Tribune – « Quand la libération de Djibrill BASSOLE crée la psychose »
Ceci est une opinion de Marius Yougbaré sur la liberté provisoire accordée à Djibrill Bassolé.
Le mardi 10 octobre 2017, le président de la chambre de contrôle près le tribunal militaire a accordé la liberté provisoire au Général BASSOLE détenu depuis plus de deux ans à la MACA. À l’annonce de cette mise en liberté provisoire, le gouvernement burkinabè par le truchement du ministre de la justice s’est dit étonné et n’a pas souhaité faire de commentaire à ce sujet prétextant respecter l’indépendance de la justice.
Mais la suite des évènements le mercredi 11 va révéler aux yeux de l’opinion nationale que les autorités politiques ne respectent l’indépendance de la justice que dans les déclarations. C’est avec la plus absolue consternation que nous avons assisté à l’immixtion flagrante de l’exécutif pour influencer la décision du président de la chambre de contrôle.
Cet acte est un désaveu du pacte pour le renouveau de la justice qui est un acquis âprement mérité à l’issue de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014. Ces agissements confirment davantage ce que les proches du Général ont toujours dénoncé à savoir : Djibrill BASSOLE est un prisonnier politique.
Les manigances de l’exécutif qui ont concouru à ce que l’on place l’ancien ministre des Affaires étrangères en résidence surveillée contrastent avec les raisons humanitaire et administrative avancées par le président de la chambre de contrôle.
Une fois l’assignation de mise en résidence surveillée accordée, le Général BASSOLE a été enlevé de force par les autorités. Il sera conduit dans un lieu tenu secret laissant sa famille et ses proches dans la terreur totale pendant près de 12 heures. Cette prise en otage constitue une séquestration d’un prévenu qui a légalement obtenu une liberté provisoire pour des raisons de santé.
Ce traitement inhumain de la part de dictateurs maquillés en démocrates qui foulent au pied les lois de la République est un signe qui ne présage rien de bon pour l’avenir de notre chère patrie. Cet acharnement contre la personne de Djibrill BASSOLE est manifestement personnel et n’a pas de corollaire avec le coup d’État manqué du 16 septembre 2015.
C’est avec la même consternation que l’on a observé les manifestions illégales de pseudo organisations de veille citoyenne acquises à la cause de politiciens véreux pour exiger de la justice militaire, l’annulation de la décision de mise en liberté provisoire de BASSOLE. Ces organisations qui font du malheur des uns leur fonds de commerce ont, une fois de plus prouver qu’ils ne se soucient pas des valeurs qu’ils prétendent défendre vaille que vaille à savoir : le respect des droits humains fondamentaux, la lutte contre la corruption, la lutte pour une justice et une équité effective et la lutte contre l’impunité.
En quoi la mise en liberté provisoire de l’ancien ministre des Affaires étrangères est contraire avec le besoin de rendre justice aux victimes du putsch manqué ? Foi du ministre de la justice, l’instruction du dossier est terminée et les audiences de confirmation de charge et de mise en accusation sont prévues pour le 24 octobre. En plus, le juge a justifié sa décision en précisant qu’au regard des informations sanitaires en sa possession, le prévenu peut recouvrer une liberté provisoire pour se soigner convenablement.
Pourquoi de telles agitations ?
Pourquoi vouloir à tout prix voir Djibrill BASSOLE privé de sa liberté même avec son état de santé dégradé ?
Pour ce qui concerne les partisans du parti au pouvoir, leur réaction aux antipodes de la démocratie est compréhensible au regard de leur échec lamentable dans la gouvernance socioéconomique et de leur manque d’initiative pour assurer la sécurité à l’ensemble des populations. Voir un adversaire politique avec des états de service extraordinaires comme Djibrill BASSOLE faire son retour dans l’arène politique, constitue un tournant fâcheux pour leurs ambitions électoralistes de 2020. Ce n’est pas pour rien qu’ils ont travaillé durement en usant de toutes les combines et de toutes les malversations pour l’écarter de la course à l’élection présidentielle en 2015.
Quant aux OSC, j’ai de toutes mes forces voulu comprendre leurs agitations mais sans y parvenir. Vous voulez que justice soit rendue aux victimes du putsch manqué et bien les proches de BASSOLE aussi. Parce que demander que l’on juge BASSOLE, c’est demander la justice pour toutes les victimes et la manifestation de la vérité sur les évènements qui ont concouru au putsch, l’identification des commanditaires et des exécutants et leur condamnation. À moins que vous ayez déjà fait votre verdict avant le procès ; dans ce sens également cela constitue votre opinion personnelle et rien de plus. Interpeller au contraire la justice militaire à s’activer mais dans le strict respect du droit, à créer des conditions pour un procès équitable et impartial dans les meilleurs délais.
Pour emprunter l’expression de l’autre, si vous avez « dîné avec le diable » et avez peur des répercussions, il est temps de faire votre mea culpa et de vous mettre à la disposition de la justice afin qu’elle statue sur vos forfaits conformément à la loi. De toutes les façons, aucune vérité ne peut être étouffée éternellement. Vous comprendrez que la vaillante jeunesse n’est pas dupe et sait identifier et prioriser les luttes. C’est bien dommage de ne pas savoir que les Burkinabè ne sont pas une bande de masculins au « féminin » comme vous le prétendez mais plutôt des hommes conscients. Il est impératif pour vous de travailler à recouvrer votre intégrité et votre dignité en essayant dans gagner votre pain à la sueur du front et non et vendant la mémoire des martyrs.
C’est le lieu pour moi d’interpeller vivement les parents des victimes du putsch manqué à se démarquer des « organisations de vautours » dont la seule ambition véritable est d’utiliser la mémoire des victimes pour se faire des sous. La meilleure façon d’exiger la justice n’est pas de contester une décision judiciaire de procédure mais plutôt encourager la justice à aller vite et bien au procès afin d’apaiser votre peine. Ne les laisser pas vous affliger des souffrances autres que ce que vous endurez péniblement déjà !
Marius YOUGBARE
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