Production de biocarburant : du ventre et du réservoir, lequel nourrir ?
Ces derniers temps, de nombreux pays africains font face à la sécheresse et à la faible production suite aux dernières récoltes. Liées aux phénomènes climatiques, les productions agricoles de ces pays sont nettement en deçà des attentes et du nombre de bouches à nourrir. Pendant ce temps, dans d’autres pays, surtout occidentaux, la production l’usage des produits alimentaires pour la production du biocarburant, vient rappeler les inégalités entre les continents.
Dans une de ses nombreuses interventions, le sociologue suisse Jean Ziegler voit en la production massive de biocarburants « un crime contre l’humanité ». C’est peu de dire que cette réflexion rejoint le sentiment du sahélien qui, juste après ses longs mois de labeur, ne s’en sort qu’avec de maigres productions.
Si la production de biocarburant, peut être perçue comme une source de déviation de la destination finale de la production des denrées alimentaires, les adeptes de cette pratique voient en elle la source du salut de l’Humanité. Les produits de première nécessité destinés à la consommation des personnes sont mis à prix au profit de multinationales qui cherchent à créer de nouvelles envies chez les populations mondiales. Les détracteurs de telles pratiques commerciales critiquent une volonté manifeste de tout mettre à leur profit et d’abuser du peu de produits à repartir entre les habitants de la planète.
Pourtant, les points positifs à propos de la production de biocarburant ne manquent pas. Produits dérivés des éléments issus, en majorité des plantes, les biocarburants sont réputés pour leur capacité à diminuer le taux de CO2 que le monde entier produit. Ils permettent ainsi de protéger l’environnement qui souffre des méfaits des êtres humains.
Le Burkina Faso comme de nombreux pays africains, dépend des hydrocarbures tirés des sous-sols d’autres pays. Ces produits et leurs dérivés sont utilisés dans la production d’électricité et le transport. Pour cela, notre pays s’intéresse aux potentialités des biocarburants. Si remplacer les produits pétroliers par des biocarburants pourrait permettre à la fois d’alléger la facture énergétique et de développer des filières génératrices de revenus et d’énergie en milieu rural, il n’en demeure pas moins qu’en arriver à cela pourraient être dommageables. En effet, la production de ces biocarburants nécessite des espaces qui auraient pu être aménagés pour la production de denrées de premières nécessité. Pourtant, l’on rencontre des défenseurs farouches de cette nouvelle pratique qui s’étend sur l’ensemble de la planète. Les brésiliens sont passés maîtres dans la production d’éthanol, dérivé de la canne à sucre dont ils sont l’un des grands pays producteurs. Pour eux, l’on doit plutôt en vouloir à la diminution du pouvoir d’achat mondial à l’inflation du niveau de vie en Inde et en Chine où se crée de plus en plus de classes moyennes, que s’abattre sur la production des biocarburants. En d’autres termes, la production du biocarburant ne serait aucunement facteur des difficultés alimentaires que connaît le Monde.
Au Burkina Faso, des initiatives sont prises pour mettre en branle des structures de production du biocarburant. Des espaces sont dégagés pour permettre aux promoteurs de s’engager dans cette voie. Cependant, les structures de production de ses biocarburants sont obligées de faire de la concurrence aux paysans qui tentent tant bien que mal de trouver des issues favorables à leur sort. Dans notre pays, la quantité de terre cultivable est très réduite. Les parties du pays appelées « Greniers » sont très restreintes. En plus d’être très réduites, les terres cultivables sont beaucoup courtisées par les multinationales. Cela devrait amener les autorités à taire les volontés de promotion du biocarburant sur le territoire national, afin de donner aux paysans de l’espoir et une poche de survie.
Un pays comme le nôtre doit chercher plutôt à atteindre l’auto-siffusance alimentaire et non la sécurité alimentaire. S’il est vrai que la seconde est bonne, la première demeure mieux.
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