibrante [r], la voyelle de la modalité verbale de l’accompli devient facultative.

Exemples :

semʌm            « gémir »

Də sem            « il a gémi »

Forʌm             « piler (pour enlever du son) »

Də for  a yãna « il enlevé le son du mil »

Une règle grammaticale de type « Les modalités verbales de l’accompli 1 et et de l’impératif se réalisent totalement sauf devant -l-, -n-, -m- et r » pourrait être formulée dans le cadre de l’enseignement de cette langue. L’adjonction de dérivatifs modifie la structure de la modalité verbale à l’accompli et à l’impératif.

Morphologie générale du verbe et inventaire des modalités verbales

Dans le système verbal koromfe il n’y a pas de modification morphologique du verbe en fonction du genre ou du nombre du sujet. Néanmoins, une flexion est constatée dans le passage d’un aspect à un autre. Nous avons commencé par identifier ce qui peut être considérer comme infinitif. Pour nous, l’infinitif est la forme nominale du verbe (mode impersonnel) exprimant l’idée de l’action ou de l’état d’une façon abstraite et indéterminée. « Il peut assumer dans la phrase toutes les fonctions du nom » (Dubois, et al., 2002, p. 246). A ce titre, nous considérons le suffixe –am comme la marque de l’infinitif. Ce qui nous permet de reconnaître la base verbale et de confirmer cette idée par la possibilité de flexion ou de commutation de ce morphème avec d’autres éléments qui marquent les aspects accompli ou inaccompli, avec certainement des modifications phonologiques à certains endroits.

Morphologie du verbe en koromfe

Le verbe en koromfe présente sous la forme d’une base lexématique ou dérivée suivie de la modalité verbale. On pourrait schématiser cette morphologie comme il suit :

Base lexématique (+ n. derivatif) + modalités verbales

Tableau 2: exemple de morphologie verbale

Verbe à l’infinitif base Modalité verbale Sens du verbe
ligʌm Lig- -ʌm couvrir
ligetʌm Liget- -ʌm découvrir
sumbʌm Sumb- -ʌm fermer
sumbotʌm Sumbot- -ʌm ouvrir
sɩram sɩr- -am sortir
sɩrsam sɩrs- -am Faire sortir

 

L’aspect

L’aspect nous renseigne sur le déroulement du procès. Précise s’il est achevé ou non, si on envisage le procès dans sa continuité, si c’est le point initial ou celui final, s’il n’a lieu qu’une fois ou se répète, s’il a un terme ou un résultat Il traduit également la représentation que le sujet parlant se fait du procès exprimé par le verbe quant à son déroulement. En koromfe nous distinguons comme aspect, l’accompli et l’inaccompli.

L’accompli décrit les procès achevés et met l’accent sur le caractère achevé de l’action exprimée par le verbe ou sur le résultat de cette action. A partir du tableau 1, on peut dire que la modalité verbale de l’accompli se réalise /-V/. Le timbre de cette voyelle s’harmonise avec les voyelles de la base verbale.

Exemple :

Də    gonndu    dɛ̃ɩ̃                          « il est parti hier »

// il h. /  partir acc./ hier //

A    doŋfe      koŋ   sɩbʋ                    « ce serpent est mort »

//det./ serpent sg./ dem./ mourir acc.//

Le fonctionnement de la conjugaison

Soit le verbe gonndam « partir », le quatrième sur notre tableau n°1, nous allons observer sa morphologie à toutes les personnes à l’accompli. Nous notons que le pronom délocutif a trois formes, une forme pour tout ce qui se rapporte aux humains, une autre pour les non humains et une forme pour le diminutif. Le délocutif pluriel n’a cependant pas de diminutif.

Tableau 3: conjugaison en koromfe

koromfe Sens en français
gonnde je suis parti
N gonnde Tu es parti
gonnde Il (non humain) est parti
gonnde Il (non humain) est parti
ga gonnd (diminutif) est parti
ʋ gonnde nous sommes partis
Na gonnde Vous êtes partis
ba gonnde Ils (humains) sont partis
ɩ gonnde Ils (non humains) sont partis

Nous constatons qu’il n’y a pas d’impact de la personne, du genre (humain/non humain) ou du nombre sur la morphologie du verbe. Seule la modalité verbale est nécessaire.

La négation

La négation est la mise en polémique ou le refus d’une assertion. On admet une position A et son opposé ou son contraire qui est la position B qu’occupe sémantiquement le locuteur. Ceci parce que « la description de la négation linguistique constitue une première validation de l’approche polyphonique » (Moeschler & Auchlin, 2009, p. 133).

La négation est exprimée en koromfe par des morphèmes externes au verbe, notamment la particule ba placée avant le verbe lorsqu’elle porte sur le verbe.

Exemple :

də     bellaa                                          «    il vient » ou «  il viendra. »

//Il h./  venir/inac.1 //

də     ba   bellaa                                               «    il ne vient pas » ou «  il ne viendra pas. »

//Il h./nég./   venir/inac.1 //

Cependant, on trouve des formes amalgamées issues de la fusion entre la particule négative et le pronom.

daa          bella                                                «    il ne vient pas » ou «  il ne viendra pas. »

//Il h.+nég./   venir/inac.1 //

L’impératif

En koromfe, nous n’avons identifié que le mode infinitif, le mode indicatif et le mode impératif. Le mode indicatif est composé de l’accompli et l’inaccompli. Le mode impératif est le mode par lequel une injonction est donnée. C’est la forme verbale exprimé dans la colonne 3 du tableau 1 ci-dessus.

Exemple :

gonndu        ze                      « quitte là-bas »

//quitter inj.  /    là-bas //

hɔ̃ŋgʋ        mɛ  n   yã            « montre-moi ta mère »

//montrer inj. /moi/ tu / mère sg. //

On remarque que c’est l’absence du sujet qui fait la différence entre l’impératif et l’accompli.

Exemple :

Də  gonndu         ze                           « il est passé par làbas »

//il /  quitter acc.  /    là-bas //

Də  hɔ̃ŋgʋ        mɛ   n   yã                « il m’a montré (présenté) ta mère »

// il  /  montrer acc. /moi/ tu / mère sg. //

Yaυ                                           «  va »

ʋ      yaυ             na                  «  allons »

// nous/ aller/acc./  vous //

Yaυ            na                             «  allez »

// aller/acc./  vous //

A la 2è personne du singulier de l’impératif, le pronom sujet est omis tout comme en français.

A la 1re personne du pluriel, le pronom garde sa place comme à l’indicatif mais le pronom [na] « vous » est repris et postposé au verbe. C’est cette postposition qui marque l’impératif.

A la 2è personne du pluriel le pronom [na] n’est repris après le verbe.

Na + verbe (à l’indicatif accompli) = >   + verbe + na  (à l’impératif)

Exemple :   Na yakυ   « vous partez » (indicatif)    = >      yakυ   na !  « Partez. » (Impératif)

Le prédicat verbal complexe

Il existe des verbes qui n’admettent qu’un seul aspect ; l’accompli.

Exemple : baɩ̃ : « ne pas savoir »

ŋgo, ŋgose : « ne pas être, ne pas avoir »

Un certain nombre de verbes en koromfe ont la particularité d’admettre que les modalités verbales de l’accompli et de l’inaccompli comme forme aspectuelle, mais leurs sens ne peuvent être rendus en français qu’au présent. Ils n’ont ni une forme infinitive, ni une forme impérative. Ce sont :

Accompli 2 Inaccompli 1 Sens (de l’infinitif inexistant)
fɛ̃fʋ fɛ̃faa rester
Fefu fefʌʌ vivre
fɔ̃nnʋ fɔ̃nnaa avoir peur
halfʋ halfaa appartenir
hifʋ hifʌʌ être débout
sagfʋ sagfaa être à genoux
wɔ̃fʋ wɔ̃faa avoir

Exemples :

1)  A    doŋfe      koŋ   fefu        bii ?                         « Est-ce que ce serpent vit ? »

//det./ serpent sg./ dem./ vivre acc./ inter.//

2)Ahã, ka   n   worongu       gʋ,      gʋ      fefʌʌ.        « Oui, ne t’en approches pas, il vit. »

//oui/ nég./ tu./ approcher imp./ il n.h. / il n.h. / vivre inac.//

Dans l’exemple en 1), le verbe fefu porte une modalité à l’accompli, mais son sens ne peut être qu’au présent. Mais dans l’exemple en 2), la modalité verbale de fefaa est à l’inaccompli, le temps de l’énonciation et celui de l’énonciateur sont identique. Dans les deux exemples, la visée est prospective, c’est-à-dire orientée vers le futur tout en prenant pour temps-origine, le présent. On trouve des verbes d’action ou d’état qui fonctionnent ainsi. Le paramètre temporel se particularise en prenant pour référentiel de base un temps dans lequel la rétrospective (le passé) est impossible. Ceci se rencontre dans certaines langues comme l’explique Delplanque (2012).

Le passé rendu par la particule prépositive da adverbe de temps

Le terme da est une particule préposée à un verbe pour marquer généralement l’antériorité, qu’un procès a lieu à une période reculée dans le temps. Il est utilisé aussi bien avec le verbe à l’inaccompli qu’à l’accompli.

Exemples :

də      diraa            a     fãɩ̃                           « il mange du tô »

//Il h./  manger inac.1/ det./   tô  //

Də    da           diraa            a     fãɩ̃              « il mangeait du tô »

//Il h./  adv.passé /  manger inac.1 det./   tô  //

Də     yellaa            a    dɔɔfi                                    « il garde des animaux »

// Il h. / regarder inac.1/det./ . animal pl.//

Də   da  yellaa          a      dɔɔfi                       « il gardait  des animaux »

//Il h./ regarder inac.1/  det./. Animal/pl. //

Lorsque la particule da est utilisé, la modalité verbale de l’inaccompǁi 2 indiquera la durée dans le passé.

Les adjectifs à rôle prédicatif

Les adjectifs verbaux ont généralement la terminaison -a(a) qui est la même chose que le marqueur de l’inaccompli 1. Une liste des adjectifs verbaux est donnée ci-dessous.

Adjectifs sens adjectifs sens
Dɔyaa être long kanna être amer
fɛləmaa être mince senəfaa être beau, jeune
homnʌʌ être chaud tʋŋəna être profond
kãŋənaa être dur, difficile wʋrfaa être petit

 

Le verbe koromfe connaît des expansions qui peuvent être des idéophones et interjections, des adjectifs issus des formes verbales, des adverbes.

Pour les idéophones, nous avons des termes comme rɛ̃ɔ̃rɛ̃ɔ̃rɛ̃ɔ̃, tatãndɩtãndɩ, kurum, sɩɩɩɩ, foooo, zɩga, ziga, ziga.pããã.

Exemple :

Ba   wɔ̃fʌʌ      ze       tatãndɩtãndɩ                « ils sont entrain de grouiller »

//Ils / avoir inacc./là-bas/ idéophone//

Də     binmʌʌ              kurum                       « il est très noir »

// il h./être noir inacc./ idéophone//

Də    hɩfaa              sɩɩɩ                                 « il est arrêté tout tranquille »

//il h./être débout inac./ idéophone//

Qualification de constituant verbal

En koromfe il existe des verbes qui fonctionnent comme de auxiliaires ; ce sont des verbes comme zɔmmaa « vouloir » (zɔ̃ est la forme réduite). Nous n’avons pas une liste exhaustive mais ce verbe ne change pas nécessairement le sens d’une phrase. Il n’a pas d’infinitif.

Mʋ zɔ̃ɔ mʋ   bɛ           sã       « je viendrai demain »

//Je /veux/je/ venir acc.1/ demain//

La prédication non Verbale

L’emploi des particules affirmative et emphatique [la] et celle négative [dɔ] après un nom ou un pronom permet d’avoir une prédication sans verbe.

Exemple :

ʋkɔ    la             « c’est moi »                      υkɔ       dɔ              « ce n’est pas nous »

//nous/ part.emph//                                                   // nous   / part. neg.//

Esquisse de discussion

Dans son dictionnaire de koromfe (1986 : XIII) monsieur J. Rennison considère comme infinitif le radical verbal + -am. Mais monsieur (Ouedraogo, 1994, p. 42) souligne qu’il n’est pas d’accord avec Mr Rennison sur ce point sans pour autant se prononcer sur le statut ce morphème –am.  Plus tard, Rennisson (1997) n’est plus affirmatif sur ce morphème comme marque de l’infinitif. Ainsi, il mentionne qu’il y a quatre (4) formes de flexions morphologiques principales pour le verbe qui sont :

  1. la forme non marquée du verbe (correspondant à la base verbale avec quelques ajustements phonologiques)
  2. la forme du temps passé (le suffixe -ɛ ajouté à la base verbale)
  3. l’aspect « durée » (normalement avec la suffixation de –d et ses variantes phonologiques et d’autres suffixes à la base verbale)
  4. l’aspect progressif (formé par la suffixation de –aa à l’aspect durée sans exception si cette forme existe)

Mais nous avons préféré abandonner les termes comme présent (présent), passé (past tense) et futur (future) et privilégier les aspects accompli et inaccompli. Nous reconnaissons cependant son apport inestimable dans différents points relevant de cette variante.

Conclusion

Il faut retenir de tout ce qui vient d’être dit dans cette analyse du verbe en koromfe de Mengao que le système de prédication a sa particularité propre qui s’exprime par une organisation en deux aspects ; l’aspect accompli et l’aspect inaccompli qui appartiennent tous au mode indication. L’inaccompli se reparti en inaccompli1 et en inaccompli 2 dont les emplois dépendent du contexte d’énonciation. La forme du mode impératif est calquée surtout sur celle de l’accompli avec soit une absence, soit une disposition particulière du syntagme nominal en fonction sujet. On note également que dans le fonctionnement de la conjugaison, ni le genre, ni la personne encore moins le nombre n’ont un impact sur la morphologie du verbe. Une fois associé à une modalité verbale, le verbe garde sa forme à tous les aspects et modes. Des cas de prédications complexes ont été observées, notamment avec des verbes qui n’ont pas d’infinitifs et qui ont la capacité de porter des modalités verbales de l’accompli mais qui expriment des actions ou des états prospectifs. Quant à la prédication non verbale, elle s’exprime par la juxtaposition d’un syntagme nominal à fonction sujet et de la particule négative dɔ. Ce travail, loin d’avoir épuisé les spécificités de la prédication en koromfe, statue au moins sur ce qu’est l’infinitif en koromfe et présente les possibilités d’utilisation des formes distinctes de l’accompli, de l’inaccompli et de l’impératif dans la prédication verbale. Il pourrait servir à guider la mise en place d’une norme orthographique et grammaticale, outil didactique dans l’enseignement la langue koromfe.

Bibliographie

Creissels, D. (1991). Description des langues négro-africaines et théorie syntaxique. (ELLUG, Éd.) Grenoble.

Delplanque, A. (2012). Formes et maléabilité: topologie des opérations énonciatives. Ouagadougou-Tours. Récupéré sur https://hal.science/hal-00745067

Dubois, J., Giacomo , M., Guespin, O., Marcellesi, C., Marcellesi, e.-B., & Mevel, J.-P. (2002). Dictionnaire de linguistique. (Larousse-Bordas, Éd.) Paris.

Guiré, I., & Diallo, A. (2022, janvier). Le système de prédication en langue koromfe, variante de Mengao. Akofena, 1(5), pp. 481-494. Récupéré sur https://www.revue-akofena.com

Houis, M. (1977). Linguistique africaine. Ecole pratique de Hautes études, 4e section, pp. 925-930. Récupéré sur https://www.persee.fr/doc/ephe_0000-0001_1976_num_1_1_6310

Moeschler, J., & Auchlin, A. (2009). Introduction à la linguistique. (A. Colin, Éd.) Paris.

Ouedraogo, B. (1994). Esquisse phonologique du koromfe. Mémoire de maîtrise, Université de Ouagadougou, Département de linguistique, Ouagadougou.

Rennison, R. (1986). dictionnaire koromfe de Mengao (dialecte de Mengao). Vienne: Buske.

Rennison, R. J. (1997). Koromfe descriptive grammars. (Routledge, Éd.) London.

 

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