Maitre Yacouba Drabo, chef des Dozo : « Nul n’est au-dessus de la loi »
Quelle différence existe-t-il entre Dozo et Koglweogo ? Quelle est la part contributive des Dozo en matière de sécurité au Burkina ? Voici quelques questions que Burkina 24 a posées à Maitre Yacouba Drabo le Bonck, Coordonnateur de l’Union nationale des Dozo tradi-praticiens de la santé du Burkina et Coordonnateur sous régional de l’Union panafricaine des Dozo sans-frontière, dans un entretien avec lui le samedi 19 mars 2016.
Burkina 24 (B24) : Qu’est-ce que le Dozo et que fait-il dans la vie ?
Maitre Yacouba Drabo le Bonck (YD) : Le Dozo est d’abord un citoyen comme vous et moi. Mais c’est une personne qui a été initiée dans la tradition, dans la coutume depuis le bas âge. Le Dozo contribue énormément dans la société. Il contribue à la protection de la faune et de la flore, la protection de l’environnement contre la coupe abusive du bois, les feux de brousse et la divagation des animaux. Nous contribuons à cette lutte car nous relevons de l’environnement.
En dehors de la protection de l’environnement, nous sommes des chasseurs. Mais on ne se lève pas pour devenir Dozo et chasser le gibier comme cela. Il faut commencer par une initiation ou on naît dans une famille Dozo. Le Dozo ne parle pas aussi d’ethnie ou de religion. On trouve les Dozo un peu partout en Afrique et au Burkina dans nos 13 régions.
Nous accompagnons aussi le ministère de la sécurité dans la protection des personnes et des biens. Ce sont des contributions. L’homme Dozo n’est pas quelqu’un à craindre. Ce n’est pas ce qu’on entend parler que ce sont des sorciers. Nous avons une association, l’Union nationale des Dozo tradi-praticiens de la santé du Burkina et nous avons obtenu officiellement notre récépissé en 2009 et renouvelé en 2014. L’association compte de 5 000 à 6 000 membres.
Ce que le chef des Dozo du Burkina pense des Koglweogo
Burkina 24
B24 : Est-ce qu’il existe des Dozo de sexe féminin ?
YD : Les Dozo femmes existent. Il y a déjà plus de 200 au sein de l’Union nationale des Dozo tradi-praticiens de la santé du Burkina. Certaines font la chasse, mais la grande majorité vient des familles où le papa n’a pas eu de garçon. Sinon, elles existent et elles sont souvent même plus courageuses que certains hommes. Elles font même partie de notre sécurité.
B24 : Qu’en est-il de votre contribution dans le domaine de la sécurité ?
YD : D’abord, nous respectons l’autorité. Ce sont nos devanciers. L’armée existe, la gendarmerie existe. On s’est fixé un objectif de collaborer, de faire une contribution, mais ce n’est pas nous qui luttons efficacement, mais nous contribuons au sein du ministère de la sécurité contre le banditisme.
Pour vous prendre des exemples, il y a dix ans de cela, dans la zone du Banwa vers Solenzo, les cotonculteurs ne pouvaient pas acheter une moto dans un marché et arriver à la maison avec. En plein midi, il y avait des braquages. Les Dozo se sont organisés. Ce n’est pas pour dire qu’il y a eu zéro bandit, mais nous avons contribué. Vers Banfora, Orodora, nous avons créé un partenariat entre les Dozo du Burkina et du Mali pour agir à chaque fois qu’il y avait un cas suspect.
Malheureusement, les efforts des Dozo ne sont pas salués à leur juste valeur. Nous avons beaucoup contribué à l’arrestation de grands bandits que nous avons toujours livrés aux forces de l’ordre. Nous ne faisons pas nous même la loi. On n’impose pas aux présumés coupables de payer quelque chose aux Dozo. Quand bien même on ne parle pas des Dozo dans certaines opérations, cela ne nous amène pas à baisser les bras.
Aussi, l’association des Dozo nous permet de détenir seulement le fusil de traite qui est le fusil à poudre. Mais un Dozo ne doit pas se promener avec une arme automatique sans obtenir un permis de port d’arme.
B24 : Dans votre contribution, est-il arrivé parfois que vos membres ne respectent pas la loi ?
YD : Il est arrivé que nous ayons certaines difficultés parce que certains de nos membres ont débordé. En voulant bien faire, à contribuer à la lutte contre le grand banditisme, il ne fallait pas ligoter un bandit.
Nous avons alors sensibilisé nos membres avec la contribution du ministère de la sécurité.
Durant ces trois dernières années, nous avons initié plus de 5 formations en Police de proximité et ce sont plus de 400 Dozo qui en ont été bénéficiaires dans le Kénédougou, dans le Tuy, à Kombia, Bobo-Dioulasso, à Nouna. Une chose est d’accompagner le ministère (de la sécurité), mais c’est de connaitre nos limites et nos droits. Nous ne devons pas déborder, nous ne devons aller au-delà. Il faut respecter l’autorité.
Il y a des bandits qui portent nos badges en disant qu’ils sont des Dozo. Au sein de la confrérie, les bandits peuvent s’infiltrer. Au sein de l’Union, tous les membres ont un numéro matricule identifié. Vers Kampti, des chefs Dozo ont commis des erreurs et ils ont été arrêtés. A Tougan, des Dozo ont été mis en prison. Mais nul n’est au-dessus de la loi.
B24 : Mais au-delà de ces contributions, les Dozo ont-ils d’autres activités qui les font vivre ?
YD : Certains membres de l’Association ont dit qu’ils luttent beaucoup contre le grand banditisme, mais il n’y a pas de retombées. Je leur ai dit de ne pas se décourager. C’est pourquoi nous avons créé la DAI (Dozo assistance international) parce qu’à un moment, nous avons eu des problèmes dans la contribution de la lutte contre le banditisme.
Maitre Yacouba Drabo le Bonck s’adresse aux Dozo du Burkina
Burkina 24
Nous prenons le maximum de risque à chaque fois que nous accompagnons les autorités. Le bandit non seulement est armé, et il ne reste pas indifférent par rapport au pouvoir mystique. Pour affronter aujourd’hui un bandit, le fusil seul ne suffit pas. C’est facile pour lui de prendre 500 000 F CFA ou 1 million de F CFA s’approprier un wack anti-fusil.
La DAI est la société de gardiennage des Dozo, parce qu’il faut créer des emplois. Quand vous rassembler plus de 1 000 ou 2 000 jeunes, il ne faut pas rester les bras croisés. Le lancement officiel sera pour bientôt. Tout cela, c’est pour que les Dozo eux-mêmes ne débordent pour devenir autre chose.
Propos recueillis par Yannick SAWADOGO et Mariam OUEDRAOGO (Stagiaire)
Burkina 24
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