Exploitation artisanale de l’or: une journée sur le site de Yabiro, dans le Houndé
Houndé, ville du Burkina, dans la région des Hauts-Bassins. Ces dernières années, la localité s’est révélée l’attraction de nombreux burkinabé suite à la découverte d’or dans le sous-sol. A cette période de l’année et suite aux mesures gouvernementales, les sites aurifères présentent un autre visage et se révèlent moins animés qu’en saison sèche. Mais il n’y avait pas moins des choses qui ont intéressé l’équipe du Centre d’Information et de formation en matière des droits humains en Afrique (CIFDHA), avec son partenaire suisse du Centre de conseils et d’appui pour les jeunes en matière de droits de l’homme (CODAP) et des experts de la responsabilité sociale des entreprises, en mission exploratoire. Récit d’une journée sur le site d’orpaillage de Yabiro.
Depuis le début du mois de juillet, le site d’orpaillage de Yabiro, à quelques encablures de la ville de Houndé, tout comme les autres sites d’exploitation artisanale, est dans une période morte en raison des mesures de sécurité gouvernementales. En abordant ce territoire d’environ 1km2, des centaines de tentes annoncent la destination. Autre chose d’assez suggestif, les tricycles et autres grosses motos, dans un va et vient bruyant. Tout annonce un monde ambiant, plein de vie et d’activité. Mais sur place, on se rend à l’évidence du ralentissement de l’activité d’exploitation: il n’y a pas de puits en activité en cette saison pluvieuse. Tout ou presque à été bouché, laissant un paysage encore rouge de latérite qui contraste avec les champs de coton et de mil dans l’entourage.
Les seules activités à cette période morte, concentrées dans un rayon moins large, tournent autour du traitement du minerai. « Ici on n’utilise pas le cyanure », rassure Monsieur Sankara, représentant du comptoir d’exploitation. Mais partout, on pouvait se faire montrer le mercure, utilisé pour amalgamer l’or extrait. Une grande quantité d’eaux usées stagnant près des installations de traitement du minerai empêchait un contact plus proche avec ceux qui y travaillent, souvent des enfants, tout blanchis par la terre.
A côté des acheteurs d’or et des prestataires de services liés au traitement du minerai, comme la mouture des pierres, il se développe une activité économique rentable: les vendeurs d’eaux et de nourriture font la loi du marché. Ainsi le sachet d’eau que l’on achète ailleurs à 25f Cfa, coute ici entre 50 et 100f. De but en blanc et à ne se fier qu’aux chiffres, chacun dans cette activité y trouve son compte. Mais c’est sans tenir compte de l’environnement qui prend un coup assez dur, encore moins de la santé ou du bien-être des enfants et des femmes qui y travaillent. Ici sans conteste l’homme est plus qu’au service de l’économie, à la lisière de l’esclavage.
Le site de Yabiro dans l’attente d’une exploitation industrielle
Sur ce site, qui a tout d’une zone de non droit et qui concentre environ 10 000 personnes en période d’exploitation, la Société d’achat et de vente d’or (SAV’OR), comptoir d’exploitation du site, tente d’organiser la vie et la police des lieux, à côté des éléments des forces de l’ordre. Le représentant de SAV’OR, nous explique à propos de l’insécurité sur les lieux: « le milieu est vraiment bizarre. Nous faisons de notre mieux pour faire régner la sécurité. Depuis que nous sommes là, ça va mieux. » Et contre toute évidence, ce représentant de SAV’OR, appelé chef de site, tente de nous présenter une image un peu plus acceptable de son monde. Qu’à cela ne tienne, des enfants en plein travail étaient visibles partout, certains, plus petits encore et curieux, nous suivaient de près.
Notre présence sur le site n’a pas été sans susciter de la méfiance. Les exploitants vivent dans une permanente crainte de leur expulsion par la société canadienne Avion Gold qui possède le permis d’exploration. La question qu’ils se posent tous: qu’adviendra-t-il à tous ces exploitants lorsque cette société viendra s’installer pour commencer une exploitation industrielle? En attendant, le gros et juteux deal qui se fait entre les sociétés Avion Gold, le détenteur du permis d’exploration, dans une moindre mesure, SAV’OR le comptoir d’exploitation contractuel et les orpailleurs est une véritable anguille sous roche pour le visiteur d’une journée.
Par contre et plus évidemment, malgré les dangers que l’on lui connait, l’exploitation artisanale d’or a encore des beaux jours devant lui au Burkina Faso, ses nombreuses conséquences environnementales et sociales aussi.
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