Festival international de conte Yeleen : Ces femmes qui ont émerveillé le public
Organisée par la maison de la parole, la 24ème du Festival international de conte Yeleen a connu la brillante participation de sept femmes conteuses les unes aussi talentueuses que les autres. Venues du Burkina et d’ailleurs, elles ont usé de style pour magnifier l’art du récit dans toute sa splendeur. Flash sur deux artistes venues de la Cote d’Ivoire et du Mali.
Quand Amaïchata Salamanta fait son entrée sur la scène du Centre Djeliya en cette nuit froide du mercredi 30 décembre 2020 pour conter « La chèvre et l’hyène », le public resté fidèle au programme entamé depuis le 26 décembre 2020 l’accueille avec un tonnerre d’applaudissement qui réchauffe aussitôt les rangées.
« La conteuse du fleuve », en hommage à son origine Bozo (pêcheurs en langue Bambara) se distingue facilement sur l’estrade éclairée par deux ampoules installées au clair de lune. Non seulement par sa voix envoutante, mais aussi par ses pas de danse et la chanson « Kandjani » qu’elle maitrise à merveille, et qu’elle entonne pour incarner les différents personnages de son récit. Entre autres celui de « Maman chèvre » pour expliquer de façon subtile à ses petits comment s’extirper des griffes de l’hyène qui les tenaient en captivité (dans la quasi-totalité des contes du Mandé, l’hyène est le seul animal qui mange les chèvres), et aussi à l’endroit d’elle-même, question de distraire l’hyène pour se sauver à son tour de cet animal horrible qui la tient par le bout du nez.
Savoir d’où on vient, appréhender qui on est, penser où on va
Et en fin de compte, l’astuce produit les résultats escomptés : Maman chèvre et ses petits l’ont l’échappé belle. En résumé, le conte présenté par celle qui a figuré dans la série à succès « Les rois de Ségou » du réalisateur malien Boubacar Sidibé démontre comment la force de l’oralité peut inverser les tendances les plus évidentes en désarmant un animal fort face à une petite proie.
C’est tout le message de la 24ème édition du Festival international de conte Yeleen tenu sous le thème « Le conte, facteur de développement endogène d’une société ». Car, explique Hassane Kassi Kouyaté, président de la Maison de la parole, par ailleurs Directeur du Festival des Francophonies de Limoges, « on a besoin de savoir d’où on vient pour appréhender qui on est, pour penser encore le mieux possible où on veut aller ». Et c’est un symbole vivant qui servira à illustrer cette pensée : « L’arbre ne peut faire face aux intempéries que quand il est bien enraciné. Le même arbre ne peut prétendre s’ouvrir vers le ciel et les autres parties du monde que s’il est bien enraciné », insiste-t-il.
Le vrai sens du bonheur
L’autre conteuse qui a aussi retenu l’attention du public est Kadi Keïta dite « La Sirany ». Venue du « Pays de l’éléphant », cette jeune artiste musicienne, comédienne a à son tour partagé ses émotions et sa joie de vivre à travers une œuvre tout aussi didacte. Avec un message présentant un personnage qui finira par tout perdre à force de vouloir « un enfant à tout prix ».
Et la Sirany de conseiller en ces termes : « Ne faites pas dépendre votre bonheur de la résolution de votre problème : je serai heureux lorsque j’aurai ci ou ça… ». Ce conte invite également l’être humain à renoncer à la satisfaction des vœux qui engage sa dignité.
Alassane Boundaogo, chargé du suivi-évaluation des projets du Fonds de développement culturel et touristique (FDCT) a été « agréablement surpris » par la Maggie des dix conteurs. Et promet un renforcement de leur accompagnement à la Maison de la parole pour une meilleure organisation du festival qui à ses dires fait partie des « meilleurs ».
Hassane Kouyaté souhaite plus d’engagement politique pour la promotion de cette « pensée scientifique » qui touche transversalement les autres domaines socio-économiques.
Les grandes figures africaines
A cette chute de rideaux, il envisage la 25ème édition avec beaucoup d’innovations. Notamment la célébration des mémoires de notre continent autour de l’oralité avec des grandes figures comme Amadou Hampaté Ba. « Nous n’avons pas inventé l’eau chaude mais nous aimerons chauffer quand même à notre température », conclut Hassane Kouyaté.
Quelques extraits des contes
1) La pluie qui tombe sur la canne à sucre est la même qui tombe sur la feuille amère.
2) Le mensonge mène au vol.
3) un vieux ayant hérité d’une arme finit par la confier à son fils.
4) Le plus grand vaurien, c’est l’enfant qui n’obéit pas à ses parents.
5) Le gris-gris qui rend riche en un clin d’œil, c’est le travail bien fait.
6) Même inactifs, nos parents constituent une richesse.
Aminata SANOU
Correspondante de Burkina 24 à Bobo-Dioulasso
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