Résilience : Anne-Marie Coulibaly, une brave enseignante dans le Centre-Est

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Année scolaire 2022-2023, région du Centre-Est, au Burkina Faso, dans une localité. Elle décide de rester afin de garder son établissement ouvert et permettre ainsi à une cinquantaine d’élèves de se préparer et d’affronter le Certificat d’études primaires (CEP). Mère et épouse, ce choix n’est pas sans difficultés. Dieu aidant, elle obtient un succès de 100 % audit examen. Elle, c’est Anne-Marie Coulibaly, un nom d’emprunt que nous utilisons pour préserver l’anonymat de notre brave professeur certifié des écoles. Lisez ! 

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« Un jour où je faisais cours avec les élèves, mais j’avais programmé une rencontre avec les parents d’élèves pour parler de la cantine endogène. Sortant donc pour la rencontre avec les parents, immédiatement, comme la fenêtre était ouverte, il y a un parent qui m’a dit ‘’eh Directrice, ils sont là (ndlr, terroristes)’’ ! 

Donc, on était obligés de fuir alors que ce n’était pas eux, c’était une patrouille des VDP (ndlr, Volontaires pour la défense de la patrie). Ça m’a beaucoup marquée, je sens que jusqu’à présent, j’ai l’hypertension à cause de ça… »

Anne-Marie Coulibaly, professeur certifié des écoles dans la région du Centre-Est

Ce témoignage est l’illustration du quotidien d’Anne-Marie Coulibaly, nom d’emprunt, qui officie dans le Centre-Est du Burkina Faso. Au péril de sa vie, elle passe toute l’année scolaire 2022-2023 dans ladite région, considérée comme l’une des zones rouges du pays ; zone où il est susceptible d’avoir plus d’attaques de type terroriste.

Le sentiment que l’on ressent lorsqu’on se trouve être dans une telle zone, c’est celui de la peur. C’est donc la peur au ventre, avec le sentiment qu’à tout moment, ça peut être la fin, qu’Anne-Marie Coulibaly refuse d’abandonner son école, ses élèves et leur donne l’enseignement et toute l’instruction nécessaire pour leur permettre, comme d’autres enfants du pays, de faire face aux épreuves du Certificat d’études primaires (CEP).

Dieu aidant, sa résilience paie. Avec un effectif de 53 élèves présentés audit certificat, le plus grand effectif de sa Circonscription éducative de base (CEB) du fait de l’insécurité et de la fermeture des autres établissements, tous sont admis.

Anne-Marie est âgée de 42 ans et mère de 4 enfants. Ce résultat n’est pas sans sacrifices du côté familial. Le choix de rester accomplir son devoir professionnel l’éloigne de ses enfants. « Avant, j’étais avec mes enfants qui fréquentaient avec moi. 

Mais à cause de l’insécurité, j’étais obligée de faire partir les enfants dans une autre localité où j’ai dû faire une semaine avec les enfants, puisqu’il y a un qui est trop petit ; il était dans une classe intermédiaire du primaire. Le séjour d’une semaine là-bas m’a permis de lui donner un vélo et rester lui montrer le chemin de l’école, vu qu’il ne le maitrisait pas encore. Après ça, je suis repartie pour ouvrir mon école », raconte notre combattante.

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Un choix, confie Anne-Marie, qui lui donne souvent des remords et l’envie de tout abandonner et rejoindre sa famille dans une autre localité, où le risque d’attaque est moindre et profiter de la vie comme n’ont hésité la quasi-totalité des fonctionnaires de sa localité.

Mais quand surgissent ou resurgissent de telles pensées, c’est son époux, dit-elle, qui arrive à lui remonter le moral, à l’encourager et lui faire comprendre tout le sens de son sacrifice. « Mon mari m’a beaucoup encouragée. Cette résilience, c’est en partie grâce à lui », témoigne-t-elle.

Celle qui dit apprécier le tô à la sauce gombo frais et aussi pratiquer la marche comme sport est perçue comme le symbole de la résilience de sa localité. « Si nous tous on fuit, qu’est-ce que ces enfants vont devenir à la longue ? Dans 10 ans, ce sont les mêmes enfants qui vont nous attaquer encore. Moi je préfère que nous soyons résilients pour pouvoir éduquer nos enfants », partage-t-elle sa conviction.

  Année scolaire 2023-2024, sous de bons auspices !

Sous des arbres, devant les salles de classes, on échange de tout et de rien pendant que le soleil, peu à peu, pointe à l’horizon. L’on entend également des cris, et nous sommes témoins de courses-poursuites engagées entre copains.

Ce lundi matin, à 7h 15 minutes, les scolaires de l’école de notre brave Anne-Marie Coulibaly, tout comme leurs amis à travers le pays, attendent dans la joie de reprendre les cours ; l’année scolaire 2023-2024 étant officiellement lancée par le Ministère de l’éducation nationale, de l’alphabétisation et de la promotion des langues nationales (MENAPLN).

Issa Siribié (nom d’emprunt), un collègue

En cette nouvelle année scolaire, il faut davantage être résilient. Tous donc, parents d’élèves, élèves et corps enseignant, en ont conscience. Le courage et l’esprit de combativité de notre brave marquent encore les esprits et devraient même être un levier pour démontrer cette résilience tant attendue.

« C’est une dame déterminée. L’année passée, quand il y avait la visite récurrente des terroristes ici, elle est restée dans le cadre du travail. Avec ses collègues, il n’y a vraiment pas de problèmes. C’est vraiment une femme battante, déterminée. Elle a été résiliente. L’année passée, on a été visité près de 4 à 5 fois par les terroristes. C’était la débandade quand on entendait qu’ils étaient de l’autre côté (ndlr, localité voisine). Mais elle, avec quelques-uns, se sont montrés déterminés », témoigne Issa Siribié (ndlr, nom d’emprunt), un collègue. 

Assétou Kagambèga (ndlr, nom fictif), une autre collègue rassure de la bonne entente, de la cohésion, de la solidarité qui règnent dans la collégialité. « Ici à l’école, on s’entend bien ; il y a l’union, l’entraide », dit-elle. Pour ce qui est du caractère résilient de sa collègue et amie, le son de cloche ne change pas. « Elle est dynamique, elle se donne à fond. Elle a été courageuse. 

Elle n’a jamais fui, et nous aussi. On se débrouillait. Les parents avaient peur, les enfants aussi. Les enfants, on les a encouragés à travailler jusqu’en fin d’année, jusqu’à ce qu’on obtienne ce résultat. Avec l’aide de Dieu, on s’en est sorti », confie-t-elle.

Parent d’élèves

Les parents d’élèves ne tarissent pas d’éloges à l’endroit de notre héroïne. « Les mots nous manquent pour lui dire merci », marmonne un parent d’élève. Les mains jointes, les pieds croisés, ce dernier a espoir que cette nouvelle année scolaire se déroulera sans grandes difficultés.

« L’année passée, c’était vraiment dur. Mais cette année, comme il y a les VDP qui sont là, nous prions pour que ça aille mieux que l’année passée », espère-t-il. Le soupir de Moussa, un autre parent d’élèves, en dit long sur le déroulement de l’année scolaire 2022-2023. « L’année passée, humm ! », s’exclame-t-il.

Pour le Chef de circonscription d’éducation de base (CCEB), Mme Coulibaly est une enseignante de vocation. « Dans une zone à fort défi sécuritaire et abandonnée par ses 9 autres collègues, elle a continué à enseigner en jours ouvrables comme en weekend dans le seul but d’obtenir les meilleurs résultats possibles.

Son dynamisme se reconnait à ses préparations quotidiennes de la classe ; à la conjonction des activités pédagogiques et administratives qu’elle mène ; à la mobilisation sociale des parents d’élèves à travers les différentes structures (APE ; AME ; COGES) pour la bonne marche de l’école », avance Antoine (ndlr, nom d’emprunt).

A titre d’illustration, il fait savoir les différents mérites de son enseignante. « Son école a le meilleur comité de la CEB. Aussi elle a remporté le 2e prix provincial de la mise en œuvre des cantines endogènes ; initiative qu’elle a engendrée pour une première dans une si vieille école. Pour l’examen du CEP, elle a présenté 53 candidats et tous ont réussi soit un taux de 100%. Il en est de même pour les résultats de l’entrée en 6e », cite-t-il…

La file d’exploits de notre brave et résiliente enseignante est longue…

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Tambi Serge Pacome ZONGO  

Burkina 24 

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Serge Pacome ZONGO

Tambi Serge Pacome ZONGO, journaliste s'intéressant aux questions politiques et de développement durable.

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