Dioma Cleophas Adrien : « Ici en Italie, les Burkinabè sont beaucoup respectés »
En Italie, DIOMA Cleophas Adrien, ce fils du Faso est considéré par les autorités de ce pays et principalement par le Ministère des Affaires Etrangères italien comme une personne-ressource pour les questions liées au développement. Il a récemment été nommé par ce Ministère au sein du prestigieux Conseil National pour la Coopération de l’Italie. Burkina24 est allé à sa rencontre pour vous offrir cette interview dans laquelle il révise son parcours.
Burkina24 (B24) : DIOMA Cleophas Adrien peut-il se présenter aux lecteurs de Burkina24 ?
Dioma Cleophas Adrien (D.C.A) : Je suis né à Ouagadougou le 22 avril 1972. Après le bac et deux ans à l’université de Ouagadougou, je suis parti en France. Là-bas, suite à certaines difficultés, j’étais devenu par la force des choses un sans-papier.
J’ai donc dû immigrer en Italie. En Italie, après deux de clandestinité, j’ai pu me régulariser et j’ai fait un master en communication et médiation culturelle à l’Université de Parme dans le nord de l’Italie. Pendant 5 ans, j’ai été éducateur/formateur dans un centre pour jeunes immigrés et collaboré comme journaliste avec de nombreuses revues italiennes.
A côté de tout cela, avec des amis italiens et africains, nous avons créé un festival, l’Ottobre Africano et j’en suis le directeur artistique. Depuis maintenant deux ans, je vis à Rome où je dirige et coordonne le festival Ottobre Africano qui est devenu un évènement national.
J’ai été choisi comme représentant de la diaspora dans le groupe des Ambassadeurs africains de Rome et le Ministère des affaires étrangères italiennes m’a nommé cette année comme consultant et représentant de la diaspora au sein du Conseil National pour la Coopération au Développement.
Cela fait maintenant 16 ans que je vis ici. L’Italie est devenu mon pays même si je reste toujours burkinabè et surtout africain. Ce pays m’a beaucoup donné et j’y suis très attaché. Je pourrais même dire que je me considère désormais italo-burkinabè.
B24 : Parlez-nous de votre nomination au sein du Conseil National pour la Coopération au Ministère des Affaires Etrangères de l’Italie ?
D.C.A: Le Conseil National pour la Coopération a été créé par le Ministère des affaires étrangères avec comme objectif principal de repenser la coopération italienne dans le monde.
C’est un organe qui regroupe des associations et ONG qui travaillent dans le monde de la coopération, des fondations bancaires, mais surtout, comme nouveauté, des entreprises et sociétés privées parce qu’un des objectifs serait de commencer à parler d’investissement et rapports commerciaux et industriels et sortir des messianismes de la coopération liés à l’aide qui n’a pas trop donné de résultats probants.
Nous avons été choisis surement par rapport à notre capacité à travailler avec tout le monde, à savoir, les immigrés, les institutions et les ambassades. Notre expérience de directeur du seul festival qui essaie de parler de l’Afrique différemment et notre expérience de formateur et médiateur culturel ont forcement milité en notre faveur.
Comme de nombreuses personnes, j’ai assisté à la création du Conseil National pour la Coopération au Ministère des Affaires Etrangères de l’Italie, mais jamais, je n’ai pensé un jour en faire partie. Donc vraiment ce choix est un honneur pour ma propre personne, pour le Burkina Faso, mais aussi et surtout pour l’Afrique que j’espère pouvoir dignement représenter. Je tiens aussi à préciser que je suis la seule personne d’origine étrangère au sein de ce Conseil avec une vice-présidente d’origine italo-éthiopienne.
B24 : A combien estimez-vous la communauté burkinabè ici en Italie et quelles sont les principaux secteurs d’activités dans lesquels on retrouve vos compatriotes burkinabè?
D.C.A : Officiellement, les Burkinabè en Italie sont plus ou moins 20.000. Mais si nous mettons tous ceux en situation irrégulière nous pourrions avoir entre 30.000 et 35.000 personnes.
C’est une immigration de travail. Au sud de l’Italie, de nombreux Burkinabè sont dans l’agriculture, dont l’activité principale est la récolte de tomates et autres. Au nord de l’Italie, ils sont ouvriers dans les usines. Le nombre d’étudiants burkinabè n’est pas considérable. Ajoutant à cela une forte communauté composée par les prêtres.
B24 : Donnez-nous votre lecture de l’actualité dans votre pays et qu’en est-il des conséquences sur votre communauté ici en Italie ?
D.C.A : Durant l’insurrection comme tout Burkinabè vivant à l’extérieur j’étais assez inquiet. Mais je pense qu’il y a eu plus de peur que de mal. Le président Blaise Compaoré s’en est allé comme il venu: par la petite porte. La transition, quant à elle semble bien faire son travail.
J’étais au Burkina Faso lors du FESPACO et j’ai vu que tout fonctionne assez bien, même si c’est vrai que ce n’est pas facile après ce genre de changement à la tête d’un Etat comme le Burkina Faso. Etant également un adepte de Sankara, voir tous ces jeunes et ces femmes chanter son nom m’a rendu assez fier de mon pays.
Nombreux sont les Italiens qui connaissent le Burkina soit à travers le Fespaco soit à travers Sankara. En clair en tant que Burkinabè, nous sommes assez fiers de notre pays et cela joue beaucoup sur notre rapport avec l’Italie mais aussi avec les autres communautés africaines qui résident ici.
B24 : Que pensez-vous du report du vote de la diaspora burkinabè décidé par la transition ?
D.C.A : Je suis assez réaliste pour comprendre qu’après un changement aussi brusque à la tête de l’Etat burkinabè, les choses ne seraient pas du tout faciles pour les nouvelles autorités d’organiser le vote des Burkinabè à l’extérieur.
Au-delà de l’aspect économique très important, il y a aussi l’aspect temps et organisation. En si peu de temps, c’était quasi impossible. Je comprends que les Burkinabè de la diaspora aient envie de participer au vote mais ils devront prendre leur mal en patience et attendre 2020.
B24 : En fin d’interview, quel est votre message au peuple burkinabè ?
D.C.A: Le peuple burkinabè doit être fier de son histoire. Ce petit pays “pauvre” est en train de démontrer que le changement est possible. Ici les Burkinabè sont beaucoup respectés parce que reconnus comme étant des grands travailleurs et cela explique en partie ma nomination.
Je demanderai aux autorités burkinabè de commencer à regarder aussi vers l’Italie. C’est un pays qui a su développer une culture des petites et moyennes entreprises, des coopératives. Cela, je crois, pourrait être utile pour le Burkina Faso, mais aussi pour toute l’Afrique.
Interview réalisée par Kouamé L.-Ph. Arnaud KOUAKOU-Burkina24
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