Pérégrinations de Bélélé | Développement social : De fonds en fonds on est toujours au fond
« Beaucoup de personnes peuvent se trouver plus mal loties, alors même que le revenu moyen a augmenté », Commission Stieglitz-Sen-Fitoussi (2009). Les résultats des travaux de cette commission montrent aisément que les rapports entre la croissance moyenne du PIB par tête et les inégalités se creusent. La croissance économique n’est donc pas le seul apanage à la lutte contre la pauvreté. Car il apparait que la croissance reste captée par les franges aisées dans de nombreux pays en l’absence de mécanismes impliquant les acteurs populaires dans l’économie moderne.
Ces dernières années, dans différents pays africains, plusieurs politiques publiques et des programmes pour faire face à la pauvreté se sont orientées vers la promotion de l’entrepreneuriat individuel et l’auto-emploi. Dans la même dynamique, au Burkina Faso, les autorités tentent depuis plus d’une décennie d’apporter une réponse aux problèmes socioéconomiques et résorber le chômage à travers divers fonds et concepts (FAIJ, FAARF, FASI, FAPE, Burkina startups, etc. pour ne citer que ceux-là). Mais les constats sur le terrain restent en deçà des promesses annoncées. À se demander donc si ces mesures pourront à long terme apporter les solutions escomptées ?
Un contexte sociétal inapproprié
Rien n’aura servi à une réussite si les individus autour de soi demeurent dans la misère, enseigne une sagesse africaine. La communauté a toujours été au cœur de tout dans plusieurs sociétés en Afrique. Malheureusement, pour faire face aux problèmes sociétaux liés à la modernité, le fonctionnariat, point de chute de nombreux talents dans nos pays, a très vite été perçu comme garant de la sécurité de l’emploi et de l’épanouissement.
Cependant très vite dépassé, les regards se tournent désormais vers d’autres alternatives entrepreneuriales. Et plusieurs fonds voient le jour pour l’accompagnement de ces initiatives, souvent individuelles et non holistiques. Et les relations familiales apparaissent comme des obstacles dans cet entrepreneuriat individuel.
L’alternative : une solution endogène
Tout comme Pr Joseph Ki-Zerbo qui préconise la recherche endogène, le sociologue Pr Abdoul Salam Fall explique que pour être durable, la croissance doit être endogène. Elle doit être portée, entre autres, par l’économie sociale et solidaire qui est en soi l’espace de l’endogénéité. La croissance inclusive rend possible l’égalité d’accès à des opportunités crées pour tous, notamment les pauvres. Cette alternative consiste à créer des activités économiques viables pour répondre aux besoins sociaux et environnementaux (accès aux soins, aux énergies, au logement, croissance verte, etc.) et non seulement aux besoins industriels ou exclusivement technologiques par la promotion à tout va de « start-ups » ou d’auto-emploi. Malheureusement dans leur mécanisme d’octroi, beaucoup de fonds au Burkina ne prennent pas en compte ces réalités sociétales mais mettent seulement l’accent sur le volet développement économique.
Les activités économiques à finalité sociale réencastrent l’économie dans le social. Elles montrent que l’initiative privée, l’entrepreneuriat ainsi que la production de richesses n’est ni l’apanage des individualités, ni celui des clans de riches, mais de la communauté dans son ensemble. Cet élan participatif au cœur de l’activité économique à finalité sociale demeure donc une contribution à ces politiques publiques pour impulser un développement inclusif et rendre la croissance plus équitable.
L’économie sociale et solidaire
L’économie sociale et solidaire (ESS) dans son rôle historique stratégique est pour l’avènement d’une nouvelle société, et pour une approche éthique des rapports sociaux.
En effet, les entreprises sociales / collectives ou l’entreprenariat solidaire favorisent le développement des capacités humaines et renforcent la résilience de leurs membres face aux dérives sociétales avec comme valeurs un développement qui profite à tous et un partage équitable des richesses, explique le Labo ESS. Elles sont des structures économiques qui facilite à large échelle la re-distributivité horizontale des richesses. L’entrepreneuriat social prône un management démocratique qui vise l’épanouissement et la participation de tous avec comme éthique la transparence et la redevabilité.
Tandis que les politiques publiques, dans nos pays, débrident les besoins à mettre en cohérence, faute de vision intersectorielle et de méthodes véritablement intégrées et participatives il reste à se demander si l’approche holistique qui structure l’économie sociale et solidaire, convaincra désormais les différents bailleurs dans leurs mécanismes de financement.
Promouvoir l’ESS
Depuis peu, l’ESS émerge partout pour contrer l’exclusion des marchés de production et de consommation de différents acteurs. Les coopératives de production et de services donnent de l’élan à l’entrepreneuriat social. Ainsi, l’économie sociale et solidaire contribue à élargir et à dynamiser le marché intérieur et donc à offrir une meilleure intersectorialité.
En raison de la diversité de son champ d’action et de la complémentarité de ses pratiques, l’économie sociale et solidaire répond aux questions que le bien-être pluridimensionnel pose. Au Burkina Faso, dans cette dynamique, dans le domaine des médias, Agribusiness TV est un exemple réussi qui peut être cité.
Pr Abdoul Salam Fall nous explique également que la contribution de l’économie sociale et solidaire dans la lutte contre l’insécurité économique repose sur l’augmentation de revenus et leur conversion en services pour les populations pauvres.
Jérôme William Bationo
Chroniqueur pour Burkina24
Les Pérégrinations de Belélé est une chronique hebdomadaire, éponyme de son auteur, Belélé Jérôme William Bationo. A travers cette rubrique qui se veut un voyage autour de plusieurs thèmes (société, développement, politique, culture, environnement, etc.), il veut à travers plusieurs billets de partager avec les lecteurs de Burkina24 son expérience issue de ses formations académiques et continues, de ses lectures et de son parcours de journaliste, consultant média. Les Pérégrinations de Belélé se veulent donc éclectiques et ouvertes au débat contradictoire pour un réel partage d’idées.
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