Salon international de l’agriculture, de l’environnement et de l’élevage (SIAEL) : Zoom sur les lauréats des prix officiels
L’Association pour le développement du monde rural (ADMR) a organisé, du 20 au 27 février 2024, dans la commune rurale de Komsilga, la 7e édition du Salon international de l’agriculture, de l’environnement et de l’élevage (SIAEL) sous la présidence du Premier ministre, Apollinaire Joachimson Kyélem de Tambèla. Pour l’édition 2024, ce sont au total 9 prix officiels, c’est-à-dire 3 kûuri d’or, 3 kûuri d’argent et 3 kûuri de bronze, qui ont été décernés dans les catégories Environnement, Élevage et Agriculture. Allons à la découverte de ceux qui n’ont certainement pas volé leurs récompenses au regard de leurs hauts faits d’armes sur le champ de bataille de l’environnement, de l’élevage et de l’agriculture où ils enregistrent de nombreuses victoires.
El hadj Salifou Ouédraogo, kûuri d’or Environnement
A 81 ans, il règne sur plus de 100 ha. Visite guidée de la plantation de l’homme au pari fou. Des baobabs à perte de vue : nous sommes à Sig-Nonghin, dans les Banwa, où se dressent 40 000 pieds plantés en 56 ans. C’est en 1968 qu’El hadj Salifou Ouédraogo se lance dans cette aventure. Pourtant le natif de Titao voulait d’abord exploiter une mangueraie.
Les mangues de Salifou pourrissent et il change son fusil d’épaule en décidant de se lancer dans la plantation de baobabs. Après un essai de trois plants pour la consommation familiale, il retourne sur ses terres à Titao à la recherche de graines de baobab pour en faire une pépinière et c’est de là que tout est parti.
Le baobab est un arbre aux vertus incommensurables aussi bien nutritionnelles, sanitaires que culturelles et il est également au cœur de mythes et légendes. Sur l’ensemble des sites d’exploitation dont il dispose dans la boucle du Mouhoun et dans le Sud-Ouest, il dit réaliser trois récoltes par an. Il commercialise également les pieds de baobab dont les prix vont de 2000 à 5000 F CFA. La plupart de ses clients lui viennent du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire, du Mali et du Sénégal.
Chantal Ouédraogo, kûuri d’argent Environnement
Trois hectares de karité plantés et entretenus par des femmes, telle est l’œuvre de l’Association des femmes 2000 (AF2000) qui pense que la lutte contre la pauvreté en milieu féminin viendra de la préservation et de la réalisation des ressources forestières, notamment des produits forestiers non ligneux. Depuis 1997, 45 groupements et associations donnent ainsi la leçon depuis Ziniaré où est implanté le siège sous le leadership éclairé de Chantal Ouédraogo.
Le karité occupe une place de choix comme c’est le cas sur le site de 3 hectares à Barma dans la commune de Laye. « Nous voulons que tout le Burkina soit couvert de karités puisque cet arbre peut créer de l’emploi et augmenter les revenus des femmes » ; une croisade qui nécessite des moyens conséquents. C’est pourquoi Chantal Ouédraogo et ses sœurs sollicitent des forages pour une exploitation judicieuse du site de Barma.
Fatoumata Sory, kûuri bronze Environnement
C’est l’une des femmes battantes du Burkina Faso. Fatoumata Sory réalise sa passion d’enfance, asseoir son entreprise pour la transformation des produits agro-alimentaires, notamment les produits forestiers non ligneux.
« Nous avons une gamme de produits locaux tels que les graines de néré transformées en soumbala, le beurre de karité, le jujube ; nous avons aussi commencé à extraire l’huile de baobab, l’huile de neeme ». Une gamme variée de produits qui font du « Grenier du paysan » un maillon essentiel dans la chaîne de production.
De trois employés en février 2013, dame Sory emploie 12 personnes et plus de 100 emplois indirects de nos jours. L’insécurité, la rupture parfois des emballages et la non–organisation des filières constituent cependant ses difficultés majeures. « Il faut accompagner la transformation sinon le monde de la production va toujours faire du surplace », dit-elle, avant d’inviter les populations à consommer local pour soutenir les producteurs.
Lassané Sawadogo, kûuri d’or Elevage
Lui, c’est le champion des champions. Passionné d’élevage, il totalise des milliers de têtes de bovins, de caprins, d’ovins et de volaille sur 5 sites (Boulpooré, Bigtogo, Vaga, Kongoussi et Kamboinsé) et ne s’exprime qu’en milliards.
Passé par l’armée, le militaire troque son arme contre un bâton de berger et mène à Kamboinsé un autre combat dont il maîtrise parfaitement le terrain. « Je n’ai pas choisi de faire l’élevage, c’est de naissance ; j’ai appris à le faire avec mes parents, après mes enfants le feront » C’est donc une question d’amour qui se transmet de père en fils. Lassané est donc assis sur les épaules de ses parents dans la ferme familiale de l’arrondissement 9 de Ouagadougou avec près de 115 000 têtes, rien que sur ce site.
Les animaux des quatre autres sites dont il dispose sont convoyés à Kamboinsé pour le croisement. « Ici, nous ne faisons que la production ; nous amenons ceux que nous avons croisés et seuls les grands gabarits sont amenés à s’accoupler avec les vaches. Après cela, nous les engraissons et les mettons sur le marché. Il y a certains que nous faisons sortir chaque deux mois et ils coûtent 575 000 F CFA et d’autres en 90 jours que nous vendons à 1000 000 F CFA ou à 11 000 000 F CFA.
Il y en a qui peuvent aller jusqu’à 3 000 000 l’unité et cette année j’en ai vendu 430 ». Rien que pour ces 430 têtes, notre guerrier a empoché 1,2 miiliard. « Grâce à cela, j’ai pu acheter un tracteur d’une valeur d’un milliard pour cultiver la terre afin d’avoir du foin pour les animaux ; pour l’instant je suis le premier en Afrique noire à l’avoir », conclut-il avec fierté.
Guillaume Rémi Sow, kûuri d’argent Elevage
Guillaume Rémi Sow est le spécialiste des porcs au Burkina Faso. Pour s’en convaincre, il suffit de faire un tour dans sa ferme agro-sylvo-pastorale à Logofourousso, à la périphérie de Bobo-Dioulasso. Près de 1300 têtes de cochon réparties dans plusieurs bâtiments y sont regroupées en fonction de la taille, de l’engraissement, etc.
Rien qu’avec la production porcine, son chiffre d’affaires s’élève à plus de 600 millions de F CFA et c’est le fruit de trois ans d’élevage et d’une passion née sur les bords de la lagune Ebrié. «C’est une passion d’enfance car j’ai pratiqué l’élevage des porcs quand j’étais en Côte d’Ivoire pendant 6 années avec un instituteur ; c’est un domaine assez porteur et j’encourage les autres à s’y mettre ».
La passion est devenue un business après quelques années seulement et il a ses canaux d’écoulement et aide les autres acteurs de la filière. « Je préfinance les producteurs et cela leur permet d’écouler leur production également, ce qui n’était pas facile pour eux. Beaucoup élevaient mais ne connaissaient pas les débouchés ». M Sow emploie 14 personnes et il fait de la production agro-alimentaire qu’il transforme sur place pour nourrir les bêtes.
Richard Moné, kûuri de bronze en élevage
Ingénieur agronome et spécialiste en hydraulique, notamment en système d’irrigation, ce jeune cadre du ministère de l’Agriculture est affecté à Fada, son premier poste, après sa soutenance en 2008 à l’Institut du développement rural de l’université Nazi-Boni de Bobo-Dioulasso. Ayant la soif d’apprendre et de découvrir, il se retrouve à Bogandé deux ans plus tard à l’ONG ACF (Action contre la faim) avant de déposer son baluchon à Dori, dans le Séno, pour une autre expérience avec une ONG américaine dans le cadre de la gestion des réfugiés.
« Après deux ans à Dori, j’ai commencé à élever de la volaille, à faire des poussins et véritablement cela s’achetait bien. En l’espace de deux ans, j’ai acheté un terrain pour commencer l’élevage ». Nous sommes en 2013 et ni le réseau MARP, ni le projet ASKAI, ni la GIZ ni son séjour dans une ONG internationale à Bangui en Centrafrique de même que son dernier poste comme chargé de programme à l’ambassade du Danemark au Burkina Faso n’ont détourné Richard de son but.
Il a fini par déposer ses pénates à Loumbila où il fait de la production végétale et animale dans sa ferme écologique intégrée. « Nous avons l’aviculture avec une race de volaille qui a une performance exceptionnelle avec une croissance très rapide ; en 5 jours le poussin peut atteindre 5 kg et 8 kg à l’âge adulte ; nous revendons ces poussins aux aviculteurs qui sont intéressés». La production végétale nourrit et soigne la production animale qui, à son tour, entretient la production végétale. M. Moné a 10 employés permanents et reçoit par an 20 stagiaires des écoles et instituts de formation en agronomie pour la transmission de son expertise.
Kani Bicaba, kûuri d’or Agriculture
Avec ses 500 ha, il est le champion de la production agricole. Kani Bicaba trace le sillon à suivre pour montrer que l’autosuffisance alimentaire est bel et bien possible au Burkina Faso.
Dans ses magasins s’entassent plus de 1000 tonnes de maïs, 3000 tonnes de petit mil, plus de 200 tonnes de sorgho, 44 tonnes d’arachide. Le Stakhanov du Sahel produit également à grande échelle le coton, le sésame et le soja et affiche un chiffre d’affaires de plus de 800 millions de F CFA par an. « J’invite mes collègues producteurs à respecter l’agriculture, il n’y a pas autre chose dans notre pays qui puisse dominer ce secteur.
Le pays n’est pas pauvre, notre terre est très riche et je ne parle pas des ressources minières mais plutôt de l’agriculture, car il est impossible de travailler la terre et de ne pas s’enrichir ». Kani, l’entrepreneur agricole, ne s’est jamais assis sur le banc d’une école, certes, mais il est allé à l’école de son père. Avec qui il a cheminé des années durant dans les travaux champêtres avant de s’établir à Fenkui dans la commune de Ouarkoye en 1981.
Depuis lors, il évolue à son propre compte avec de nos jours des milliers d’employés saisonniers et des dizaines de permanents. Ses jours de récoltes et de conditionnements, en guise de solidarité, les 24 villages de Ouarkoye sont là pour épauler son personnel. En plus de la production agricole, il fait de la production animale avec des gros et petits ruminants ainsi que de la volaille.
Ivon Kiénou, kûuri d’argent Agriculture
Ivon Kiénou est, au propre, un cas… d’école. En pleine année scolaire, alors qu’il fait la classe de terminale, il décide de ne plus fréquenter. «Cela n’a pas été facile car mes parents étaient contre. N’ayant pas été à l’école ils désiraient avoir des enfants fonctionnaires mais telle n‘était pas ma vision». En 2006 le natif de Kiè, à 8 km de Solenzo dans les Banwa, se lance dans l’agriculture. Il crée une entreprise en 2008 et la formalise en 2014.
L’entreprise Mabata devient plus tard une société agricole. Aujourd’hui, il est un grand entrepreneur agricole avec 400 hectares de superficie pour six spéculations. Il pratique aussi l’élevage avec des centaines de têtes. «Je ne regrette pas mon choix ; j’ai accompagné plusieurs personnes qui sont de nos jours des docteurs».
M. Kienou voit grand : il veut révolutionner l’agriculture burkinabè pour la hisser au même niveau que celle des pays développés, c’est-à-dire en la mécanisant. Il emploie 60 personnes à temps plein, toutes déclarées à la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), et plus de 1000 saisonniers. Il fait un chiffre d’affaires de plus de 600 millions par an.
Bambou Bihoun, kûuri de bronze Agriculture
Bambou Bihoun, natif de Nakui, département de Béréba dans le Tuy, est un producteur dont la renommée va au-delà des frontières du Burkina. « Je n’ai jamais fait l’école mais grâce à la production agricole, j’ai reçu un trophée à Djibouti ». Appelé en pompier à l’UNPCB, il ramène la sérénité au sein de la faîtière des producteurs de coton qui était au bord de l’implosion entre 2017 et février 2022. Grand producteur, il exploite de grandes superficies pour diverses cultures.
«La production cotonnière vient en tête avec 200 tonnes, puis suivent le maïs, le riz, le mil, l’arachide et enfin le haricot. Avant je cultivais à la daba et j’ai évolué entre–temps avec l’obtention de la charrue ; maintenant je produis à l’aide de tracteurs ; j’en possède 8. J’ai construit dans les grandes villes du Burkina et dans mon village grâce à la production agricole qui me permet d’acheter des bœufs ici que je revends au Nigeria ».
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Source : SIAEL
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