Roch Kaboré, Président du Faso : « La vérité et la justice sont des préalables »

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Roch Marc Christian Kaboré a prononcé son premier discours en tant que Président du Faso. Il a campé ses priorités. Elles sont articulées notamment autour de la justice, du rétablissement de l’autorité de l’Etat,  de la réconciliation nationale et des réformes.

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L’intégralité du discours

Burkina24

Discours mesuré, mais ferme. Tels peuvent être les qualificatifs du premier discours de Roch Kaboré en tant que Président du Faso. Le nouveau  Chef de l’Etat a énoncé les priorités de son mandat.

Les premières sont « la vérité et la justice », qui, affirme-t-il, sont des « préalables ». «En toute responsabilité, chacun doit assumer sa part de responsabilité et éviter toute fuite en avant » dans les faits qui ont concouru à l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014. C’est à l’issue de cela, estime-t-il, que le pardon et la réconciliation nationale pourront être instaurés au Burkina.

La seconde priorité est la restauration de l’autorité de l’Etat. Roch Kaboré a en effet appelé ses compatriotes à « reconnaître à l’Etat son autorité, toute son autorité » et à « contenir nos égoïsmes personnels ». « L’incivisme (…)  doit cesser immédiatement », a martelé le nouveau locataire de Kossyam, qui a annoncé par ailleurs, que « des mesures seront étudiées et mises en œuvre pour que force reste  à la loi ».  

Roch Kaboré s’est aussi engagé à combattre l’injustice et l’iniquité et à «instaurer un dialogue fécond avec tous les Burkinabè ».

La dernière priorité qu’a relevée le Chef de l’Etat, c’est la réforme des institutions. Il indique vouloir tenir à la promesse de passer à une cinquième république, car pour lui, « la quatrième république a vécu ».

Lors de son discours, le président entrant a salué la « sagesse et richesse de l’expérience » de son homologue sortant Michel Kafando, président de la transition. Il a aussi remercié le Premier ministre Isaac Zida, le Président du Conseil national de la transition Cherif Sy, ainsi que le gouvernement et les députés de la transition.

Roch Marc Christian Kaboré a assuré qu’un « jour nouveau se lève sur le Burkina » et a appelé l’ensemble des Burkinabè à la cohésion et à se mettre au travail pour relever les nombreux défis qui se présentent au pays.

Abdou ZOURE

Photos : Yannick Sawadogo et Noufou KINDO


L’intégralité du discours de Roch Kaboré

Excellences, Messieurs les chefs d’Etat

Distingués représentants des chefs d’Etat et de Gouvernement

Excellence, Monsieur le Président du Conseil national de la Transition

Monsieur le Président du Conseil constitutionnel

Mesdames et Messieurs les Présidents d’Institution

Messieurs les Anciens chefs d’Etat

Mesdames et Messieurs les chefs de délégation étrangère

Excellences, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs et chefs de mission diplomatique

Distinguées personnalités

Honorables invités

Mesdames et Messieurs les candidats à l’élection présidentielle

Peuple combattant du Burkina Faso

La solennité de la présente cérémonie rajoute à la charge émotionnelle qui l’enveloppe, faisant de chacune et de chacun de nous, qui un acteur, qui un témoin privilégié, ou les deux à la fois, de la glorieuse page de l’histoire récente de notre Peuple que nous sommes en train d’écrire.

Permettez-moi, à l’entame de mon discours, d’exprimer ma gratitude et celle du Peuple burkinabè à toutes les éminentes personnalités qui, par leur présence honorent cette cérémonie et en rehaussent l’éclat.

Au moment où notre vaillant Peuple ferme la parenthèse de la Transition, pour s’engager résolument dans l’Etat de droit, en vue d’assurer une gouvernance vertueuse des affaires publiques, je voudrais tout d’abord lui rendre un hommage mérité.

A tous les valeureux fils et filles de notre chère nation, intrépides combattants de la liberté, de la démocratie et de la justice qui, ces dernières années, ont payé de leur vie notamment lors de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 et du coup d’Etat des 16-17 septembre 2015, la Nation est reconnaissante.

Leur sang versé a contribué à forger le destin du Burkina Faso pour le faire sortir de l’impasse dans laquelle certains esprits mal intentionnés voulaient le plonger à jamais. C’est pourquoi, avant tout autre propos, je vous invite à saluer, par l’observation d’une pieuse minute de silence, la mémoire de ces héros, tombés sur le champ d’honneur pour la grandeur et la dignité de la patrie(…).Je vous remercie.

A tous ceux qui ont souffert ou qui continuent de souffrir encore dans leur chair, je renouvelle toute ma solidarité et leur  souhaite un prompt rétablissement.

Distinguées personnalités

Mesdames et Messieurs

Je voudrais ensuite saluer l’action de mes devanciers dans la haute charge de président du Faso, pour ce qu’ils ont pu faire pour notre pays, ou pour l’espoir qu’ils ont pu incarner ou susciter à un moment donné.

Tout naturellement, je voudrais reconnaître et saluer les mérites du Président Michel KAFANDO dont la sagesse et la riche expérience nous ont été très utiles particulièrement aux moments troubles et complexes de la Transition. A lui, au premier ministre Yacouba Isaac ZIDA, au président du CNT Chérif SY, à tous les ministres ainsi qu’à tous les députés de la Transition, je renouvelle nos félicitations pour les services rendus à la Nation.

Je salue aussi le rôle primordial joué par nos organisations communautaires que sont l’UEMOA et la CEDEAO pour avoir contribué à la stabilité de notre pays et de la région.

Je salue l’implication déterminante de l’Union africaine, tout comme la ferme et clairvoyante position des Nations unies, lors des évènements récents vécus par notre pays. Leur solidarité avec le peuple du Burkina a permis de trouver des issues pertinentes aux crises que nous avons connues.

J’exprime, ma déférente considération, aux pays du continent et hors du continent qui, à travers la présence amicale de leurs représentations diplomatiques à nos côtés, ont pris fait et cause pour le peuple burkinabè lors de l’insurrection populaire et du rejet du putsch perpétré par le régiment de sécurité présidentielle.

A nos amis et camarades des partis progressistes de par le monde en général, et en particulier l’Internationale Socialiste, à laquelle ma formation politique d’origine appartient, je renouvelle ma gratitude pour leur militante solidarité dans notre combat commun pour l’émancipation des peuples.

Je salue enfin la témérité et le dévouement dans la lutte des camarades des partis ou formations politiques regroupés à l’époque au sein de l’opposition politique.

Jeunesse combattante, femmes courageuses et intrépides, anciens de toutes les contrées du pays, autorités coutumières et religieuses du Faso, dépositaires reconnus des sagesses fondatrices des équilibres de notre nation, vaillantes combattantes et vaillants combattants de la liberté et des causes justes, organisés ou non au sein des partis politiques,

associations et mouvements de la société civile burkinabè, opérateurs du monde économique, ouvriers, paysans, étudiants, artisans des villes et des campagnes, personnes vivant avec un handicap, c’est ensemble que nous avons voulu et obtenu le changement, ensemble nous devons en faire un bien commun pour la paix, la stabilité et la prospérité de la Nation.

Pour ma part, je prends ici l’engagement d’instaurer un dialogue social fécond avec tous les Burkinabé pour qu’ensemble nous brisions les chaines de la misère pour construire, dans la tolérance et la discipline républicaine, une nation forte, digne et respectée.

Cela signifie et impose, chères concitoyennes, chers concitoyens, que nous reconnaissions à l’Etat sa place et son rôle prépondérants dans la conduite des affaires publiques, son autorité, toute son autorité dans le fonctionnement harmonieux et régulier des institutions républicaines afin de garantir une bonne gouvernance au profit de l’ensemble des citoyens.

Cela exige, de la part de tous et de chacun, que nous sachions, dès à présent, contenir nos égoïsmes personnels, bannir nos divisions stériles, combattre l’intolérance et l’incivisme rampant, pour construire ensemble une alliance de progrès, à même de porter les ambitions de développement du pays.

Distingués invités

Je voudrais, en ce moment solennel, rappeler à la face du monde que la victoire du 29 novembre 2015, n’est pas seulement la victoire d’un candidat ou d’un parti mais celle de tout un peuple insurgé.

C’est la victoire d’une jeunesse burkinabè et africaine à jamais révoltée contre l’obscurantisme et l’oppression.

C’est la victoire de la liberté sur l’arbitraire.

C’est la victoire de la démocratie sur la dictature, contre l’oligarchie d’une minorité et l’opacité dans la gouvernance.

Cette quête émancipatrice de bonne gouvernance, de justice et d’équité est le sens même de mon engagement pour le changement et l’édification d’un Burkina nouveau.

Avec les élections couplées, présidentielle et législatives du 29 novembre dernier, un jour nouveau se lève au Burkina Faso, chargé d’espoir pour un lendemain meilleur.

Mon programme, intitulé « Bâtir avec le Peuple, un Burkina Faso de démocratie, de progrès économique et social, de liberté et de justice», devenu par l’onction populaire, le programme du Président de tous les Burkinabè, ambitionne de répondre à cette quête de justice, de transparence, de démocratie et de prospérité partagée exprimée par toutes les composantes de notre Nation.

La réconciliation nationale en sera le socle, la paix, le moteur, la vérité, la justice et la transparence, les adjuvants essentiels, pour construire ensemble dans la durée, une Nation forte, fière, prospère et intègre.

En ce 21e siècle de toutes les interrogations et inquiétudes sur la croissance, la paix et la sécurité dans le monde, je veux qu’ensemble, main dans la main, avec l’appui et le concours de la diaspora burkinabè et des partenaires au développement du Burkina Faso, nous entamions la marche assurée de notre Peuple vers la réalisation de ses aspirations profondes.

Notre vaillante jeunesse a donné de la voix et a montré la voie. Les femmes, les anciens et les responsables coutumiers et religieux en ont montré la volonté. Je souhaite que dans un élan et un sursaut patriotiques, les Burkinabè, après avoir forcé l’admiration et l’estime des autres peuples en Afrique et dans le monde, se donnent les moyens de réussir à relever les défis qui se dressent devant nous.

Que le monde continue de nous regarder et de nous soutenir, car notre démocratie, en s’enracinant, apporte et apportera davantage de bien-être au pays, à la sous-région, à l’Afrique et pourquoi pas au monde.

Pour ma part, j’en suis convaincu, et d’ores et déjà, je m’engage, avec les jeunes générations, à contribuer à la construction d’un monde de paix, de démocratie, de justice, d’égalité et de liberté.

Les graves problèmes de gouvernance qui ont failli plonger le pays dans la guerre civile ont des causes et des responsables. En toute humilité, chacun doit reconnaître et assumer sa part de responsabilité et éviter les fuites en avant inutiles.

C’est pourquoi la vérité et la justice doivent être recherchées préalablement pour que la paix des cœurs décuple nos énergies afin que nous soyons capables de nous pardonner effectivement et sincèrement.

L’incivisme, la remise en cause de l’autorité de l’Etat, et d’une manière générale, le non-respect de la loi par les citoyens et les personnes morales doivent cesser immédiatement.

En tout état de cause, toutes les mesures seront étudiées et mises en œuvre pour que force reste à la loi. Partout, l’ordre et la discipline doivent régner, pour nous permettre, dans le dialogue et la concertation, de rechercher les solutions appropriées aux problèmes que vivent les Burkinabè.

Tout en étant un ardent défenseur des libertés individuelles et collectives que je souhaite promouvoir et élargir, je voudrais attirer l’attention de tous que bien souvent l’ennemi de la liberté, c’est la liberté mal comprise et sans bornes.

Je suis le premier à savoir que le retour indispensable à la normale ne sera pas facile, mais c’est le prix à payer si nous ne voulons plus continuer à vivre dans un Burkina Faso à plusieurs vitesses, à l’avenir incertain, où le fossé s’agrandit chaque jour entre un nombre toujours plus restreint de nantis qui ont des droits et les larges masses populaires condamnées à la paupérisation et à l’exclusion.

Distinguées personnalités

Mesdames et Messieurs

Le retour à l’intégrité que je me suis engagé à réaliser dans le cadre de mon programme pour le quinquennat 2015-2020 sera pour chacun de nous une triple exigence :

  • Une exigence d’amour pour la patrie, dont nous devons défendre constamment les intérêts supérieurs ;
  • Une exigence de dévouement au travail pour notre pays, au service duquel nous devons mettre tous nos talents et intelligences.
  • Une exigence de probité et de bonne gouvernance dans tout ce que nous faisons, pour ne pas se servir du pays mais pour le servir de manière désintéressée.

C’est donc à un véritable changement de mentalité et de comportement que je convie les Burkinabè, car les chantiers qui nous attendent sont titanesques :

  • Réformer les Institutions et moderniser l’administration pour plus de justice sociale, de démocratie et de liberté ;
  • Mettre en place un nouveau modèle de développement centré sur le renforcement du capital humain ;
  • Promouvoir et vulgariser les technologies de l’information et de la communication ;
  • Dynamiser les secteurs porteurs pour l’économie et les emplois, en faisant du secteur privé un acteur important ;
  • Réaliser un meilleur partage des fruits de la croissance à travers un nouveau contrat social.

Comme j’ai eu l’occasion de le rappeler à plusieurs reprises, la IVe République a vécu. Dès lors, mon engagement de passer à la discussion et l’adoption de la Constitution de la Ve République pour mieux réformer les institutions et engager la modernisation indispensable de l’administration reste au cœur de ces reformes à faire. Aux amis et aux partenaires au développement du Burkina Faso, je tiens à réaffirmer notre engagement sans faille à honorer la parole et la signature du Burkina Faso, dans le respect de l’indépendance et des intérêts supérieurs de notre Peuple.

C’est pourquoi, je voudrais lancer un appel du haut de cette tribune pour un accompagnement plus substantiel de la communauté internationale et des partenaires techniques et financiers aux efforts de relance économique et d’amélioration de la gouvernance dans notre pays.

Distingués Chefs d’Etat

Mesdames et Messieurs

Au moment où j’accède à la plus haute charge de l’Etat, la situation sécuritaire dans le monde en général et dans la sous-région ouest africaine en particulier est préoccupante en raison de l’ampleur des menaces et actions terroristes.

C’est pourquoi nous devons mutualiser nos moyens de défense, nos informations, entre nos pays et de concert avec tous les autres pays qui luttent contre le terrorisme dans le monde pour présenter un front unis contre ces fléaux qui menacent l’existence même de nos Etats.

Je réaffirme mon engagement et celui de mon pays à œuvrer avec tous nos pays voisins et au sein des institutions communautaires que sont notamment l’UEMOA et la CEDEAO pour la paix, la sécurité, l’intégration régionale, la coopération et la solidarité agissante entre nos pays et nos peuples. 

Peuple du Burkina Faso

Chères concitoyennes

Chers concitoyens

La nouvelle page de notre glorieuse histoire commune que nous nous sommes engagés à écrire ensemble sera nécessairement une œuvre collective. J’ai foi en l’avenir radieux de ce pays et à la capacité de son Peuple à se surpasser pour défendre son honneur et construire son avenir. Je suis fier d’être Burkinabè et de pouvoir apporter ma modeste contribution à la paix, à la démocratie, à la justice, à la réconciliation nationale et à la prospérité partagée entre les Burkinabè. Je veux croire à toutes nos chances de continuer à bénéficier de la clémence divine pour la paix au Burkina Faso.

C’est pourquoi, je me tourne vers les gardiens de nos traditions multiséculaires, vers nos autorités coutumières et religieuses et vers toutes les personnes de bonne volonté pour tout ce qu’ils ont toujours fait et continueront à faire pour cette paix si précieuse dont le pays a tant besoin.

Je renouvelle ma gratitude à toutes et à tous, et je rappelle que le Burkina Faso a été, est et restera un héritage commun aux Burkinabè.

C’est pourquoi nous devons le gérer en bon père de famille, prudent, diligent et honnête, pour le bien des générations présentes et à venir.

Autrement, nous serons donc tous comptables, chacun pour sa part de responsabilité, de l’avenir de ce pays que nous aimons tous.

Pour terminer, je voudrais réitérer notre profonde gratitude et nos remerciements sincères à tous les Chefs d’Etat et de gouvernement ici présents ou représentés, à tous les peuples africains, à toutes les délégations venues d’Europe, d’Amérique et d’Asie pour leur présence amicale et leur solidarité avec le peuple burkinabè.

En cette fin d’année 2015, je tiens à souhaiter à toutes et à tous une bonne et heureuse année 2016.

Que Dieu bénisse le Burkina Faso

Je vous remercie.

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Abdou ZOURE

Abdou Zouré, journaliste à Burkina24 de 2011 à 2021. Rédacteur en chef de Burkina24 de 2014 à 2021.

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