Lutte contre le paludisme : Le RAME dénonce l’abandon des populations aux donateurs extérieurs
Ceci est un communiqué du RAME (Réseau Accès aux Médicaments Essentiels) qui dénonce l’abandon des populations par l’Etat aux donateurs extérieurs dans la lutte contre le paludisme.
Le paludisme constitue un problème majeur de santé publique au Burkina Faso de par son ampleur et sa gravité. Pour renforcer la lutte contre cette maladie endémique, le Burkina Faso a élaboré un plan stratégique dont le but est de « réduire la morbidité de 75% par rapport à 2000 et la mortalité du paludisme à un niveau proche de zéro au Burkina Faso d’ici la fin de 2015 [1]». Le Ministère de la santé espère, à travers ce plan stratégique, « renforcer le contrôle de la maladie, dans un contexte de coordination des actions des partenaires et de renforcement du leadership national[2] ». Cependant, le RAME constate que si le levier des partenaires est en marche, celui du leadership national se fait attendre. Il appelle alors les autorités nationales à plus d’engagement, pour plus d’efficacité de nos stratégies de lutte contre le paludisme.
Des difficultés dans la distribution des moustiquaires imprégnées
Pour l’atteinte des objectifs contre le paludisme, un certain nombre de stratégies sont mises en œuvre. Parmi ces stratégies figurent en bonne place, la distribution universelle de Moustiquaires Imprégnées d’insecticides à Longue Durée d’Action (MILDA) et la prise en charge à domicile des cas de paludisme simple.
Certaines difficultés jalonnent toutefois la mise en œuvre de ces deux stratégies, compromettant du même coup l’atteinte des objectifs. Parmi ces difficultés on peut citer, les ruptures d’ACT (combinaisons à base d’artémisinine) constatées chez certains agents de santé communautaire (ASC), chargés de la prise en charge à domicile des cas de paludisme simple, et les insuffisances dans la mise en œuvre de la campagne de distribution des MILDA.
Pour les ACT, il est constaté, des ruptures récurrentes des stocks au niveau des CSPS, ne permettant pas à tous les ASC de se réapprovisionner.
Ligne de budget non accordée
Si l’on sait que cette stratégie permet de rapprocher les médicaments des malades et d’éviter la survenue de cas graves, les ruptures d’ACT contribuent malheureusement à augmenter le nombre de cas graves et par ricochet, la croissance de la mortalité liée au paludisme.
Pourtant, un Comité de suivi de la gestion des ACT a été créé par arrêté N°2008-228/MS/CAB du 18 juin 2008.
Mais on s’interroge sur la marge de manœuvre de ce comité national, si l’on sait que, malgré le fait que le paludisme constitue la première cause de morbidité et de mortalité au Burkina Faso, l’achat des ACT est entièrement subventionné par les donateurs extérieurs, tels que la Banque Mondiale, le Fonds Mondial et l’USAID.
« Nous demeurons convaincus qu’un État ne saurait se développer et prôner une émergence sans une réelle souveraineté »
La ligne du Budget de l’Etat qui devrait être accordée à cela n’est toujours pas une réalité dans le budget national.
Au cours de l’année 2013, une campagne de distribution des MILDA a été prévue avec pour objectif d’amener au moins 80% de la population à utiliser les MILDA entre 2013 à 2015.
La période proprement dite de la distribution a été initialement planifiée du 1er juin au 15 août 2013 sur l’ensemble du territoire, selon l’arrivée des MILDA. Le lancement de cette campagne a eu lieu le 11 juillet 2013 à Dédougou.
Au total 9 273 776 MILDA achetées par le Fonds Mondial et 350 000 MILDA achetées par l’USAID devraient être distribués aux populations.
Moustiquaires imprégnées : 11 sur 13 régions dotées
A ce jour, onze régions ont reçu entièrement les quantités de MILDA prévues et la distribution y a été effective. Ce sont : la Boucle du Mouhoun, des Cascades, des Hauts Bassins, du Nord, du Centre Ouest, du Centre Nord, de l’Est, du Centre Est, le Plateau central et du Centre sud.
Pour les deux autres régions, à savoir le centre et le sud-ouest, la distribution n’a pas encore été faite dans tous les districts. En effet, les districts de Boulmiougou et de Diébougou n’ont pas encore reçu les quantités de MILDA requises pour la distribution.
Le RAME, salue l’initiative de cette distribution qui est une suite logique de la campagne de 2010, du moment où les MILDA distribuées en 2010 ne sont plus efficaces.
Période inopportune pour la distribution
Cependant, si l’on considère que la période de haute transmission du paludisme reste la saison pluvieuse, la période d’exécution n’a pas été faite pour permettre aux populations de se protéger au moment opportun.
On est alors en droit de s’interroger sur l’efficacité de cette activité, dont le but recherché est la réduction du nombre de cas et de décès liés au paludisme.
Aussi, les difficultés d’accessibilité des villages dues à la saison pluvieuse, l’absence des populations dans les ménages liée aux travaux champêtres au cours des phases de dénombrement et de distribution, démontrent aussi que la période a été inopportune pour la mise en œuvre de l’activité.
Le RAME interpelle
Le RAME, à travers ce communiqué de presse, dénonce les ruptures répétées d’ACT et la période inopportune de la campagne MILDA.
Le RAME, accuse principalement la dépendance de la stratégie nationale de lutte contre le paludisme aux financements extérieurs la principale cause de ces situations.
Par conséquent, le RAME interpelle les autorités nationales :
– à affecter des ressources nationales suffisantes à la lutte contre le paludisme au Burkina Faso
– à mettre un point d’honneur à défendre l’efficacité des programmes et l’intérêt supérieur des populations, dans les négociations avec les partenaires au développement
Nous demeurons convaincus qu’un État ne saurait se développer et prôner une émergence sans une réelle souveraineté, notamment dans la planification des interventions en matière de santé au profit de ses populations. A quand une souveraineté sanitaire au Burkina Faso ?
Le RAME
[1] Plan stratégique 2011-2015 de lutte contre le paludisme au BURKINA FASO, p. 71
[2] Plan stratégique 2011-2015 de lutte contre le paludisme au BURKINA FASO, p. 72
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